L'entrepreneur Tony Accurso a été assigné à comparaître devant la commission Charbonneau du 2 au 5 septembre prochain. Estimant que son assignation « viole son droit contre l'auto-incrimination », l'homme d'affaires a déposé hier devant la Cour suprême du Canada une requête demandant une suspension d'urgence de sa comparution, en attendant que le plus haut tribunal du pays tranche définitivement la question.

« Considérant que le délai moyen entre le dépôt d'une demande d'autorisation et la décision sur une telle demande était de trois mois en 2013, si cette honorable Cour ne se prononce pas d'urgence sur la présente demande d'autorisation d'appel, le demandeur pourrait vraisemblablement être contraint de comparaître devant la Commission avant même que cette Cour ne puisse statuer... Le préjudice que subirait le demandeur en pareilles circonstances serait sérieux et irréparable », peut-on lire dans l'une des trois requêtes déposées hier par Accurso (permission d'appel d'un arrêt de la Cour d'appel du Québec, requête de sursis d'assignation à comparaître, motion pour qu'une décision soit rendue d'urgence sur la requête de sursis).

Depuis un an, Tony Accurso multiplie les recours devant les tribunaux pour éviter d'être appelé à la barre de la Commission sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction (CEIC).

C'est la deuxième fois qu'il s'adresse à la Cour suprême. En avril dernier, elle avait refusé d'entendre sa cause, qui visait à lui permettre d'interroger Robert Lafrenière, commissaire à l'Unité permanente anticorruption, et à obtenir un résumé des enquêtes policières en cours contre lui.

Début juin, la Cour d'appel du Québec a aussi refusé d'entendre Accurso, qui tentait de casser un jugement qui l'empêche d'être exempté de témoigner devant la commission Charbonneau. L'entrepreneur, qui est en attente de procès pour fraude et corruption, craint que son témoignage ne serve à alimenter des enquêtes policières en cours.

Même si l'assignation à comparaître d'Accurso est « légitime », la Cour suprême doit maintenant trancher à savoir s'il subira un préjudice auquel seule l'exemption pourrait remédier, peut-on lire dans sa demande.

La commission Charbonneau ne confirme jamais plus de 24 heures à l'avance les témoins qui seront appelés à la barre. C'est dans la requête d'urgence déposée hier que les dates d'assignations ont été révélées.

Devant la Cour d'appel en mars dernier, l'avocat de la CEIC, Me Simon Tremblay a indiqué que la commission Charbonneau pourrait utiliser des « mesures alternatives » pour lui permettre de témoigner en attendant un jugement final. Son témoignage pourrait par exemple faire l'objet d'une ordonnance de non-publication et la Commission pourrait empêcher la présence de policiers dans la salle.