Au cours des deux dernières années, plus de 250 000 enfants migrants sont arrivés seuls aux États-Unis. Des milliers d’enfants se sont retrouvés dans des emplois pénibles dans tout le pays. L’administration Biden a ignoré – ou raté – les signes de la croissance explosive de cette main-d’œuvre, a constaté le New York Times.

Des signes répétés ignorés

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Antonio Diaz Mendez, 14 ans, vit à Florida City, en Floride, loin de sa famille au Guatemala. Il travaille de longues heures dans un entrepôt frigorifique et il affirme qu’il n’a pas vu son répondant depuis des mois.

Au printemps 2021, Linda Brandmiller travaillait dans un aréna de San Antonio transformé en centre d’hébergement d’urgence pour les enfants migrants. Des milliers de garçons dormaient sur des lits de camp alors que l’administration Biden était aux prises avec un nombre record de mineurs entrant aux États-Unis sans leurs parents.

Le travail de Mme Brandmiller consistait à aider à contrôler les parrainages et elle avait été formée à la recherche de trafics potentiels. Dès la première semaine, deux cas lui ont sauté aux yeux : un homme lui a dit qu’il parrainait trois garçons pour les employer dans son entreprise de construction. Un autre, qui vivait en Floride, essayait de parrainer deux enfants qui devraient travailler pour amortir le coût de leur transport vers le Nord.

Elle a immédiatement contacté des superviseurs travaillant avec le département de la Santé et des Services sociaux, l’agence fédérale responsable de ces enfants. « C’est urgent », écrit-elle dans un courriel consulté par le New York Times.

Mais quelques jours plus tard, elle a remarqué que l’un des enfants allait être remis à l’homme en Floride. Elle a écrit un autre courriel, demandant cette fois à un superviseur « une attention immédiate » et ajoutant que le gouvernement avait déjà envoyé un garçon de 14 ans au même répondant.

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Au cours des deux dernières années, plus de 250 000 enfants migrants sont arrivés seuls aux États-Unis.

Mme Brandmiller a également envoyé un courriel au directeur du refuge. Quelques jours plus tard, l’accès au bâtiment lui a été retiré pendant sa pause de midi. Elle affirme n’avoir jamais été informée des raisons de son licenciement.

Au cours des deux dernières années, plus de 250 000 enfants migrants sont arrivés seuls aux États-Unis. Des milliers d’enfants se sont retrouvés dans des emplois pénibles dans tout le pays – travailler la nuit dans des abattoirs, remplacer des toits, faire fonctionner des machines dans des usines –, le tout en violation des lois sur le travail des enfants, comme l’a montré une récente enquête du Times. Après la publication de l’article en février, la Maison-Blanche a annoncé des changements de politique et une répression des entreprises qui embauchent des enfants.

Mais depuis le début, il y avait des signes de la croissance explosive de cette main-d’œuvre et des avertissements que l’administration Biden a ignorés ou manqués, a constaté le Times.

À maintes reprises, des fonctionnaires chevronnés et des sous-traitants ont signalé au ministère de la Santé et des Services sociaux, y compris dans des rapports parvenus au secrétaire d’État Xavier Becerra, que des enfants semblaient être en danger. Le ministère du Travail a publié des communiqués de presse faisant état d’une augmentation du travail des enfants. De hauts responsables de la Maison-Blanche ont reçu des preuves d’exploitation, telles que des groupes d’enfants migrants travaillant avec des équipements industriels ou des produits chimiques caustiques.

Alors que l’administration s’efforçait de vider les centres d’hébergement dont la capacité était dépassée, les enfants ont été relâchés avec peu de soutien auprès de parrains qui s’attendaient à ce qu’ils acceptent des emplois éreintants et dangereux.

Dans les interviews accordées au Times, les responsables ont exprimé leur inquiétude pour les enfants migrants, mais ont rejeté la responsabilité de l’échec de leur protection.

Les responsables du ministère de la Santé ont déclaré que le Département contrôlait suffisamment les parrainages, mais qu’il ne pouvait pas contrôler ce qui arrivait aux enfants après leur libération. Le contrôle des lieux de travail relève, selon eux, de la compétence du ministère du Travail.

Les responsables du ministère du Travail ont déclaré que les inspecteurs s’étaient davantage concentrés sur le travail des enfants et qu’ils partageaient des informations sur les travailleurs avec la Santé, mais ils ont précisé qu’il ne s’agissait pas d’une agence d’aide sociale.

