Au terme d’une année marquée par des catastrophes climatiques, alors que le monde est en voie de rater l’objectif de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C, la COP27 s’ouvre dimanche à Charm el-Cheikh, en Égypte.

« Justice climatique »

Il sera notamment question d’argent, à Charm el-Cheikh. Les pays en développement, plus vulnérables aux conséquences des changements climatiques auxquels ils ont pourtant peu contribué, en réclament pour faire face à la crise. « Le grand thème de la COP27, c’est vraiment la justice climatique », explique l’ex-député péquiste Sylvain Gaudreault, qui sera sur place à titre de représentant du Centre québécois du droit de l’environnement et du Fonds Solidarité Sud, une organisation non gouvernementale québécoise. « Il y aura des débats sur l’engagement des pays du Nord, industrialisés, les plus riches », prévoit celui qui en sera à sa sixième COP.

PHOTO PAUL CHIASSON, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Sylvain Gaudreault, représentant du Centre québécois du droit de l’environnement et du Fonds Solidarité Sud

« Pertes et préjudices »

L’un des enjeux concerne les « pertes et préjudices » causés par les changements climatiques. Une entente est recherchée afin que les pays du Nord paient la réparation des conséquences de la crise climatique dans les pays du Sud, notamment après une catastrophe naturelle, illustre Sylvain Gaudreault. « Il y a beaucoup de réticence des pays du Nord à s’embarquer là-dedans », dit-il. Un autre enjeu concerne le financement de la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) des pays en développement et leur adaptation aux changements climatiques. Les pays industrialisés ont promis 100 milliards US par année jusqu’en 2025 et l’après-2025 reste à déterminer.

Catastrophes naturelles en toile de fond

Sécheresses et canicules en Europe et en Chine, inondations au Pakistan et aux États-Unis, ouragan aux Îles-de-la-Madeleine ; l’ombre des nombreuses catastrophes naturelles survenues en 2022 pèsera sur les discussions, croit l’ambassadrice du Canada pour les Changements climatiques, Catherine Stewart. « Les pays ont beaucoup de pression pour augmenter leurs ambitions, démontrer qu’ils font quelque chose », croit-elle, reconnaissant toutefois que « ce sera difficile ». Seuls 23 pays sur 193 ont soumis leurs plans d’engagements renforcés avant la COP27, se désolaient les Nations unies, il y a quelques jours. « Il y a beaucoup de pays qui doivent faire plus. Oui, c’est décourageant », laisse tomber Catherine Stewart, elle aussi une habituée des COP.

Des « défis » pour le Canada

Le Canada a aussi beaucoup à faire, alors qu’il affiche les émissions de GES par habitant les plus élevées du Groupe des 20 plus grandes économies de la planète (G20) et est le seul pays du Groupe des 7 (G7) dont les émissions de GES ont augmenté depuis l’accord de Paris. Ottawa s’est engagé à mettre fin aux subventions aux énergies fossiles d’ici la fin de 2022, mais il était encore en 2021 au 2e rang des pays du G20 qui subventionnent le plus ce secteur, à 8,5 milliards de dollars par année en moyenne, selon un rapport de l’organisation Oil Change International publié il y a quelques jours. « Bien sûr, il y a des défis », admet Catherine Stewart. « Nous voulons parler de nos progrès, mais aussi de nos défis », ce qui peut s’avérer utile pour les autres pays, dit-elle.

PHOTO FOURNIE PAR ENVIRONNEMENT ET CHANGEMENT CLIMATIQUE CANADA

Catherine Stewart, ambassadrice du Canada pour les Changements climatiques

Une occasion pour le Québec

Le Québec pourrait faire preuve de « leadership » à la COP27 en s’engageant sur la question des « pertes et préjudices », espère Sylvain Gaudreault. « L’an passé, l’Écosse avait brisé le tabou en prenant l’engagement de verser 1 million de livres sterling », une première, et la Wallonie lui a emboîté le pas, dit-il, soulignant qu’il s’agit là de deux États infranationaux comme le Québec. La province pourrait aussi rattraper son retard en matière de transition juste, pour aider les travailleurs « qui vont être touchés par la transition écologique », notamment dans le domaine de l’aluminium et des transports, croit Sylvain Gaudreault. « Il faut que le Québec soit à l’avant-garde, et il ne l’est pas », tranche-t-il.

Trudeau et Legault absents

Plus de 120 chefs d’État et de gouvernement sont attendus à Charm el-Cheikh, dont les présidents états-unien Joe Biden et français Emmanuel Macron, de même que le nouveau premier ministre britannique Rishi Sunak, qui a fait volte-face après avoir initialement annoncé qu’il ne s’y rendrait pas. Justin Trudeau et François Legault n’y seront toutefois pas. La délégation canadienne sera menée par le ministre de l’Environnement et du Changement climatique Steven Guilbeault. Seront aussi présents les ministres québécois de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette, et de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon.

Ça veut dire quoi, COP ?

La COP est la conférence annuelle des signataires de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), adoptée en 1992 lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro, au Brésil, et signée à ce jour par 197 États. « COP » est l’acronyme de l’appellation anglaise Conference of Parties. Depuis la première COP, en 1994, différents accords contraignants sont venus renforcer le traité initial, comme le protocole de Kyoto, en 1997, et l’accord de Paris, en 2015.

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    Nombre de millions de tonnes (Mt) de gaz à effet de serre (GES) émises par le Canada en 2020, une baisse de 8,9 % par rapport à l’année précédente attribuable à la pandémie de COVID-19
    Source : ministère de l’Environnement et du Changement climatique du Canada