Le Centre d’étude de la forêt propose trois pistes de solution pour assurer la résilience et la résistance de la forêt face aux changements climatiques, à commencer par des coupes qui maintiennent une plus grande proportion d’arbres semenciers, dans le but d’assurer une régénération naturelle de la forêt en cas de perturbation.

« Les forêts qui brûlent sont trop jeunes, donc elles n’ont pas encore atteint l’âge de maturité [pour se reproduire naturellement] », explique la biologiste Annie Deslauriers, codirectrice du CEF et coautrice du mémoire que l’institution a soumis aux Tables de réflexion sur l’avenir de la forêt.

L’aménagement forestier pratiqué au Québec depuis plus de 60 ans, axé principalement sur les coupes totales, a complètement transformé le portrait de la forêt, souligne le document, le faisant passer à une majorité de forêts jeunes ou en régénération.

Or, dans les 7500 ans qui ont précédé ce changement, la forêt était plutôt composée d’une majorité de peuplements de plus de 100 ans, laissant une minorité de forêts rajeunies par les perturbations naturelles comme les chablis, les épidémies d’insectes ravageurs et les incendies.

Le CEF propose aussi une « réserve de précaution » pour anticiper le risque d’incendies de forêt, ce qui implique de réduire a priori le volume de bois pouvant être récolté, plutôt qu’a posteriori comme c’est le cas actuellement sur l’essentiel du territoire québécois – une gestion qui vaut d’ailleurs des critiques au Forestier en chef du Québec.

Il faut voir une réserve de précaution comme un compte en banque. S’il y a une mauvaise année, on peut aller puiser dedans.

Annie Deslauriers, codirectrice du Centre d’étude de la forêt

Troisièmement, le CEF propose de recourir à la culture forestière intensive sur « des portions définies et limitées du territoire », « à proximité des usines de transformation », pour contrebalancer les pertes de volume de bois provoquées par les incendies de forêt.

« On ne peut pas faire ça sur l’ensemble de la forêt, on risque d’hypothéquer la biodiversité », indique Annie Deslauriers, expliquant que ce type de culture implique beaucoup d’intervention humaine, notamment pour « éliminer un peu plus la compétition » afin de favoriser une croissance rapide des arbres sélectionnés.

Le CEF réitère en outre sa recommandation de créer un observatoire national de la forêt du Québec, indépendant, qui fournirait des données scientifiques probantes et facilement accessibles à tous les acteurs concernés.

« Il y a des gens au sein du ministère [des Forêts] qui ont peur que ce soit un organisme qui va critiquer le gouvernement », avance Pierre Drapeau, ancien directeur du CEF, pour expliquer que sa proposition de longue date ne s’est jamais concrétisée.