(Fredericton) Une organisation environnementale internationale appelle le gouvernement fédéral à renforcer la protection des baleines noires de l’Atlantique Nord, qui est une espèce en voie de disparition, et à aller au-delà des mesures de 2023 qu’il choisit de maintenir cette année.

Océans Canada indique que les taux de natalité sont déjà inférieurs aux attentes pour la saison et qu’au moins trois des 19 baleineaux noirs de l’Atlantique Nord nés jusqu’à présent sont présumés morts cette année.

La directrice de campagne de l’organisation, Kim Elmslie, avance que les observateurs auraient dû enregistrer jusqu’à présent entre 25 et 30 nouvelles naissances de baleineaux, puisque la population locale totale de 360 baleines contient environ 70 femelles reproductrices.

« C’est positif parce que nous avons quelques baleineaux de plus », a-t-elle affirmé vendredi en entrevue, ajoutant que seulement 12 nouvelles baleines noires étaient nées l’année dernière.

« C’est donc positif, mais la mort des baleineaux est vraiment pénible, car c’est l’avenir de l’espèce », a-t-elle nuancé.

La saison des naissances des baleines noires commence vers la fin novembre et se poursuit jusqu’en février, a expliqué Mme Elmslie.

Les baleines noires donnent généralement naissance au large des côtes de la Géorgie et de la Floride, dans le sud, et retournent au Canada pour se nourrir, a-t-elle précisé.

« J’ai entendu dire qu’on les appelle les baleines urbaines parce qu’elles se déplacent assez près des côtes le long de l’est des États-Unis […] et jusque dans les eaux canadiennes », a relaté Mme Elmslie.

« Mais en cours de route, ils rencontrent tous ces différents navires qui transitent dans la zone. Et des millions de lignes d’engins de pêche entre les États-Unis et le Canada », évoque-t-elle, ajoutant qu’il existe d’autres problèmes moindres comme le bruit océanique.

« C’est très difficile pour ces animaux. Ils sont menacés dans toute leur aire de répartition », a dit Mme Elmslie.

Les enchevêtrements, l’un des principaux facteurs

La National Oceanic and Atmospheric Administration Fisheries, basée aux États-Unis, qui suit les baleines noires, documente sur son site web les naissances de baleineaux remontant à 2007.

Les données montrent que les naissances ont commencé à rebondir après avoir atteint un minimum de zéro en 2018. Elles sont passées à sept l’année suivante, 10 en 2020 et 20 en 2021, avant de retomber à 15 en 2022 et 12 l’année dernière.

Les baleines noires, dit-on, atteignent la maturité sexuelle vers 10 ans et donnent naissance à un petit après une grossesse d’un an.

Alors que l’intervalle entre les naissances est généralement de trois ans, les baleines noires ont désormais des petits tous les six à dix ans, indique le rapport.

« Les biologistes pensent que le stress supplémentaire dû aux enchevêtrements, aux blessures causées par les collisions avec des navires et aux changements dans la disponibilité des proies en raison du changement climatique contribue probablement à ce que les baleines noires donnent naissance moins souvent, même lorsque les femelles survivent à l’évènement », peut-on lire sur le site web.

Alors qu’une année « relativement » productive pour les baleines noires verrait au moins 20 naissances, le rapport indique que les taux de mortalité et de blessures graves d’origine humaine signifient qu’il faut au moins 50 baleineaux ou plus par an pendant « de nombreuses années » pour arrêter le déclin de l’espèce.

Une étude publiée plus tôt ce mois-ci dans la revue Biological Sciences, dans laquelle les chercheurs ont découvert que les enchevêtrements dans les engins de pêche sont l’un des principaux facteurs du déclin de l’espèce, a souligné Mme Elmslie.

Entre 1990 et 2017, l’étude indique que ces facteurs sont responsables de la mort d’au moins 41 animaux. Les autorités ont découvert 21 baleines tuées par des collisions avec des navires et 20 autres à cause d’enchevêtrements dans des engins de pêche.

Les cas d’enchevêtrements modérés à graves ont augmenté au cours de la dernière décennie, selon l’étude.

Miser sur des engins sans corde

Pêches et Océans Canada a annoncé plus tôt cette semaine qu’il n’apporterait aucun changement aux mesures de l’année dernière pour la protection des baleines noires. Le ministère a mentionné que les mêmes restrictions de vitesse, interdictions d’engins et fermetures de zones déclenchées par des signes de présence d’une baleine resteront inchangées en 2024.

Mme Elmslie se dit heureuse qu’Ottawa ait laissé les mêmes mesures en place, car les baleines noires de l’Atlantique Nord ont besoin de toute l’aide possible. Toutefois, elle soutient qu’il est nécessaire d’agir davantage, notamment en faisant des engins de pêche sans corde une priorité.

Elle estime que la création de centres de prêt pour ce type d’équipement pourrait faciliter une éventuelle transition, ajoutant que les pêcheurs pourraient emprunter l’équipement sans corde pour la saison sans avoir à débourser pour des outils qui ne leur sont pas familiers.

« Nous avons, grâce à la technologie, la solution sans corde, et cela va aider non seulement les baleines noires, mais toutes les baleines à fanons qui se trouvent dans le golfe du Saint-Laurent », a-t-elle affirmé.