(Paris) Le papier toilette représente une source inattendue et « potentiellement importante » de PFAS, ces substances chimiques surnommées « polluants éternels » et nocives pour la santé, qui s’infiltrent dans les eaux usées et les sols du monde entier, selon une étude publiée mercredi.

Les perfluorés (PFC) et polyfluoroalkylés (PFAS) sont une famille de composés chimiques de synthèse créés à partir des années 1940, regroupant plus de 4700 molécules. Ils doivent leur surnom à leur cycle de vie très long.

Présents dans de nombreux objets de la vie courante (cosmétiques, ustensiles de cuisine antiadhésifs, vêtements imperméables…), ils ont été associés à plusieurs types de cancers, de maladies cardiovasculaires, de problèmes de fertilité et de troubles du développement chez les enfants.

Les chercheurs de l’étude, publiée dans la revue Environmental Science & Technology Letters, ont collecté entre novembre 2021 et août 2022 des rouleaux de papier toilette vendus en Amérique du Nord, en Amérique latine, en Afrique et en Europe occidentale, ainsi que des échantillons d’eaux usées provenant de stations d’épuration aux États-Unis.

Ils y ont découvert la présence de « phosphates de polyfluoroalkyle disubstitués » – ou diPAP – des composés qui peuvent se transformer en PFAS plus stables tels que l’acide perfluorooctanoïque, potentiellement cancérigène.

Cette découverte de PFAS dans le papier hygiénique peut s’expliquer par le fait que certains fabricants ajoutent des substances chimiques lors de la transformation du bois en pâte à papier, dont les traces persistent dans le produit final. Le papier toilette recyclé peut également être fabriqué à partir de fibres provenant de matériaux contenant des PFAS, indique l’étude.

Ces mesures ont ensuite été comparées avec les données d’autres études sur les niveaux de PFAS dans les eaux usées et sur l’utilisation de papier toilette par habitant dans plusieurs pays.

L’étude conclut que le papier toilette était à l’origine d’environ 4 % des diPAP détectés aux États-Unis et au Canada, de 35 % en Suède et jusqu’à 89 % en France.

Les différences selon les pays, et notamment en Amérique du Nord, proviennent du fait que d’autres produits comme les cosmétiques, les textiles ou les emballages alimentaires y sont responsables de la présence de PFAS dans les eaux usées.

Les chercheurs soulignent qu’il est « essentiel » de réduire leur présence dans les eaux usées, « couramment réutilisés pour l’irrigation et/ou l’épandage » donc susceptibles d’entraîner une exposition humaine et environnementale aux PFAS.

L’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), saisie par cinq pays de l’UE mi-janvier, va évaluer une proposition de bannir les PFAS d’ici 2026.