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Le pasteur Abel Gomez, à gauche, en compagnie d’Antonio Diaz Mendez à Homestead, en Floride. « Ce que je souhaite le plus est qu’il puisse retourner aux études », affirme-t-il.

Les responsables de la Maison-Blanche ont déclaré que si les deux ministères avaient transmis des informations sur le travail des enfants migrants, les rapports n’étaient pas considérés comme urgents et n’indiquaient pas clairement l’ampleur du problème. Robyn M. Patterson, porte-parole de la Maison-Blanche, a déclaré dans un communiqué que l’administration renforçait désormais la surveillance des employeurs et réexaminait son contrôle des parrainages.

« Il est inacceptable que des entreprises aient recours au travail des enfants, et cette administration continuera à travailler pour renforcer le système permettant d’enquêter sur ces violations et obliger les contrevenants à rendre compte de leurs actes », peut-on lire dans le communiqué.

La Maison-Blanche a toutefois refusé de commenter les raisons pour lesquelles l’administration n’avait pas réagi auparavant aux signes répétés indiquant que les enfants migrants étaient largement exploités.

« Si je l’avais vu, ils auraient pu faire le rapprochement », a déclaré Mme Brandmiller, qui est également avocate spécialisée en droit de l’immigration. « Il y avait tant d’occasions de faire le lien entre ces éléments. » Un porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux a déclaré que l’agence n’avait aucune trace des préoccupations de Mme Brandmiller. La société qui gérait le centre d’hébergement d’urgence a refusé tout commentaire.

Mme Brandmiller a déclaré qu’elle s’inquiétait toujours pour le garçon de 14 ans, Antonio Diaz Mendez.

Antonio vit à Florida City, en Floride, loin de sa famille au Guatemala. Lors d’un entretien l’été dernier, il était assis sous le porche moisi d’une maison bondée d’autres enfants migrants. Il a expliqué qu’il travaillait de longues heures dans un entrepôt frigorifique, emballant des légumes pour les distribuer dans tout le pays, et qu’il n’avait pas vu son répondant depuis des mois.

Sa grand-mère lui manquait et il passait parfois des jours sans parler à personne. Il voulait aller à l’école, mais se sentait pris au piège parce qu’il devait gagner de l’argent pour rembourser ses dettes, subvenir à ses besoins et aider ses frères et sœurs.

Selon lui, personne n’est jamais venu prendre de ses nouvelles.

14 ans

Antonio Diaz Mendez est arrivé à la frontière peu après ses 14 ans et a passé plusieurs semaines dans un centre d’accueil avant de s’installer en Floride.

Source : The New York Times

« C’est de la foutaise »

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Ces trois jeunes migrants guatémaltèques parrainés par le même homme travaillent à temps plein dans son entreprise de construction à Homestead, en Floride.

Peu après l’entrée en fonction du président Joe Biden, le nombre croissant d’enfants migrants a suscité des tensions entre la nouvelle administration et des fonctionnaires de longue date.

Le président avait promis de respecter une loi de 2008 contre la traite des êtres humains, qui oblige le gouvernement fédéral à accepter les enfants voyageant seuls à partir de la plupart des pays et leur permet de rester aux États-Unis pendant le processus de demande de statut légal, qui dure des années.

Mais la loi n’avait pas prévu qu’une pandémie ravagerait les économies des pays d’Amérique centrale. Les parents, de plus en plus pauvres, ont commencé à envoyer leurs enfants aux États-Unis pour gagner de l’argent, dans le cadre d’un phénomène que certains défenseurs de l’immigration qualifient de « séparation familiale volontaire ».

En 2021, alors que les images d’enfants dormant sous des couvertures de survie dans des centres de débordement dominaient l’actualité, Susan E. Rice, responsable de la politique intérieure de la Maison-Blanche, a fait part de sa frustration à des membres de son personnel, selon cinq personnes qui ont travaillé avec elle. Mme Rice s’est exprimée dans une note qu’elle a griffonnée sur un mémo détaillant la position des défenseurs des droits de la personne, qui estimaient qu’une fermeture de la frontière datant de l’époque de la pandémie obligeait les parents à envoyer leurs enfants non accompagnés, parfois appelés « UC » (Unaccompanied Children).

