Un seul masque facial jetable peut libérer plus de 1,5 million de microplastiques dans l’eau après avoir été altéré pendant plusieurs heures par des rayons UV, révèle une récente étude menée par des chercheurs de l’Université de Concordia. Devant ce résultat, ils appellent à une meilleure gestion des masques usagés pour réduire leur impact sur l’environnement.

Le doctorant Zheng Wang et le professeur adjoint au Département de génie du bâtiment, civil et environnemental, Chunjiang An, se sont penchés pendant plusieurs mois sur la décomposition des masques jetables dans un milieu littoral.

Leur étude a paru en septembre dans une publication scientifique, Journal of Hazardous Materials, avec la participation de spécialistes de l’Université de Regina, de Pêches et Océans Canada, de l’Université Memorial et d’un étudiant au doctorat à Concordia.

Le fameux masque bleu chirurgical, considéré comme plus efficace que ceux en tissus ou artisanal, représente un moyen pour prévenir la propagation de la COVID-19. Depuis le début de la pandémie, il est estimé que 129 milliards de masques faciaux sont utilisés chaque mois dans le monde, ayant toutefois comme conséquence de laisser des traces dans le paysage, notamment dans les cours d’eau.

« Nous avons constaté que les masques étaient jetés au hasard dans l’environnement en raison d’une gestion inappropriée et de l’absence de sensibilisation à l’égard de l’environnement », explique M. Wang, à La Presse Canadienne.

Comme les masques jetables sont composés de plastique, les deux chercheurs montréalais ont voulu vérifier leur potentiel de dégradation dans une zone riveraine et leurs risques.

Ils ont alors simulé les conditions d’un environnement littoral sur un ensemble de masques en les plaçant notamment dans une boîte transparente non recouverte et exposée aux rayons UV, entre une heure et 48 heures.

Les masques ont ensuite été séparés en trois couches (extérieure, médiane et intérieure) et en fonction de leur temps d’exposition aux rayons.

Après 18 heures d’exposition, des « dommages notables » ont été constatés sur la surface des fibres des couches externe et interne. Après 36 heures, la dégradation était plus marquante alors que les fibres s’étaient fracturées créant de minuscules fragments.

La couche médiane des masques s’est pour sa part montrée plus sensible aux expositions alors que ses fibres sont six fois plus petites que les deux autres couches.

Les différentes couches ont aussi été mises dans des flacons contenant soit de l’eau ou du sable afin d’observer leur évolution. Dans l’eau, les chercheurs ont noté la libération de millions de microparticules et le fait que les fibres pénétraient facilement le liquide, même à l’œil nu, après 36 heures de dégradation.

Altéré par le sable, le nombre de microparticules libérées augmentait encore, pouvant atteindre jusqu’à 16 millions pour un seul masque.

L’étude expose donc que les rivages jouent un rôle dans la dégradation des masques et la libération de particules.

« Lorsque le masque est exposé aux rives, il sera affecté par des facteurs naturels tels que l’irradiation, les vagues et l’abrasion du sable. Ceux-ci peuvent provoquer des modifications physiques et chimiques du masque et le fragiliser. Par conséquent, après son altération dans ces conditions, le masque libère plus facilement des microplastiques », analyse Zheng Wang.

Face aux risques que posent ces millions de microplastiques pour la végétation et les animaux, M. Wang et son confrère souhaitent des changements pour réduire le nombre de masques abandonnés dans l’environnement.

Autant le gouvernement que les entreprises et le public peuvent faire une différence. Le doctorant propose entre autres de meilleures pratiques dans la gestion des déchets et la fabrication des masques avec des matériaux moins néfastes pour la nature.

La population devrait aussi être plus sensibilisée, selon M. Wang, à ne pas jeter n’importe où leurs masques. Le professeur Chunjiang An suggère d’ailleurs l’ajout de poubelles réservées aux masques dans différents lieux publics.