Mais l’avenir de l’espèce de papillon reste incertain

La fragile population de monarques a repris des forces cet été. C’est en bon nombre que la dernière génération née au Québec a commencé sa migration de 4000 km vers le Mexique.

« Une bonne nouvelle, dit Alessandro Dieni, coordonnateur de Mission monarque. Les résultats préliminaires de notre blitz annuel mené fin juillet par nos 439 participants indiquent que les chenilles sont beaucoup plus nombreuses que l’année précédente. »

Fondée il y a cinq ans, Mission monarque est un programme de science citoyenne qui compile des données sur la présence du papillon et des plantes qu’il affectionne un peu partout en Amérique du Nord. Les données recueillies cet été sur plus de 600 sites d’observation, surtout au Canada, démontrent la présence de 31 chenilles par 100 tiges d’asclépiade, leur nourriture exclusive, soit presque le double de l’an passé. Les monarques présents au pays ne représentent toutefois qu’environ 5 % de la population qui hiverne en territoire mexicain.

IMAGE TIRÉE DU SITE NAMONARCHS.ORG

Carte des migrations du monarque

Contre toute attente, la population qui hiverne dans les forêts montagneuses de l’État du Michoacán, au centre du Mexique, n’a pas trop souffert de la longue période de gel qu’a connue le Texas en février, tuant une bonne partie de la végétation, autant les asclépiades que les plantes nectarifères qui nourrissent les papillons. Le Texas est la première étape migratoire après l’hivernage mexicain.

Les papillons de troisième génération sont arrivés au Québec à la fin du mois de mai, deux semaines plus tôt qu’en temps normal, et même un mois dans les Maritimes, ce qui laisse croire aussi que plusieurs papillons se sont reproduits au nord du Texas, faute d’y trouver des conditions propices.

À l’heure actuelle, ce sont les monarques de la quatrième génération qui sont en partance vers le sud, où ils passeront l’hiver pour ensuite se reproduire au mois de mars suivant. La durée de la migration varie beaucoup selon le point de départ, mais s’étale sur trois à cinq semaines pour les papillons nordiques.

La longévité d’un monarque adulte est aussi normalement de trois à cinq semaines, mais les individus migrateurs de la dernière génération vont vivre plus de six mois parce que leur développement sexuel est retardé, ce qui leur permet de consacrer une plus grande part d’énergie au voyage et à l’hivernage. Après la sortie de la chrysalide, la croissance du papillon est arrêtée. Il se nourrit simplement pour survivre et se reproduire.

Une migration dangereuse

Si la migration actuelle se déroule sans problème, le nombre d’hivernants pourrait tripler cette année, a indiqué il y a quelques jours dans son blogue Chip Taylor, directeur fondateur de Monarch Watch, une organisation américaine de recherche et d’éducation qui suit de très près l’évolution du papillon.

Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. En dépit de l’existence de 35 000 stations végétales entretenues par des particuliers pour faciliter le repos et l’alimentation des monarques le long de leur parcours, surtout dans l’Est américain, le périple migratoire peut parfois être dévastateur, comme c’est le cas en période de sécheresse ou d’ouragans. Le nombre de monarques est l’objet de fluctuations importantes, mais le déclin est constant depuis 20 ans, autant dans la population de l’Est et que dans celle de l’Ouest, qui migre en Californie. Perte d’habitat hivernal, tempêtes de neige ou gel sur les aires d’hivernage, pesticides, raréfaction de l’asclépiade, changements climatiques sont notamment en cause.

C’est en mesurant la surface occupée par le papillon sur son territoire d’hivernage au Mexique qu’on évalue sa population. L’hiver dernier, neuf colonies occupaient 2,1 hectares, soit une baisse de 26 % par rapport à l’année précédente qui avait aussi accusé une chute importante. La superficie record avait atteint 18 hectares il y a 25 ans, mais en 2014, moins de 1 hectare de forêt avait hébergé des monarques.

Par ailleurs, on dispose de peu de données sur les autres populations de monarques dans le monde, mais seules celles d’Amérique du Nord sont migratrices. On pourra encore observer les papillons orange et noir jusqu’à la fin de septembre au Québec.

Consultez le site de Mission Monarque Consultez le site de Monarch Watch (en anglais)

4000 km

Au printemps et à l’automne, la migration des monarques qui se reproduisent ici s’étend sur environ 4000 km, soit la distance entre le sud du Québec et l’État mexicain du Michoacán.

Source : Monarch Watch

De 93 à 105 mm

L’envergure des monarques tourne autour de 100 mm, ce qui en fait l’un des plus grands papillons diurnes présents au Québec.

Source : Espace pour la vie

Pourquoi ne pas créer un jardin pour les monarques ?

PHOTO TIRÉE DE WIKIMEDIA COMMONS

Asclépiade commune en fleur

Non seulement le jardin servira à leur survie, mais il accueillera aussi d’autres lépidoptères et une foule de pollinisateurs qui en ont bien besoin.

Selon l’organisation Monarch Watch, un espace d’au moins 10 m2 peut convenir, une surface qui pourra toutefois se subdiviser en petits îlots fleuris.

Votre havre à papillons devrait être au soleil, à l’abri du vent et offrir des asclépiades, la nourriture exclusive des chenilles. Les fleurs fourniront le nectar énergétique aux voyageurs qui arriveront chez vous comme aux migrateurs au moment de leur départ vers le Sud. Deux asclépiades indigènes sont particulièrement appréciées : l’asclépiade commune et l’asclépiade incarnate, très décorative.

Choisissez aussi des plantes nectarifères annuelles et vivaces pour obtenir des fleurs tout l’été jusqu’à la fin de septembre.

Consultez le site du Jardin botanique