La promotion de Michel Simard au poste de juge en chef adjoint de la Chambre civile de la Cour du Québec peut paraître anodine puisqu'il était déjà juge.

En réalité, elle a bien plus d'impact que la nomination des deux autres candidats qui, selon Marc Bellemare, ont bénéficié des pressions «colossales» des argentiers libéraux Franco Fava et Charles Rondeau.

En effet, en soumettant contre son gré le décret 1138 à ses collègues du Conseil des ministres, le 29 octobre 2003, le ministre de la Justice Marc Bellemare savait bien qu'il était en terrain miné.

L'ami de longue date du comptable Charles Rondeau, sympathisant libéral, avait déjà 64 ans. Avant d'être nommé juge en janvier 1989 - sous le gouvernement Bourassa -, Michel Simard avait été associé au Parti libéral du Québec, a soutenu cette semaine Me Bellemare.

Franco Fava s'était vite joint aux démarches pour que le juge Simard obtienne le poste de juge en chef adjoint, toujours selon le témoignage de Me Bellemare. Ce poste est tout à fait névralgique. Cet adjoint siège, par sa fonction, à tous les comités indépendants chargés de scruter les candidatures aux postes de magistrats.

Excéder l'âge limite

Quand le gouvernement Charest l'a nommé, en octobre 2003, il était clair que le mandat de sept ans que lui confiait le Conseil des ministres excédait l'âge limite d'exercice pour les juges, 70 ans.

Or, a-t-on appris, jamais le Conseil des ministres n'avait avalisé la nomination d'un candidat à un poste dans le système judiciaire pour lequel, de toute évidence, il ne se qualifiait pas.

Durant son témoignage devant la commission Bastarache, Marc Bellemare a indiqué qu'il aurait préféré un candidat plus jeune, sans s'étendre toutefois sur le caractère inusité du décret qu'il avait à contrecoeur soumis au Conseil des ministres.

Tout au plus a-t-il évoqué qu'il avait fallu un nouveau décret pour permettre au juge Simard de conserver son poste après son 70e anniversaire, le 28 avril 2009.

Ce décret no 212-2009 a été soumis et adopté au Conseil des ministres le 12 mars 2009. On y précise que Michel Simard reste juge en chef adjoint jusqu'à la fin de son mandat de sept ans, soit le 4 novembre 2010.

Ce faisant, le gouvernement Charest balayait d'un revers de main l'une des principales recommandations du rapport produit au printemps 2008 par Daniel Johnson sur les conditions de travail des magistrats au Québec. Dans son rapport, l'ex-premier ministre souligne que, après avoir considéré la question, il estime qu'il faut maintenir à 70 ans l'âge de la retraite des juges.