Certaines villes participant au Défi pissenlits ont sorti les tondeuses cette semaine, une situation qui soulève des questions chez les citoyens invités à retarder la tonte de leur gazon.

Ce qu’il faut savoir ?

Près de 130 villes participent cette année au Défi pissenlits, inspiré du mouvement britannique « No Mow May ».

Les villes participantes s’engagent à retarder la tonte du gazon sur la majorité des terrains municipaux jusqu’à la fin de la floraison des pissenlits.

Or, certaines villes ne retardent la tonte que sur une minorité de terrains, évoquant des contrats limitatifs, des raisons de logistique et des effets sur la santé de la population.

Danielle Bordua habite en face d’un parc municipal dans le quartier Sainte-Dorothée à Laval. En début de semaine, elle a été choquée de voir les tondeuses y faucher les pissenlits. « On nous demande de faire le Défi pissenlits, mais la Ville fait tondre les pelouses cette semaine dans les espaces publics », s’indigne-t-elle.

« Les terrains sportifs, je peux comprendre, mais ils pourraient ne pas toucher au reste. » Elle avait fait le même constat l’an dernier au moment où Laval avait participé pour la première fois au Défi pissenlits.

Sur son site internet, la Ville de Laval indique retarder les premières tontes sur dix terrains municipaux, notamment ceux de l’hôtel de ville et de six bibliothèques. Pourquoi pas davantage ?

« Pour des besoins sportifs, on maintient la tonte de certains terrains, indique Jonathan Lévesque, conseiller aux affaires publiques à la Ville de Laval. Aussi, nous avons des contrats en regard de la tonte de certains autres terrains qui doivent être respectés. C’est pourquoi il y a certains endroits où il y a eu des coupes. » L’an dernier, cinq terrains municipaux accueillaient les pissenlits en mai. M. Lévesque indique que la Ville a l’intention d’augmenter le nombre de terrains participants l’an prochain.

À Québec, c’est pourtant l’entièreté des terrains municipaux, à l’exception de ceux consacrés à la pratique du sport, qui ne sont pas tondus hâtivement au printemps ; la Ville a réussi, avec la collaboration de ses fournisseurs, à arrimer les contrats d’entretien avec la fin de la floraison des pissenlits.

Ailleurs dans la province, des citoyens ont souligné, sur Facebook, l’ironie de voir leur ville, inscrite au Défi pissenlits, passer la tondeuse début mai. C’est le cas notamment à Gatineau et à Saint-Hyacinthe, où 8 et 12 terrains sont respectivement ciblés par la tonte tardive. À Saint-Hyacinthe, la directrice des communications et de la participation citoyenne, Lyne Arcand, assure que seul le gazon des plateaux sportifs est coupé.

Sur le territoire de Gatineau, des terrains spécifiques sont ciblés pour diverses raisons, principalement « la gestion d’effectifs et la santé de la population », nous a répondu par écrit le Service des communications de la Ville de Gatineau. « Des employés sont spécifiquement attitrés à la tonte des terrains municipaux et il serait difficile de tous les relocaliser à cette période », précise-t-on. La Ville évoque aussi les difficultés qui surviennent dans les semaines suivant le défi – l’herbe haute ralentissant la cadence des équipes et accroissant les risques de bris d’équipement – ainsi que les répercussions que pourrait avoir le fait de ne pas tondre un terrain sur les personnes souffrant d’allergies.

Or, contrairement à la croyance répandue, le pollen des pissenlits ne voyage pas dans l’air, selon le biologiste Claude Lavoie, professeur à l’Université Laval et auteur de Pissenlits contre pelouse.

En mai, les végétaux responsables des rhinites allergiques sont surtout les arbres, précise-t-il. L’Institut national de santé publique du Québec confirme également que le pollen des pissenlits n’est pas allergène.

La majorité des terrains

En s’inscrivant au Défi pissenlits, une initiative lancée en 2021 par les apiculteurs de Miel & Co, les villes s’engagent à retarder la tonte du gazon de la majorité de leurs terrains, à ne pas appliquer de pesticides toute l’année et à inviter leurs citoyens et leurs employés à participer au défi. Les plateaux sportifs tels que les terrains de soccer sont exclus, précise Christina Fortin-Ménard, présidente du Défi pissenlits.

« On se fie à la bonne volonté des villes, déclare-t-elle. On aimerait contrôler tout ça, mais on est une organisation à but non lucratif. Nos moyens sont limités. On se concentre plutôt sur la sensibilisation. » Consciente du fait que certaines villes dérogent à cette règle, elle affirme ne pas pouvoir « jouer à la police ».

Près de 130 villes participent au Défi pissenlits. Pour les inciter à faire preuve de sérieux et assurer la pérennité du Défi, l’organisation a instauré cette année des frais d’inscription symboliques de 200 $ qui incluent des outils de communication. « On veut qu’une ville qui s’inscrit incite ses citoyens à participer, mais que, d’abord, elle le fasse », dit Christina Fortin-Ménard.

Soulignons que certaines villes, comme Sherbrooke, ont choisi de ne pas s’inscrire au Défi pissenlits, mais de mener leur propre campagne de sensibilisation.