« C’est de la foutaise », a écrit Mme Rice, selon une copie de la note examinée par le Times. « Ce qui conduit à la séparation “volontaire”, c’est notre générosité à l’égard des enfants non accompagnés ! »

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Susan E. Rice, responsable de la politique intérieure
de la Maison-Blanche

Dans une déclaration, Robyn M. Patterson, porte-parole de la Maison-Blanche, a affirmé que toute suggestion selon laquelle Mme Rice se serait sentie contrainte par les exigences de la loi était fausse et qu’elle était « fière de faire ce qu’il faut et de traiter les enfants avec dignité et respect ».

En vertu de la loi, le ministère de la Santé et des Services sociaux est chargé de contrôler les parrainages afin de s’assurer qu’ils garantissent le bien-être des enfants et les protègent de la traite ou de l’exploitation.

Mais à mesure que les refuges se remplissaient d’enfants, le Ministère a commencé à assouplir certaines restrictions en matière de contrôle et à inciter les responsables de dossiers à accélérer le processus.

Des membres du personnel de longue date du ministère de la Santé se sont plaints que ces changements mettaient les enfants en danger. Les collaborateurs de la Maison-Blanche et les fonctionnaires de l’administration se sont montrés exaspérés, estimant que ces travailleurs s’accrochaient à des protocoles qui maintenaient les enfants dans des centres d’hébergement alors qu’il était préférable pour eux d’être dans un foyer avec un adulte.

« C’était exaspérant », a déclaré Vivian Graubard, une conseillère de la Maison-Blanche qui a travaillé avec Mme Rice sur les questions relatives aux enfants migrants.

Au moins cinq membres du personnel du ministère de la Santé ont déposé des plaintes et ont déclaré avoir été poussés vers la sortie après avoir soulevé des questions sur la sécurité des enfants.

Jallyn Sualog était la plus ancienne membre de la division du ministère de la Santé chargée des enfants migrants non accompagnés lorsque M. Biden a pris ses fonctions. Elle avait participé à la mise en place du programme après l’adoption de la loi de 2008 et, en tant que démocrate de toujours, elle s’était réjouie de la victoire de M. Biden.

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Jallyn Sualog

Mais rapidement, elle a commencé à entendre des informations selon lesquelles les enfants étaient remis à des adultes qui avaient menti sur leur identité ou qui prévoyaient de les exploiter.

Dans un courriel datant de 2021, elle avertit ses supérieurs : « Si rien n’est fait, il y aura un évènement catastrophique. » Elle a continué à envoyer des courriels sur des situations qu’elle a décrites comme étant « critiques » et « mettant les enfants en danger ».

Craignant que personne ne l’écoute, Mme Sualog a déposé une plainte à l’automne 2021 auprès du Bureau de l’inspecteur général du ministère de la Santé et des Services sociaux, l’organe de surveillance interne de l’agence, et a demandé à bénéficier de la protection des dénonciateurs. Elle a également pris la décision inhabituelle de parler de ses inquiétudes à des membres du personnel du Congrès.

« J’ai l’impression qu’à défaut de manifester dans les rues, j’ai fait tout ce que j’ai pu pour les avertir », a déclaré Mme Sualog à propos de l’administration. « Ils n’ont tout simplement rien voulu entendre. »

Fin 2021, elle a été démise de ses fonctions. Elle a déposé une plainte auprès du bureau fédéral chargé de faire respecter les règles de protection des dénonciateurs, arguant qu’elle avait fait l’objet de représailles illégales.

À l’automne dernier, le bureau de l’inspecteur général a publié un rapport sur le cas de Mme Sualog et sur plusieurs rétrogradations et licenciements au sein de l’agence qui « pourraient avoir atteint le niveau de la répression des dénonciations ».

Mme Sualog a conclu un accord avec l’agence, qui a accepté de payer ses frais de justice, et a démissionné le mois dernier.

Un porte-parole du ministère de la Santé a refusé de commenter la plainte de Mme Sualog, mais a déclaré que l’agence ne prenait pas de mesures de rétorsion à l’encontre des dénonciateurs. Bien que certains membres du personnel soient en désaccord avec l’approche de l’administration, le porte-parole a déclaré que des changements significatifs étaient nécessaires pour faire face à l’augmentation du nombre d’enfants migrants non accompagnés.

Même si des employés chevronnés sont partis, d’autres ont continué à tirer la sonnette d’alarme. En janvier, peu avant la publication de l’enquête du Times, des employés ont envoyé une autre note à leurs patrons du ministère de la Santé, affirmant que le système avait entraîné des rejets dangereux. « Nous retirons l’humanité de la santé et des services sociaux », ont-ils écrit.

