(Ottawa) La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a fermé tous les postes de police chinois qui avaient été établis sans tambour ni trompette au Québec, en Ontario et en Colombie-Britannique au cours des dernières années, affirme le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino.

Appelé à comparaître devant un comité parlementaire qui se penche sur l’ingérence étrangère dans les élections fédérales, le ministre Mendicino a indiqué que les forces policières avaient mis fin aux opérations de ces établissements clandestins qui se seraient livrés à des manœuvres d’intimidation auprès des membres la diaspora chinoise au Canada et qui auraient des liens avec le régime du Parti communiste chinois.

PHOTO ADRIAN WYLD, LA PRESSE CANADIENNE

Le ministre fédéral de la Sécurité publique, Marco Mendicino

Malgré les questions insistantes des députés conservateurs du comité, le ministre a refusé de dire si des accusations avaient été portées relativement à cette affaire et si le gouvernement canadien avait expulsé des diplomates chinois en poste au Canada en représailles.

« La GRC a pris des mesures décisives pour fermer ces soi-disant postes de police », a affirmé le ministre Marco Mendicino, qui a été talonné sur cette question par les élus conservateurs.

Le bureau du ministre a par la suite confirmé à La Presse que les deux postes de police chinois au Québec qui sont apparus sur le radar de la GRC récemment avaient aussi été fermés.

Les deux établissements en question identifiés par la GRC auraient installé leurs pénates dans le Centre Sino-Québec de la Rive-Sud, à Brossard, et dans le Service à la famille chinoise du Grand Montréal.

Ces deux établissements ne faisaient pas partie de la liste des « postes de police » chinois en territoire étranger affiliés à des organisations policières en Chine, établie par l’ONG espagnole Safeguard Defenders en traduisant des publications officielles chinoises. La GRC avait précédemment confirmé cinq établissements en Ontario et dans l’Ouest canadien après la publication de son rapport.

« Intégration des nouveaux immigrants »

Réagissant aux propos du ministre Marco Mendicino, May Chiu, qui est coordonnatrice de la Table ronde du Quartier chinois à Montréal, a soutenu que les deux établissements au Québec qui ont fait l’objet d’une enquête de la GRC n’avaient rien à se reprocher et qu’ils étaient maintenant menacés de fermeture. Elle a qualifié le comportement de la GRC « d’irresponsable ».

« Nous avons consacré tant de ressources pour soutenir les deux seuls centres communautaires chinois au Québec. Leur mandat est d’aider à l’intégration des nouveaux immigrants, d’offrir des cours de français, de sortir nos aînés de l’isolement, d’aider les femmes victimes de violence », a dit May Chiu, qui est aussi avocate, dans un courriel à La Presse.

La directrice du Service à la famille chinoise du Grand Montréal, Xixi Li, a affirmé que les deux organisations avaient collaboré à l’enquête et qu’ils n’avaient refusé « aucune demande ». Mais il n’y a eu « aucune suite et aucune autre communication ».

« Depuis le début de cette saga, les organisations ont appelé à la prudence et au respect de leur droit à la présomption d’innocence », a-t-elle dénoncé.

Nous déplorons les préjudices causés par la GRC dans l’identification prématurée de nos organismes, les accusations hâtives par les médias, et les jugements erronés par les gouvernements.

Xixi Li, directrice du Service à la famille chinoise du Grand Montréal

Elle a précisé que les deux établissements continuaient leurs activités malgré la perte de subventions, car ils « n’ont reçu aucune demande de fermeture de la part de la GRC ».

Durant la réunion du comité de la Chambre des communes, le Parti conservateur a vertement critiqué le ministre Marco Mendicino de n’avoir expulsé aucun diplomate chinois à la suite de la découverte des postes de police chinois.

Le député conservateur Michael Cooper a relevé qu’aux États-Unis, le FBI avait accusé deux hommes la semaine dernière d’avoir conspiré pour agir en tant qu’agents de la République populaire de Chine (RPC) en lien avec un poste de police situé dans le quartier chinois de Manhattan. C’était d’ailleurs la première fois que des poursuites pénales étaient engagées en rapport avec un tel poste de police.

« Alors il n’y a pas eu d’arrestation et pas d’accusation. Le FBI a porté des accusations, mais ce n’est pas le cas au Canada au sujet de ces soi-disant postes de police illégaux. Et vous n’avez pas expulsé des diplomates. […] Qu’est-ce qui vous empêche d’agir ? », a lancé M. Cooper, accusant au passage le ministre de la Sécurité publique de faire preuve de « tolérance » envers Pékin.

Au terme de cet interrogatoire serré, Marco Mendicino a répondu qu’il n’écartait aucun scénario. « On va toujours garder toutes les options sur la table et en consultation avec le reste de mes collègues dans le gouvernement, on va prendre l’action qui est nécessaire », a-t-il dit.