Le nouveau directeur général adjoint était gestionnaire à l’école Saint-Laurent, où des ex-employés font face à des accusations de nature sexuelle

La nomination au centre de services scolaire de Saint-Hyacinthe (CSSSH) d’un ancien gestionnaire de l’école secondaire Saint-Laurent, à Montréal – où travaillaient trois personnes qui sont sous le coup d’accusations d’agressions sexuelles ou d’exploitation sexuelle –, suscite l’inquiétude du syndicat d’enseignants de cette organisation.

Patrice Brisebois, qui ne fait pas l’objet d’accusations et qui a été directeur de l’école Saint-Laurent de 2013 à 2020, a été officiellement nommé directeur général adjoint le 16 mai.

« M. Brisebois s’est démarqué par sa riche expérience à titre de gestionnaire en éducation ainsi que par son fort leadership pédagogique », écrit dans l’avis de nomination Jean-Pierre Bédard, aujourd’hui directeur général du CSSSH, qui a travaillé une vingtaine d’années au centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys (où se trouve l’école Saint-Laurent).

Outre les accusations criminelles qui pèsent sur trois anciens membres du personnel, l’école Saint-Laurent a fait l’objet d’une enquête administrative du ministère de l’Éducation.

PHOTO TIRÉE DU SITE DU CSSSH

Le nouveau directeur général adjoint du CSSSH, Patrice Brisebois

Le rapport de l’enquête, terminé en juillet 2022, n’a pas été remis aux journalistes, qui n’ont reçu qu’un communiqué. Six mois plus tard, Radio-Canada, qui a obtenu le rapport après une demande d’accès à l’information, a relaté qu’il y est indiqué que « plusieurs indicateurs concernant des comportements inappropriés ont été accumulés au fil des ans sans faire l’objet d’une intervention adéquate, ce qui a permis d’instaurer une culture néfaste au sein d’un programme de basketball ».

Le rapport, indique aussi Radio-Canada, relève que la dignité des joueuses a été compromise depuis 20 ans, que les contrôles liés aux programmes sportifs étaient inadéquats et que le niveau de confiance organisationnelle était faible.

Priorité à « la gestion de l’image »

La nomination de M. Brisebois inquiète vivement le président du Syndicat de l’enseignement de Val-Maska, Patrick Théroux, qui s’en est d’abord confié au Courrier de Saint-Hyacinthe.

Quand la nomination a été annoncée à la séance du conseil d’administration de mai du CSSSH, M. Théroux a expliqué à La Presse avoir vite été préoccupé en relisant les articles des médias faisant état d’une omerta qui aurait eu cours pendant des années à l’école Saint-Laurent.

Patrick Théroux s’inquiète du fait qu’en raison de ses tâches, Patrice Brisebois sera appelé à être en contact avec les directions scolaires. Il se demande de quelle manière il traiterait la chose si quelque chose de grave devait aussi survenir dans une école de Saint-Hyacinthe.

Plus ça va – de façon générale dans le système scolaire au Québec –, « plus c’est la gestion de l’image [qui prime] avant tout dans les centres de services scolaires », avance M. Théroux.

Le président du syndicat des enseignants se demande aussi pourquoi un deuxième adjoint a été ajouté au directeur général, alors qu’il n’y en avait qu’un jusqu’ici.

En réponse à nos questions, Patrice Brisebois a répondu par courriel être « un gestionnaire qui a à cœur la réussite et le bien-être des élèves [et qui a] toujours pris des décisions en ce sens, au mieux de [ses] connaissances ».

« Une vigilance accrue » pour cette nomination

Par courriel, Esther Charrette, régisseuse aux communications au centre de services scolaire de Saint-Hyacinthe, rappelle que M. Brisebois n’a fait l’objet d’aucune accusation criminelle ni d’avertissement ou de mesures disciplinaires. Elle ajoute que « les allégations concernant M. Brisebois étaient connues du C.A. et du comité de sélection, lesquels ont fait preuve d’une vigilance accrue dans le dossier ».

En entrevue, Jean-Pierre Bédard, directeur général du CSSSH, a indiqué que « tout ce qui a tourné autour de l’école Saint-Laurent » a fait en sorte que le centre de services scolaire « s’est dit qu’il [fallait] porter un œil très vigilant » lors de l’étude de la candidature.

Le CSSSH dit avoir été accompagné « par un partenaire externe » pour le processus d’embauche. Le poste a été affiché pendant près de deux semaines, à différents endroits, et 21 candidatures ont été reçues.

Et pourquoi nommer un deuxième adjoint au directeur général, alors qu’il n’y en avait qu’un jusqu’ici ? M. Bédard répond que cela relève « d’un choix organisationnel » et a trait au remplacement d’une coordonnatrice.

Un autre ex-dirigeant devenu conseiller stratégique

Par ailleurs, un autre ancien dirigeant de l’école Saint-Laurent, Dominic Bertrand (directeur de l’école secondaire Saint-Laurent entre 2010 et 2012, puis directeur de la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys de 2015 à 2023), a été nommé en avril conseiller stratégique au ministère de l’Éducation.

À partir du 30 avril dernier, une demande d’entrevue avec Dominic Bertrand (qui n’est pas visé par des accusations criminelles) a été faite au ministère de l’Éducation, à qui l’on a aussi demandé la nature des nouvelles fonctions de M. Bertrand.

Esther Chouinard, porte-parole du ministère de l’Éducation, ne nous a pas encore répondu quant au rôle de M. Bertrand et l’entrevue avec lui n’a pas été accordée jusqu’ici.

Le rapport de l’enquête administrative sur l’école Saint-Laurent n’est pas disponible sur le site internet du ministère de l’Éducation.