Des tendances inquiétantes

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Des centaines de jeunes migrants comme ce garçon ont été libérés dans la région de Little Village, à Chicago, soulevant l’inquiétude des travailleurs sociaux.

Certains des avertissements les plus persistants sur le fait que des enfants étaient dirigés vers des emplois dangereux provenaient de l’extérieur du gouvernement. Le ministère de la Santé remet la plupart des enfants à leurs parrains sans suivi, mais il engage des organisations pour fournir à des milliers d’enfants à haut risque des services de soutien pendant plusieurs mois.

Au printemps dernier, Matt Haygood, directeur principal des services à l’enfance du Comité américain pour les réfugiés et les immigrés, l’une des plus importantes de ces organisations, a envoyé à plusieurs responsables du Ministère un courriel dont l’objet était « Trafficking Concerns » (problèmes de traite des êtres humains).

« Nous avons vu des tendances inquiétantes dans la région métropolitaine de Chicago », écrit-il, notamment des camionnettes qui viennent chercher des enfants à des heures indues, ce qui laisse penser qu’ils sont conduits à des emplois en usine. M. Haygood a demandé si le Ministère envisageait d’ajouter le quartier à une liste de surveillance, afin que les parrains potentiels y soient contrôlés de plus près.

Un membre du personnel du Ministère a répondu que plus de 200 enfants, pour la plupart guatémaltèques, avaient récemment été remis en liberté dans le quartier et a confirmé que beaucoup de ces cas avaient été marqués comme suspects : des adultes parrainaient plusieurs enfants et des mineurs travaillaient au lieu d’aller à l’école.

« Il y a certainement beaucoup d’autres signaux d’alarme concernant le trafic d’êtres humains », a écrit le membre du personnel. Mme Haygood s’attendait à ce que l’agence ajoute des garanties supplémentaires pour les enfants libérés dans la région de Little Village. Au lieu de cela, le Ministère a décidé qu’elles n’étaient pas nécessaires.

En réponse au Times, un porte-parole du ministère de la Santé a déclaré que le département avait déjà mis en place des protections pour les enfants remis en liberté dans quelques rues de la ville et qu’à l’époque, il considérait que l’élargissement de ces mesures était exagéré.

D’autres organisations de services sociaux ont déclaré qu’elles avaient elles aussi repéré des groupes de cas suspects, notamment à Nashville, au Tennessee, et à Dallas, au Texas.

« Nous attendons l’audition du Congrès qui se demandera comment tous ces enfants ont pu en arriver là », a déclaré M. Haygood. Au cours des deux derniers mois, les leaders des deux partis au Congrès se sont interrogés sur les raisons pour lesquelles tant d’enfants migrants se retrouvaient dans des emplois où ils étaient exploités et deux audiences de contrôle sont prévues à la Chambre des représentants mardi.

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Dans la région métropolitaine de Chicago, on voit des camionnettes qui viennent chercher des enfants à des heures indues, ce qui laisse penser qu’ils sont conduits à des emplois en usine.

Un porte-parole du ministère de la Santé a déclaré que le Ministère était conscient que certains enfants migrants travaillaient de longues heures parce qu’ils étaient soumis à une forte pression pour gagner de l’argent, mais la responsabilité légale de l’agence à l’égard des enfants s’arrête une fois qu’ils sont libérés. Néanmoins, le Ministère s’efforce de fournir quelques mois de gestion de cas à tous les enfants migrants non accompagnés, a-t-elle déclaré.

Pour l’instant, la plupart des enfants confiés à des parrains ne bénéficient que d’un soutien limité, à l’exception d’une ligne d’assistance téléphonique du ministère de la Santé.

Selon des documents internes obtenus par le Times, les cas de traite signalés à cette ligne d’assistance ont augmenté d’environ 1300 % au cours des cinq dernières années.

Dans un appel fait l’année dernière, un enfant vivant à Charlotte, en Caroline du Nord, a déclaré que son parrain lui avait trouvé un emploi dans un restaurant et lui avait dit « qu’il devait travailler pour manger ». Dans un autre appel, un enfant a déclaré que son parrain ne l’avait jamais inscrit à l’école après sa sortie d’un refuge d’El Paso, au Texas, et qu’il l’obligeait à payer son loyer et sa nourriture.

Le porte-parole du Ministère a déclaré que l’agence demandait aux forces de l’ordre locales de vérifier lorsque des enfants étaient susceptibles d’être en danger.

