Deux Montréalais font partie des 45 morts dans la bousculade survenue lors d’un pèlerinage orthodoxe, vendredi en Israël. Dovi Steinmetz, 21 ans, et Shraga Gestetner, 35 ans, s’étaient rendu à cet évènement religieux auquel participent chaque année des centaines de juifs de Montréal.

Angoisse et deuil

Mayer Feig, membre du Conseil des juifs hassidiques du Québec, a passé 45 minutes d’angoisse jeudi quand il a entendu parler de la bousculade. « Mon fils étudie dans une yeshiva [école religieuse] en Israël et il était sur les lieux du pèlerinage », explique M. Feig. Finalement, son fils s’en est tiré indemne. Ce n’est pas le cas d’un autre jeune Montréalais fréquentant une yeshiva israélienne, Dovi Steinmetz, qui avait 21 ans et est mort écrasé par la foule. Il laisse dans le deuil ses parents et quatre frères et sœurs, selon M. Feig. L’autre victime montréalaise est Shraga Gestetner, un chanteur religieux de 35 ans qui s’était établi à New York après son mariage. « Depuis quelques années, il avait abandonné le chant et avait fondé un organisme qui aidait les membres de notre communauté qui ont des problèmes sociaux et psychologiques. » M. Gestetner avait cinq enfants, selon M. Feig.

PHOTO FOURNIE PAR MAYER FEIG

Shraga Gestetner

PHOTO FOURNIE PAR MAYER FEIG

Dovi Steinmetz

Circonstances

Le pèlerinage attire habituellement un demi-million de personnes, dont des centaines de Montréalais, selon M. Feig. À cause de la pandémie, il s’agissait du premier grand rassemblement religieux autorisé en Israël, et la foule était étroitement surveillée par la police, selon l’Agence France-Presse (AFP), qui mentionne qu’un « couloir étroit » permettait d’arriver au lieu du pèlerinage. « Davantage de gens sont arrivés, de l’intérieur et des côtés. La police ne les laissait pas sortir, donc ils ont commencé à être serrés les uns contre les autres, puis à s’écraser », a raconté à l’AFP l’un d’eux, Shmuel, 18 ans. « Des dizaines de personnes sont mortes écrasées. » La foule aurait peut-être atteint 100 000 personnes, selon l’AFP. La fête avait commencé le jeudi soir et s’était poursuivie toute la nuit.

PHOTO SEBASTIAN SCHEINER, ASSOCIATED PRESS

Escalier menant au lieu du pèlerinage du mont Méron. Il y aurait eu 100 000 personnes jeudi soir.

Condoléances de Montréal

À Montréal, Valérie Plante et Denis Coderre ont exprimé leurs condoléances aux familles des victimes, vendredi. Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a pour sa part décrété un jour national de deuil dimanche, selon l’AFP. « La catastrophe du mont Méron est l’une des plus graves qui aient frappé l’État d’Israël », a dit M. Nétanyahou en promettant une enquête sur la catastrophe. L’AFP rapporte que dans les quartiers ultra-orthodoxes de Jérusalem et à Bnei Brak, près de Tel Aviv, des milliers de juifs orthodoxes, vêtus de blanc et de noir comme à l’habitude, ont défilé dans les rues à la mémoire des victimes. « Nous enterrons nos morts le plus rapidement possible, donc pour Dovi Steinmetz c’est déjà fait, dit M. Feig. Je sais que la famille de Shraga Gestetner va arriver samedi en Israël. »

PHOTO GIL COHEN-MAGEN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Funérailles d’une victime de la bousculade, dans un cimetière de Petah Tikva

Origines

Le lieu du pèlerinage est le mausolée de Shimon bar Yohaï, un rabbin du IIsiècle après Jésus-Christ qui aurait composé le Zohar, l’un des livres de la Kabbale, courant ésotérique du judaïsme. Son mausolée est situé au mont Méron, dans le nord du pays, plus haut sommet d’Israël après le Golan. Le pèlerinage se fait à l’occasion de la fête de Lag Baomer, une pause au milieu de la période de deuil rituel survenant chaque année après la Pâque juive. Cette fête est l’occasion de réjouissances, prohibées durant la période de deuil rituel, qui dure presque deux mois. Selon l’Institut européen des musiques juives, à Paris, trois hypothèses existent pour expliquer les origines de la fête de Lag Baomer. Elle pourrait constituer l’anniversaire de la mort de Shimon bar Yohaï. Elle pourrait aussi commémorer la mort de milliers de disciples d’un autre rabbin du IIsiècle lors d’une épidémie durant le deuil rituel suivant la Pâque juive. Ou elle pourrait célébrer une victoire de la révolte juive contre l’occupation romaine du IIsiècle, toujours durant ce deuil rituel. Cette révolte juive a fini par être écrasée, et le Temple de Jérusalem rasé.

PHOTO JALAA MAREY, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des juifs orthodoxes prient près du mausolée de Shimon bar Yohaï, lieu du pèlerinage effectué à l’occasion de la fête de Lag Baomer.