Une entreprise polonaise vient de dévoiler sa version du « train du futur », roulant sans roues et muni d’aimants très puissants grâce auxquels il lévite au-dessus des rails à plus de 500 km∕h. Chez nous, cet exploit permettrait de parcourir le trajet entre Montréal et Vancouver en huit heures. Mais ce n’est pas pour demain.

Après 70 km/h, on lévite

Des essais réalisés ces derniers mois à Nowa Sarzyna, dans le sud-est de la Pologne, ont en effet confirmé mardi que le dispositif de Nevomo, baptisé « MagRail », peut faire léviter des trains sur des voies ferrées traditionnelles. Sur une voie d’essai d’environ 720 m, les véhicules de 2 tonnes et 6 m de long ont commencé à léviter après avoir dépassé les 70 km/h et atteint une vitesse maximale de 135 km/h. Les concepteurs estiment toutefois que sur une plus longue distance, la vitesse maximale pourrait friser les 550 km/h. Aller de Montréal jusqu’à Vancouver, un trajet de presque 4600 km, prendrait donc un peu plus de 8 heures et 20 minutes.

Comment ça marche ?

La technologie du « MagLev », pour magnetic levitation, consiste essentiellement à retirer les roues des trains, mettant ainsi fin au frottement avec les rails qui se traduit souvent par une perte d’énergie des équipements ferroviaires. On remplace ensuite ces roues sur la voie par des aimants « supraconducteurs », aussi appelés électro-aimants, ce qui fait ultimement léviter le train d’environ une centaine de millimètres. Cela permet au train d’aller beaucoup plus vite que sur des rails, en plus de réduire les nuisances associées au bruit, notamment.

Sur des rails existants

C’est l’un de ses principaux avantages : contrairement à des projets comme l’ambitieux Hyperloop d’Elon Musk, le projet de Nevomo ne construit pas de nouvelles structures pour faire léviter son train. Il s’adapte plutôt aux rails déjà en place en les survolant à l’aide d’un puissant champ magnétique, ce qui permet de dégager des économies substantielles. « On ne réinvente pas la route, on améliore un système qui a fait ses preuves depuis des siècles », a soutenu le PDG de Nevomo, Przemek « Ben » Paczek. Il soutient que le coût approximatif par kilomètre du « MagRail » est d’environ 9 à 10 millions d’euros, soit de 13 à 15 millions de dollars canadiens.

ILLUSTRATION FOURNIE PAR NEVOMO

Schéma du prototype présenté mardi

Un accord en France

Nevomo poursuit l’ambition de commercialiser la première version de MagRail pour le transport de marchandises en 2024. En France, un accord a été signé en mars avec la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) pour examiner les bénéfices qu’aurait le MagRail sur le réseau ferroviaire déjà en place. Le directeur de l’innovation de la SNCF, Luc Laroche, avait soutenu à ce moment que cela pourrait être une option pour « augmenter les performances des trains de marchandises » ou encore hausser la capacité « sur les lignes de passagers urbaines congestionnées ». Des discussions ont aussi lieu avec GATX, un fournisseur de wagons dont l’antenne canadienne est établie à Montréal. D’autres échanges sont aussi en cours en Italie, avec la société ferroviaire Rete Ferroviaria Italiana. Selon M. Paczek, l’Amérique du Nord deviendra potentiellement un marché, mais dans un second temps, probablement après l’Europe.

Au sommet, la Chine et le Japon

Le marché européen n’est pas le seul à s’intéresser à la technologie du MagLev. En fait, partout dans le monde, on s’y attarde, mais pour l’instant, ce sont surtout la Chine et le Japon qui font des progrès significatifs en la matière. À la fin de 2020, la Chine avait aussi dévoilé un projet de ce genre, avec une vitesse moyenne de 620 km/h et maximale de 800 km/h. Dans un monde idéal, on vise pour l’instant 2027 pour livrer ce nouveau système. La Chine dispose également déjà d’un MagLev reliant le centre de Shanghai et un de ses aéroports qui peut aller jusqu’à environ 430 km/h. Le Japon, de son côté, avait également déjà établi un record mondial il y a huit ans, en 2015, en faisant rouler un prototype de train magnétique à 600 km/h.