Les ménages qui se retrouveront sans logis le 1er juillet devront dorénavant payer une partie de leur hébergement d’urgence s’ils ne trouvent pas un nouvel appartement après deux mois.

Le gouvernement dit vouloir prévenir les abus, mais l’introduction de cette mesure, en pleine crise du logement, fait bondir les groupes de défense des locataires, qui dénoncent le manque d’investissements gouvernementaux dans le logement social et dans la protection des locataires, pour éviter qu’un plus grand nombre de familles se retrouvent à la rue.

« On parle ici d’une aide de dernier recours, pour des gens qui sont désespérés parce qu’ils n’ont pas réussi à trouver un nouvel appartement. Et pendant ce temps, le gouvernement rend plus difficile l’accès à l’aide d’urgence, » s’insurge Véronique Laflamme, porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU).

Chaque année, quelques centaines de ménages québécois qui n’ont pas trouvé de nouveau logement, en majorité autour du 1er juillet, reçoivent l’aide de leur municipalité pour être logés temporairement, surtout dans des motels, en attendant de dénicher un toit. La facture est remboursée par Québec.

Par exemple, à Montréal, 136 ménages ont eu recours à l’hébergement d’urgence en 2022, généralement pour quelques semaines. Mais pour certains, trouver un logement peut prendre plus de temps.

Après deux mois, les ménages hébergés devront verser une contribution financière. Ceux qui sont sur une liste d’attente pour obtenir un logement à loyer modique devront payer la moitié du loyer médian d’un studio dans leur région, et les autres devront payer l’équivalent de ce loyer médian. Par exemple, le loyer médian d’un studio à Montréal est de 725 $.

Refus d’un logement

De plus, « si un ménage refuse la location d’un logement qui correspond à ses choix d’emplacement dans la municipalité concernée », il devra alors payer le coût total de l’hébergement d’urgence, indique le nouveau Programme d’hébergement temporaire et d’aide à la recherche de logement (PHTARL), publié mercredi dans la Gazette officielle du Québec.

Le but de ce changement ? « Dans les années passées, nous avons pu constater des abus de la part de certaines personnes qui n’acceptaient pas les logements trouvés et qui préféraient demeurer à l’hôtel aux frais du gouvernement. L’aide d’urgence doit servir en premier lieu pour soutenir les gens pendant qu’ils sont à la recherche d’un logement, » répond Philippe Couture, attaché de presse de la ministre de l’Habitation, France-Élaine Duranceau. « Cette clause a été introduite afin d’éviter les abus et non pas pour pénaliser les gens qui sont à la recherche d’un toit. »

En 2022, 79 ménages ont bénéficié de l’hébergement d’urgence pendant plus de 60 jours, selon les données de l’Office municipal d’habitation de Montréal.

Véronique Laflamme déplore la logique gouvernementale à ce sujet. « La plupart des gens veulent trouver un appartement au plus vite, mais il faut en moyenne cinq ans avant d’obtenir une place dans un HLM, » rappelle-t-elle. De plus, certains logements disponibles peuvent être insalubres ou trop chers.

Elle souligne aussi que les personnes qui quittent volontairement leur logement, mais qui ensuite n’en trouvent pas un nouveau, ne sont pas admissibles à l’hébergement d’urgence. « Mais ça peut être des gens qui ont cédé à la pression d’un propriétaire, qui n’ont plus les moyens de payer leur loyer ou dont l’appartement est devenu trop petit pour la famille, » dit-elle.

« C’est absurde parce que le gouvernement introduit cela dans un contexte où il ne travaille pas en amont pour éviter les évictions de locataires, ni pour grossir le parc de logements sociaux. »

En savoir plus
  • 1,7 %
    Taux d’inoccupation des logements locatifs pour l’ensemble des centres de 10 000 habitants et plus au Québec à l’automne 2022, ce qui est le plus bas taux depuis 2010
    SOURCE : Institut de la statisitique du Québec