Il est « possible » qu'un gouvernement caquiste maintienne le monopole de la Société des alcools du Québec (SAQ). François Legault refuse de s'engager à ajouter de la concurrence dans la vente de vin et de spiritueux, se disant toutefois prêt à « regarder » l'idée. Il a convaincu son candidat Youri Chassin, promoteur de la privatisation, de se rallier à cette position.

C'est le troisième dossier depuis le début de la campagne où les convictions personnelles de M. Chassin, un économiste issu de l'Institut économique de Montréal, entrent en conflit avec les positions du parti.

« Je connais Youri depuis longtemps, et il y a deux choses importantes pour lui : investir en éducation [...] et gérer de façon plus efficace les fonds publics. Il y a d'autres dossiers - la SAQ, le pétrole et la gestion de l'offre - où il s'est rallié à la position de la CAQ », a expliqué M. Legault lors d'une mêlée de presse à Gatineau dimanche. On n'a pas vu M. Chassin aux côtés du chef depuis la fin août. « Il est à Saint-Jérôme, et il fait une très belle campagne », a dit M. Legault.

Le 24 novembre 2016, M. Chassin se prononçait dans La Presse en faveur de la privatisation de la SAQ. « Le monopole public de la Société des alcools du Québec (SAQ) est une relique des années 20 et de la prohibition, résultat de la décision d'exclure la bière, le vin et le cidre de la Loi sur la prohibition pour en confier le commerce à une " Commission des liqueurs ". Aujourd'hui, cela n'aurait pas de sens d'inventer un tel monopole public, tout comme cela n'aurait aucun sens de nationaliser la vente des boissons gazeuses ou du chocolat. Alors pourquoi le tolérons-nous ? », écrivait-il. François Legault a assuré dimanche qu'il « n'est pas question de privatiser la SAQ » s'il est porté au pouvoir.

Le ministère des Finances a rendu publique le 21 septembre une étude commandée par le gouvernement au sujet du modèle d'affaires de la SAQ. La firme PricewaterhouseCoopers conclut que « tous les scénarios de privatisation et d'augmentation de la concurrence présentent une proportion significative d'impacts négatifs lorsqu'ils sont comparés au statu quo » et que « la prudence est donc de mise avant de procéder avec des changements importants dans le modèle d'affaires de la SAQ ».

Le chef libéral Philippe Couillard a réagi à ce rapport en réitérant son opposition à une privatisation de la SAQ mais en ouvrant la porte à d'autres options, comme la vente de produits spécifiques dans le secteur privé.

« M. Couillard a encore copié la CAQ ! » a réagi M. Legault. « Ce qu'on veut, c'est de regarder la possibilité d'ajouter de la concurrence », dans le cadre d'une commission parlementaire où « plusieurs options » seraient examinées.

Il refuse toutefois de s'engager à changer le modèle d'affaires de la SAQ. Il n'y a donc pas de promesse ferme de sa part pour ajouter de la concurrence ? « Exact », a-t-il répondu. Serait-il alors possible de le convaincre de maintenir le statu quo ? « Oui. Ça pourrait être possible. »

Son candidat et député sortant, François Bonnardel était pourtant plus affirmatif sur la nécessité d'un changement au modèle d'affaires de la SAQ le printemps dernier. « On veut libéraliser le marché de l'alcool au Québec. Les Québécois sont prêts à cela. On doit augmenter l'offre et avoir une concurrence nouvelle », disait le porte-parole en matière de Finances en entrevue au Journal de Québec le 31 mai.