Des résidants de Mascouche ont été renversés d’apprendre qu’ils pourraient devoir verser des centaines de milliers de dollars à leur municipalité si un projet de mur antibruit le long de l’autoroute 25 va de l’avant.

Une telle structure est une « amélioration sectorielle » qui devra être payée aux trois quarts par les résidants qui en bénéficieront, plutôt que d’être assumé à même le budget municipal, avertissent les ingénieurs de la Ville de Mascouche dans une lettre distribuée cette semaine, rue Brien.

La missive appelle les citoyens à se prononcer. Si 65 % d’entre eux veulent aller de l’avant avec un mur, le projet progressera. Facture : 136 000 $ par résidence si Québec subventionne le chantier, 272 000 $ dans le cas contraire. Les paiements peuvent atteindre 437 000 $ si les citoyens choisissent d’étaler la facture sur 20 ans de taxes foncières.

« Je n’ai pas ça. Je suis à la retraite. Avec notre retraite, on arrive, on s’en sort, mais c’est impossible » d’acquitter une telle facture, a expliqué Miguel Tomas à La Presse. L’homme a installé une affiche « NON AU MUR » sur son abri d’auto. « Je ne sais pas ce qu’on va faire. C’est incroyable. » Leur fille craint aussi que la maison – dont l’évaluation municipale avoisine les 250 000 $ – devienne invendable si les acheteurs doivent assumer une telle facture.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE

Miguel Tomas et son épouse Vilma s’opposent à la décision de la Ville.

M. Tomas et son épouse Vilma ont acheté leur maison en 1987, un an après avoir immigré au Québec. L’autoroute 25 bordait déjà les modestes bungalows de la rue Brien à ce moment. Au fil des 35 dernières années, le couple s’est habitué à la présence du bruit, qui a crû avec l’augmentation de la circulation automobile. « Elle ne me dérange pas, l’autoroute », a dit M. Tomas, dont la femme compare le bruit à celui de la mer.

Bassin limité

D’autres résidants semblent beaucoup moins l’apprécier.

Ce sont des plaintes de citoyens qui ont poussé Mascouche à faire évaluer l’intensité du bruit le long de l’A25, l’automne dernier, selon la lettre du service du génie de la Ville de Mascouche.

Résultat : les maisons d’un côté de la rue Brien, qui font dos à l’autoroute, reçoivent un niveau sonore trop élevé en vertu des normes du ministère des Transports du Québec.

Seule solution évoquée : un mur antibruit de « plus de 26 millions ». « Comme il s’agit d’une amélioration sectorielle, la construction d’un mur antibruit serait financée à 25 % par la Ville de Mascouche et à 75 % par les résidants du secteur qui en bénéficieraient », continue le document.

Et le bassin de payeurs potentiels est limité : seules 73 résidences seraient appelées à mettre la main à la poche. « Si vous recevez cette lettre […], vous auriez à contribuer financièrement », avertit la Ville de Mascouche.

La Ville a lancé une consultation virtuelle des propriétaires de ces 73 résidences. Si 65 % d’entre eux y sont favorables, le projet progressera.

C’est toutefois loin d’être la dernière étape avant la mise en chantier d’un éventuel mur, a précisé la Ville de Mascouche.

« Une mobilisation en défaveur »

« Si le projet recevait assez d’appuis de la part des citoyens (65 % et plus), ceux-ci seraient conviés à une séance d’information et le projet devrait ensuite faire l’objet de la procédure normale d’approbation réglementaire pour l’obtention d’un règlement d’emprunt », a indiqué Isabelle Gagné, conseillère aux communications au sein de la Ville. « Cette nuance est importante puisque le processus pourrait avoir une incidence sur la suite du projet. Autrement dit, même si l’issue de la consultation actuelle était favorable au projet, l’ouverture d’un registre pourrait venir changer la donne. »

Mme Gagné a souligné que la Ville répondait d’abord à des demandes de citoyens en mettant ce projet sur les rails. Toutefois, « je vous informe aussi qu’à l’heure actuelle, nous sentons une mobilisation en défaveur du projet », a-t-elle ajouté.

C’est peut-être le fait de Miguel Tomas, qui fait la tournée de ses voisins pour tenter de les convaincre de renoncer au mur antibruit : « On ne va pas payer tout ça pour le caprice de quelqu’un. »