(Québec) L’année 2020 devait être celle du rattrapage du gouvernement Legault en environnement, mais elle l’a été… à seulement 40 %.

Disons d’abord que cette désastreuse pandémie est venue bousculer les priorités du gouvernement et la crise climatique a été éclipsée dans les manchettes.

En outre, l’environnement était déjà un des derniers thèmes sur lesquels la Coalition avenir Québec (CAQ) voulait faire campagne aux élections qui l’ont couronnée en 2018. Ce n’était clairement pas sa priorité.

Toutefois, la pression populaire s’est accentuée, notamment avec des mouvements comme le Pacte pour la transition.

Alors le premier ministre François Legault répétait qu’il allait arriver en 2020 avec sa propre stratégie, son propre Plan vert 2020-2030, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) du Québec, conformément aux cibles convenues dans l’accord de Paris sur les changements climatiques.

Le Plan vert a été finalement dévoilé l’automne dernier par le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, mais il est incomplet.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le ministre de l’Environnement, Benoit Charette

Il cible une baisse totale de 29 mégatonnes d’ici à 2030, mais prévoit des mesures pour seulement 12 mégatonnes, donc 40 % de l’objectif. Quels sont les moyens prévus pour diminuer les GES de 17 mégatonnes supplémentaires ?

Le gouvernement n’a pas encore apporté de réponse, même si François Legault s’est toujours targué d’être un homme de chiffres, d’objectifs concrets, de plan stratégique.

Dans son bilan de fin d’année, le premier ministre a évoqué « un beau plan, qui a été quand même assez bien reçu, même par les groupes environnementalistes ». En réalité, le Plan vert a été accueilli avec réserve et a même déçu dans les milieux spécialisés.

La pente est pourtant déjà abrupte : le Québec a accumulé un retard dans son plan de réduction de GES 2010-2020. L’objectif était de réduire de 20 % les émissions de GES en 2020 par rapport au niveau de 1990, or en 2017 on en était seulement à 8,7 % sur 20 %. On saura le bilan réel l’an prochain.

Le gouvernement Legault ne veut toutefois pas être tenu responsable des retards accumulés dans la réduction des GES du précédent gouvernement libéral.

Néanmoins, au-delà des statistiques et des cibles, les conséquences risquent d’être désastreuses dans les prochaines années si on s’éloigne de la cible de 2030.

En effet, en vertu du système de plafonnement des émissions de GES convenu entre le Québec et la Californie, les entreprises d’ici devront acheter des droits d’émission à l’État de Californie et cela pourrait coûter jusqu’à 16 milliards — une véritable fuite des capitaux qui se répercuterait dans les prix de l’essence, par exemple.

Un grand projet industriel a incarné en 2020 les dilemmes du Québec et du gouvernement caquiste dans la lutte aux changements climatiques : GNL Québec. Il consiste en la construction d’un gazoduc de 750 km transportant du gaz naturel de l’Ouest, à partir de l’Ontario, jusqu’à une usine de liquéfaction à Saguenay, pour acheminer ensuite le gaz naturel liquéfié (GNL) à l’étranger par bateau.

François Legault s’est exprimé à de nombreuses reprises en faveur du projet de plus de 10 milliards, même s’il est controversé.

Sur le cycle complet du projet, de l’extraction du gaz en Alberta à sa liquéfaction au Saguenay, le projet émettrait près de 7,8 millions de tonnes de CO2 par an, donc il annulerait en un an tous les efforts de réduction des gaz à effet de serre (GES) du Québec depuis 1990.

Des voix s’élèvent au Saguenay–Lac-Saint-Jean en faveur du projet, mais la quasi-totalité des mémoires déposés lors des consultations du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) était contre, alors que le gouvernement fixe l’acceptabilité sociale comme une des conditions de la réalisation du projet.

Le BAPE rendra public son rapport très attendu le 13 janvier. Ce sera ensuite au gouvernement Legault de trancher.