(Montréal) « L’Appel de Montréal » à mettre en place des changements systémiques pour contrer le déclin de la nature « inédit dans l’histoire de l’humanité » a été lancé jeudi soir, dans le cadre de la 15conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP15).

« Des changements visant seulement les facteurs directs de la dégradation de la nature ne seront pas suffisants pour renverser [son] déclin », dit le texte, qui souligne également que les solutions de remplacement technologiques « ont leurs limites » et ne pourront remplacer certaines contributions vitales de la nature.

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Appel de Montréal : événement de clôture de la conférence sur la causes sous-jacentes de pertes de biodiversité

Le lancement de l’Appel de Montréal intervient au terme d’une conférence sur les causes sous-jacentes responsables de la perte de biodiversité, comme la surconsommation, l’urbanisation et la production non durable, tenue par la société civile en marge de la COP15.

L’Appel répond aux « demandes répétées » mais souvent ignorées des scientifiques du monde entier de s’attaquer à ces causes indirectes du déclin de la biodiversité et du réchauffement climatique, a indiqué Alain Branchaud, directeur général de la section québécoise de la Société pour la nature et les parcs du Canada.

« Pour qu’il n’y ait plus jamais aucune COP où on va mettre de côté cette discussion importante », a-t-il dit, en gonflant un ballon de baudruche pour illustrer que la Terre a des limites physiques qui ne peuvent être dépassées.

Appui politique

« Ce sont des changements radicaux qui s’imposent », a déclaré la mairesse de Montréal, Valérie Plante, appuyant l’Appel et invitant « toutes les villes, tous les pays » à faire de même.

L’humanité ne peut faire l’économie des « questions difficiles, voire inconfortables » qui s’imposent pour contrer le déclin de la biodiversité, qui menace son existence, a déclaré la mairesse, au côté de la grande cheffe du gouvernement de la Nation crie, Mandy Gull-Masty.

Mme Plante a donné l’exemple des véhicules électriques, une bonne idée pour le climat, mais qui amène des défis en matière de biodiversité : « Si on n’encadre pas strictement l’extraction des métaux, on menace les zones cruciales à protéger. »

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Appel de Montréal : événement de clôture de la conférence sur la causes sous-jacentes de pertes de biodiversité

Si on veut réussir, il faut que la protection de la nature devienne le critère central de toutes nos décisions. C’est la seule et unique approche responsable pour garantir notre avenir.

Valérie Plante, mairesse de Montréal

« On ne doit pas avoir peur de mettre en place des idées nouvelles et de reconsidérer notre façon de faire les choses », a ajouté Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement et du Changement climatique du Canada, réitérant l’importance de placer les peuples autochtones au cœur des efforts de conservation.

« L’Appel de Montréal, c’est un début, on ne s’arrêtera pas avec cet appel », a promis Benoit Charette, ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs du Québec, affirmant qu’« il n’y a pas de place pour la partisanerie » sur les questions environnementales.

Repenser l’économie

Le Cadre mondial de la biodiversité de l’après-2020, qui doit être élaboré à Montréal durant la COP15, doit inviter les gouvernements à éliminer ou rediriger les incitatifs économiques néfastes pour la biodiversité.

« Comme on l’a fait pour les subventions aux combustibles fossiles, on va devoir faire le travail d’évaluation au Canada pour voir quelles sont ces subventions-là et se donner un échéancier serré pour les éliminer », a indiqué M. Guilbeault dans un entretien avec des médias, en marge de l’annonce.

À l’échelle mondiale, ces subventions néfastes pour la nature totalisent quelque 500 milliards de dollars, a souligné le ministre.

Mettre fin aux causes sous-jacentes du déclin de la biodiversité implique aussi de penser l’économie autrement.

« J’aime parler de croissance intelligente », a expliqué le ministre Benoit Charette, qui a illustré son propos en rappelant être lui-même allé annoncer au Saguenay–Lac-Saint-Jean le rejet par son gouvernement du projet d’usine de liquéfaction de gaz naturel Énergie Saguenay de l’entreprise GNL Québec.

De telles situations sont appelées à se répéter, a prévenu M. Charette. « Il y a maintenant des impératifs qui vont guider nos décisions qui, il y a quelques années, n’auraient sans doute pas été considérés. »

L’utilisation d’autres indicateurs économiques que le produit intérieur brut ou l’implication des peuples autochtones dans les processus décisionnels sont des exemples de changements systémiques que le gouvernement canadien a déjà commencé à mettre en place, a pour sa part illustré Steven Guilbeault.