En point de presse mardi, Marwah Rizqy, députée de Saint-Laurent, a dénoncé les récentes nominations de deux ex-dirigeants de l’École Saint-Laurent, où trois employés qui y travaillaient sont sous le coup d’accusations criminelles pour agressions sexuelles et exploitation sexuelle d’élèves. Elle réclame de nouveau une enquête indépendante sur les drames qui s’y seraient passés pendant 20 ans.

La Presse a rapporté mardi, après le Courrier de Saint-Hyacinthe, que le syndicat d’enseignants du Centre de services scolaire de Saint-Hyacinthe s’inquiète de la nomination de Patrice Brisebois à titre de directeur général adjoint de l’organisation. Il n’est pas sous le coup d’accusations criminelles. Il a été directeur de l’École Saint-Laurent de 2013 à 2020.

Dominic Bertrand, qui n’a pas non plus d’accusations criminelles qui pèsent contre lui, a été directeur de l’École Saint-Laurent entre 2010 et 2012, puis directeur de la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys de 2015 à 2023. Il a été nommé en avril conseiller stratégique au ministère de l’Éducation.

Mardi matin, Marwah Rizqy a souligné que les policiers se sont occupés de la partie criminelle de l’enquête. Ce qui manque dans l’équation, à son avis, c’est une véritable enquête indépendante pour savoir qui savait quoi.

« C’est au ministère de l’Éducation d’aller au fond des choses et il ne peut pas enquêter dans sa propre cour », a-t-elle déclaré, réclamant du ministre Bernard Drainville qu’il donne enfin le mandat à une firme indépendante.

En juillet 2022, le ministère de l’Éducation a dit avoir terminé son enquête, mais n’a remis qu’un communiqué aux journalistes. Radio-Canada a obtenu le rapport par une demande d’accès à l’information six mois plus tard. Il y est dit que « plusieurs indicateurs concernant des comportements inappropriés ont été accumulés au fil des ans sans faire l’objet d’une intervention adéquate, ce qui a permis d’instaurer une culture néfaste au sein d’un programme de basketball » de l’école.

Il y est aussi mentionné « que les contrôles liés aux programmes sportifs étaient inadéquats ».

Selon Mme Rizqy, « il serait temps que les gens soient imputables ».

« Quand allons-nous aller au fond des choses ? », demande-t-elle.

Dans la foulée des trois arrestations d’employés à l’École Saint-Laurent en 2022, le Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys avait publié un communiqué pour annoncer qu’il mandatait sur-le-champ une firme d’experts afin de faire la lumière « sur le climat de travail et ces évènements relatés » dans les médias (qui évoquait une omerta à l’école face à des dénonciations).

Le Centre de services scolaire avait renoncé à son enquête quelques semaines plus tard, sans l’annoncer publiquement, même si une firme avait bien reçu un mandat dans ce sens.

Interrogé par La Presse, le Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys avait alors expliqué avoir fait marche arrière parce qu’il était devenu impossible de tenir deux enquêtes simultanées sur la même situation.

Au cabinet de Bernard Drainville, ministre de l’Éducation, on a indiqué mardi que « les processus d’embauche des employés appartiennent aux Centre de services scolaires (CSS). Rappelons que dans le dossier de l’École Saint-Laurent, des accusations criminelles ont été portées et un procès aura lieu à l’automne. Le processus étant judiciarisé, nous ne commenterons pas davantage ».

Le cabinet n’a pas commenté la nomination de Dominic Bertrand qui, elle, relève de Québec et non d’un centre de services scolaire.

Autres réactions de l’opposition

Ruba Ghazal, députée de Québec solidaire, a aussi dit avoir été « choquée » par ces nominations. « Je comprends qu’il n’y a pas eu d’accusations criminelles, […] mais il y quand même eu un rapport qui a dit qu’il y avait une culture [de l’omerta] qui était instaurée. »

Elle souligne qu’il ne s’agit pas d’empêcher les anciens dirigeants d’avoir des emplois, « mais quelle était leur responsabilité et c’est quoi la conséquence ? Si j’étais ministre, je serais curieuse de le savoir. […] »

Évoquant la nomination de Patrice Brisebois, Pascal Bérubé, député péquiste, a dit que bien qu’il ne soit pas visé par des accusations criminelles, « on peut comprendre que ça suscite un questionnement à Saint-Hyacinthe ».

Avec Hugo Pilon-Larose et Fanny Lévesque