Le troisième lien à Québec, ça, on savait. J’ai beau être un Montréalais de souche, j’étais au courant de ce projet de tunnel reliant les rives de Lévis et Québec. Comment ne pas l’être ? Les égocentriques de Montréal ne parlent de Québec que pour deux raisons : le retour des Nordiques et le troisième lien.

En mai 2021, le gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) avait dévoilé son plan. C’était gros en tabarouette : un tunnel à deux étages, de 8,3 km de long, de 19,4 m de diamètre, au coût estimé entre 7 et 10 milliards de dollars. Une construction pour les 100 prochaines années, dixit le PM. Une idée visionnaire réparant l’erreur historique d’avoir construit deux ponts, côte à côte, pour accéder à la Vieille Capitale. Ça, ce n’était pas l’idée du siècle, deux ponts collés, tout le trafic se dirigeant au même endroit. La loi de Murphy se vérifiant sur-le-champ ; tu viens pour emprunter le nouveau pont, tu constates que la circulation est plus fluide sur l’ancien, tu changes d’idée, tu prends l’ancien, et un coup dessus, tu constates que ça roule plus rapidement sur le nouveau. Maudit Murphy !

Vivement un troisième lien ! Pas si vivement que ça. Les environnementalistes s’y opposent. Les autres partis aussi. Le fédéral hésite à promettre de ramasser un bout de la facture. Sauf que dans les sondages, 60 % des citoyens de Québec et de Lévis l’appuient, c’est assez pour y tenir, si on veut se faire élire. En février 2022, la CAQ réduit le trou du tunnel, pour réduire le très prévisible trou dans le budget. Pendant tout ce temps, on attend le dévoilement d’une étude. En vain. Ça semble aussi long, creuser ses méninges, que creuser un tunnel. Lors des élections d’octobre 2022, la CAQ est réélue très majoritairement, et la région de Québec y participe grandement.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Bruno Marchand, maire de Québec

Six mois plus tard, demi-tour dans le tunnel, la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, annonce qu’aucune donnée ne justifie un tunnel autoroutier. Ah ben ! Si jamais tunnel il y a, ce sera uniquement pour le transport collectif. Le troisième lien devient le troisième rien. Heureusement, le maire de Québec, Bruno Marchand, a un plan : le tramway. Le bon vieux tramway, revenu à la mode dans plusieurs métropoles du globe. La Ville de Québec s’enligne donc sur les petits chars. Puis survient l’élection partielle dans Jean-Talon. Cuisante défaite de la CAQ. Le PQ renaît de ses cendres. Le troisième lien aussi, quelques jours après.

Le tramway du maire Marchand est mis sur la voie d’accotement. Le très sportif maire ferait mieux de s’acheter de nouvelles espadrilles, car il risque de se déplacer, pour encore un bon moment, comme son nom l’indique, en marchant.

Où en sommes-nous ? Le gouvernement Legault reprend en main tout le dossier du transport structurant dans la ville des Ashton. La Caisse de dépôt reçoit le mandat de trouver des options plus économiques que le tramway à 8 milliards. Demander à la Caisse de dépôt de trouver des options plus économiques, c’est comme demander au coach du Canadien de mettre au point un jeu de puissance plus productif. Bonne chance !

Toujours est-il que le premier ministre Legault a déclaré, jeudi, que toutes les possibilités de projets étaient redevenues possibles.

Après ce long détour, comme on a l’habitude d’en faire à Montréal, revenons au point de départ de ma chronique, qui ambitionne d’énumérer toutes les possibilités, justement. Le troisième lien, le tunnel sous le fleuve, ça, on savait. Le tramway, ça, on savait, aussi. Mais ce que l’humain vivant à l’autre bout de la 20 ignorait complètement, c’est qu’on songe à bâtir un métro à Québec. Un métro ! Pas un Maxi, ben oui, Maxi ! Un métro, ben oui, métro ! Un métro roulant sous terre. Un métro, comme à Montréal, New York et Paris.

À défaut d’avoir une équipe de hockey dans la LNH, comme les Montréalais, ce qui peut le plus revivifier les Québécois de Québec, c’est un métro. Finis les complexes ! Bien sûr, faudra creuser avec soin, pour ne pas dynamiter les ossements de Champlain, mais imaginez : prendre le train souterrain, à la station Grande-Allée, et débarquer à la station Lévis, sans recevoir un seul flocon. Y a de quoi voter CAQ pour les 100 prochaines années !

Terminées, les farces des Montréalais sur les calèches de la capitale nationale, le Bonhomme Carnaval va rouler en métro ! In your face, Youppi !

Et puisque le transport collectif est l’avenir de cette planète, pourquoi ne pas prolonger le métro de Québec jusqu’à Montréal, avec des stations à Trois-Rivières, Drummondville et Issoudun ? On ferme les routes de novembre à avril. On épargne des millions en contrats de déneigement et en accidents. Fitzgibbon, fais-nous de l’électricité pour alimenter 233 km de rails surchauffés.

Oubliez le troisième lien, place au premier lien, unissant un peuple en entier. Une nation, un métro ! Même le PQ n’y a pas songé !

Tant qu’à dépenser des sommes faramineuses, aussi bien que le projet en vaille le coup et le coût !

On a déjà hâte à l’inauguration. Vu l’ampleur et la durée des travaux, il risque d’y avoir beaucoup de premiers ministres, dans le premier wagon.