Livrer les achats sans détours inutiles, sans émettre de gaz à effet de serre, sans gêner la circulation et, surtout, en simplifiant la vie des petits commerçants. C’est ce que propose Stoz, nouvel acteur qui vient d’apparaître dans le secteur de la livraison à vélo, à Montréal, et qui ambitionne de se déployer ailleurs au Québec.

Corinne Beaulieu s’arrête à l’occasion au café à côté de chez elle, récupère un petit paquet, parfois plus, puis s’élance sur son vélo pour en faire la livraison.

Elle retourne ensuite chez elle, d’où elle suit ses cours universitaires en ces temps de pandémie.

« Ça me fait sortir de chez moi pendant mes études, ça me fait voir Montréal et ça me fait de l’argent de poche en même temps », raconte la jeune femme de 24 ans.

Ainsi fonctionne Stoz, nouveau venu dans le milieu de la livraison à vélo dans la métropole : tout cycliste peut faire des livraisons, à la fréquence qui lui convient.

À la différence de bien d’autres, il s’agit d’une livraison « point à point », qui va directement du commerce au client, sans passer par un centre de tri ou un entrepôt.

C’est l’opposé de la plupart des services de livraison traditionnels, qui ne se sont pas adaptés au commerce ultralocal, affirme Laurence Pageau, cofondatrice de Stoz, dont elle est la directrice des opérations et de la responsabilité sociale.

« Mettons que je livre d’ici à la porte d’à côté, Postes Canada va venir chercher le colis, l’apporter à son centre de distribution de Saint-Laurent et le rapporter à la porte d’à côté », illustre Laurent St-Cyr, cofondateur et gestionnaire administratif de Stoz.

Et les services de livraison traditionnels utilisent « de gros véhicules à essence, qui n’ont pas de place pour se stationner et qui bloquent la circulation », ajoute Laurence Pageau.

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Laurence Pageau, cofondatrice de Stoz, dont elle est la directrice des opérations et de la responsabilité sociale

On s’attaque au gaspillage de temps et d’énergie.

Laurence Pageau, cofondatrice de Stoz

Stoz propose la livraison en un à trois jours, contrairement à Amazon, qui a « créé des attentes en termes de livraison inconciliables avec l’environnement », lance Laurence Pageau.

Pour les petits commerçants

L’idée de Stoz est née au début de la pandémie, quand « la livraison hyperlocale a pris des proportions monstrueuses », raconte Laurent St-Cyr.

Lui-même copropriétaire d’un café rue Saint-Denis, il a vite constaté que les livraisons par des tiers lui prenaient « un temps fou », puisqu’il devait traiter manuellement chaque commande.

« On voulait livrer nous-mêmes [et] beaucoup, beaucoup de cyclistes se sont proposés pour livrer, mais encore fallait-il les organiser, optimiser les routes », explique cet ingénieur industriel de formation, qui a longtemps travaillé dans l’entreposage.

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Laurent St-Cyr, cofondateur et gestionnaire administratif de Stoz

Avec l’aide d’un ami ingénieur logiciel et les réflexions d’autres petits commerçants, la plateforme Stoz a vu le jour ; testé depuis l’été dernier, le service a été officiellement lancé à la fin du mois de mars.

Stoz s’intègre aux systèmes de gestion de commerce en ligne comme Shopify, qui propulse une forte majorité des boutiques en ligne.

« Le client ne voit pas ça, il fait son panier, il achète, il sélectionne la livraison qu’il veut », puis les informations requises pour la livraison sont transférées automatiquement à Stoz et le commerçant n’a qu’à indiquer quand le colis sera prêt à être récupéré, explique Laurent St-Cyr.

Le but, c’est que ce soit le plus simple pour le commerçant [tout en étant] une solution de livraison écoresponsable.

Laurence Pageau, cofondatrice de Stoz

Les colis à livrer sont répartis sur différentes « routes » par Julien Coullerez, coordonnateur logistique de Stoz, lui-même livreur à ses heures, avec l’objectif de « faire le plus de colis possible sur une route ».

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Julien Coullerez, coordonnateur logistique de Stoz

Le système détermine ensuite le meilleur itinéraire, en tenant compte du lieu de résidence du cycliste qui effectuera la livraison.

Le meilleur d’Uber, sans le pire

Les cyclistes qui font des livraisons pour Stoz sont donc des travailleurs autonomes, comme les chauffeurs d’Uber, mais là s’arrête la comparaison, affirme Laurent St-Cyr.

Les cyclistes choisissent eux-mêmes leurs « routes » de livraison – ils peuvent donc en faire une seule ou plusieurs, en fonction de la distance, de la destination, etc. – et sont payés au kilométrage et au nombre d’arrêts, sans « notion de performance », ce qui donne en moyenne 15 $ l’heure.

Et pour les commerçants, le tarif ne dépend pas de la valeur de la commande, mais bien de sa taille.

Uber prend 30 %, nous, c’est un coût fixe.

Laurent St-Cyr, cofondateur de Stoz

Ce modèle a l’avantage de permettre une évolution rapide ; il suffit d’un bassin de cyclistes suffisant et de commerçants intéressés pour lancer le service dans un secteur.

Stoz suscite d’ailleurs déjà de l’intérêt à Québec, Trois-Rivières et Shawinigan, se réjouissent ses fondateurs.

Pour l’instant limitée à la livraison de petits colis, comme les vêtements, les cosmétiques ou le café, Stoz pourrait élargir son offre en fonction de la disponibilité de cyclistes dotés de l’équipement nécessaire au transport de colis plus volumineux.

La plateforme pourrait aussi s’adapter à un système de livraison en voiture, pour les milieux ruraux, souligne Laurent St-Cyr.