Certains portefeuilles semblent ne pas avoir les mêmes opinions politiques que leurs propriétaires: près d'une dizaine de candidats conservateurs et libéraux ont donné de l'argent à un autre parti fédéral au cours des dernières années, révèlent des vérifications effectuées par La Presse.

Au total, cinq porte-étendards de Justin Trudeau et trois de Stephen Harper ont contribué à la caisse électorale d'un autre parti que le leur. Les néo-démocrates et les bloquistes semblent plus disciplinés.

À une exception près, les généreux conservateurs ont donné aux libéraux, alors que les libéraux ont donné aux conservateurs.

Interrogés par La Presse, les candidats concernés évoquent des amitiés personnelles, plaident une simple participation à un cocktail ou admettent clairement un virage idéologique pour expliquer leurs contributions politiques passées.

Le plus récent de ces dons constitue aussi l'exception. Si Yvon Boivin a donné 400$ au NPD en 2013, c'est parce qu'il «croyait» que son député néo-démocrate «pourrait enfin solutionner» la crise de la pyrrhotite à Trois-Rivières et a donc décidé de l'appuyer à hauteur de 400$. «J'ai été extrêmement déçu», a dit l'ancien porte-parole régional des victimes du problème.

Le libéral René Vincelette, pour sa part, a fait un virage encore plus serré. Il était candidat conservateur en 2008, mais est passé dans le giron de Justin Trudeau, dans la circonscription de Saint-Hyacinthe-Bagot, pour le prochain scrutin.

Son de cloche différent sur l'île de Montréal. «Nicola [Di Iorio] n'a jamais voté conservateur», a tenu à assurer le porte-parole du candidat libéral dans Saint-Léonard-Saint-Michel. «En 2007, un collègue avocat chez Heenan Blaikie [...] avait décidé de se présenter pour le Parti conservateur, a expliqué Marc Gilbert. Il a demandé de l'aide à ses collègues [...] et Nicola a accepté de faire un chèque de 500$.»

Son collègue dans Mégantic-L'Érable, David Berthiaume, voulait plutôt faire du réseautage. «Au fil du temps, j'ai été invité à participer à différents cocktails politiques», a expliqué le candidat. «Il semblerait que le 8 septembre 2011, je me serais rendu à un cocktail conservateur», a-t-il dit après avoir rafraîchi sa mémoire en consultant le site d'Élections Canada. Il avait versé 200$ aux troupes de Stephen Harper.

Quatre ans plus tard, ces fonds ne profiteront sûrement plus à Roland Dick, candidat conservateur dans Laval-Les Îles, lui-même auteur d'un don de 500$ au parti de M. Berthiaume en 2009. «Alia Haddad [candidate libérale à l'époque] était la bonne personne au bon moment», a-t-il expliqué dans un courriel. «Laval et ses citoyens viennent en premier pour moi, et je sais qu'Alia croit également en cela.»

Situation inverse sur la Rive-Sud. Jean-Claude Poitras, maintenant libéral, a cru son ami conservateur Maurice Brossard quand il lui relayait «les belles promesses» de Stephen Harper. «Mais c'est loin de ce qui se passe vraiment dans la vraie vie», a-t-il expliqué. «C'était par amitié» qu'il a donné 300$, a-t-il dit.

Il a été impossible de joindre les conservateurs Mohammad Zamir et Daniela Chivu. Catherine Loubier, responsable des communications de la formation politique au Québec, a simplement indiqué par courriel que «de plus en plus de Québécois se reconnaissent dans [leurs] priorités - l'économie, la sécurité au premier chef».

- Avec la collaboration de William Leclerc