Signes avant-coureurs

Susan E. Rice, responsable de la politique intérieure de la Maison-Blanche, était au cœur de la crise des enfants migrants. Alors qu’elle faisait pression pour que les enfants quittent plus rapidement les refuges, des indices ont commencé à apparaître sur ce qui leur arrivait une fois qu’ils étaient partis.

Au cours de l’été 2021, au plus fort de l’afflux à la frontière, des responsables du ministère de la Santé ont rédigé une note de service faisant état de leur inquiétude face à la multiplication des rapports indiquant que des enfants travaillaient aux côtés de leurs parrains, signe d’un possible trafic de main-d’œuvre. Cette note est parvenue à Mme Rice et à son équipe.

À peu près au même moment, l’équipe a été informée des inquiétudes suscitées par un groupe important d’enfants qui avaient été remis en liberté dans une ville de l’Alabama, selon six membres actuels et anciens du personnel. La situation a fait l’objet de fréquentes mises à jour, le Ministère envoyant des gestionnaires de cas dans la ville pour vérifier l’état de santé des enfants et se coordonnant avec le ministère du Travail et les services d’enquête de la sécurité intérieure pour vérifier s’ils travaillaient dans des usines de volaille.

Un ancien haut conseiller de la Maison-Blanche s’est souvenu d’avoir pensé à l’époque que cette évolution était inquiétante et qu’elle laissait supposer que d’autres cas pouvaient être négligés.

Un porte-parole de la Maison-Blanche a nié que des hauts fonctionnaires aient été informés de la situation.

Quelques mois plus tard, selon un ancien haut fonctionnaire de la Maison-Blanche, les services de Mme Rice ont appris que le ministère de la Santé n’était pas en mesure d’atteindre un nombre croissant d’enfants migrants un mois seulement après leur libération.

Mais la Maison-Blanche a largement traité ces évènements comme des cas isolés, et non comme les signes d’un problème croissant.

Tyler Moran, conseillère principale de M. Biden pour les migrations à l’époque, a déclaré qu’elle s’en remettait au Ministère pour savoir comment évaluer les informations, telles que la note des responsables inquiets du Département et les appels aux enfants qui restaient sans réponse. Les membres du personnel, dit-elle, n’avaient pas mis en évidence une crise plus large du travail des enfants. « La Maison-Blanche s’en remettait aux agences pour nous faire savoir quand il y avait vraiment un problème », a déclaré Mme Moran.

Le ministère du Travail envoyait lui aussi des signaux. En 2022, les enquêteurs ont commencé à découvrir des signes de travail d’enfants migrants sur des lieux de travail industriels, notamment dans plusieurs usines de pièces détachées automobiles du Sud. Le Ministère a publié des communiqués de presse avertissant d’une augmentation des infractions liées au travail des enfants.

L’été dernier, les enquêteurs du travail ont lancé une vaste opération dans une entreprise d’assainissement qui a fini par découvrir que plus de 100 enfants, pour la plupart hispanophones, travaillaient la nuit dans des usines de conditionnement de la viande dans tout le pays.

Bon nombre de ces enfants étaient passés par le système des foyers pour migrants et avaient été confiés à des parrains.

Alors que les enquêteurs découvraient de plus en plus d’enfants migrants travaillant pour l’entreprise de nettoyage dans tout le pays, le ministère de la Santé et des Services sociaux a régulièrement informé l’équipe de Mme Rice de la situation pendant plusieurs mois, selon deux personnes au fait de ces conversations.

Le ministère du Travail a également inclus des détails sur l’entreprise de nettoyage et les opérations de pièces automobiles dans des rapports hebdomadaires au niveau du cabinet. C’était du genre : « Nous avons des problèmes ici », a déclaré Martin J. Walsh, secrétaire d’État au Travail jusqu’au mois dernier. « Nous envoyions des rapports à la Maison-Blanche, afin qu’elle sache que nous travaillions sur ces questions. »

Lorsque le département du Travail a mis à jour son tableau de bord public en décembre, il a montré une augmentation de 69 % des violations du travail des enfants depuis 2018.

Un porte-parole du département du Travail a déclaré que la Maison-Blanche était au courant de l’augmentation du travail des enfants parce qu’elle était largement publique. Mais Andrew J. Bates, secrétaire de presse adjoint de la Maison-Blanche, a déclaré que les fonctionnaires n’étaient pas au courant de l’augmentation du travail des enfants avant le rapport de février du Times.

Cet article a été publié à l’origine dans le New York Times

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