Douze résidants d’un immeuble d’habitation de Verdun qui ont simultanément reçu un avis d’éviction à quelques jours de Noël sont peut-être victimes de « rénoviction », dénonce la députée de Verdun, qui invite le Tribunal administratif du logement (TAL) à enquêter.

Alejandra Zaga Mendez, députée provinciale de Verdun et élue de Québec solidaire, note que les locataires de l’immeuble situé au 1005, rue Rielle à Verdun ont reçu un avis d’éviction le 16 décembre dernier.

Le nouveau propriétaire de l’endroit, Randall Ettinger, y dit qu’il veut « agrandir substantiellement » les logements et leur donne jusqu’au 1er juillet prochain pour quitter les lieux, a indiqué Mme Zaga Mendez.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

« J’ai fait du porte-à-porte, j’ai rencontré les gens. J’ai vu des personnes vulnérables, des personnes âgées, des gens qui, si rien n’est fait, pourraient se retrouver sans logement d’ici le mois de juillet parce que les prix des loyers sont exorbitants à Verdun », a-t-elle dit.

Le propriétaire dit vouloir effectuer des travaux d’agrandissement des logements, mais il a mis l’immeuble à vendre à l’automne sur l’internet, note-t-elle, alors qu’il l’a acheté il y a moins d’un an.

L’immeuble est à vendre pour 8,8 millions de dollars. Alors il n’y a rien qui nous assure que les rénovations qui sont annoncées – la raison pour les évictions – vont avoir lieu.

Alejandra Zaga Mendez, députée de Québec solidaire

En 2018, M. Ettinger avait aussi été accusé par des locataires d’un autre immeuble situé dans la même rue d’avoir usé de tactiques d’intimidation pour les amener à quitter leur logement.

Sur les 36 logements de l’immeuble de la rue Rielle, environ 20 sont vacants, les gens ayant accepté de partir en échange d’une petite somme d’argent. Les locataires qui restent déplorent la mise en place de tactiques qui, disent-ils, s’apparentent à de l’intimidation.

Roger Grenier, 69 ans, qui habite l’immeuble depuis cinq ans, soutient que le nouveau propriétaire a bloqué sans explication l’accès aux casiers dans le sous-sol et interdit aux locataires de déposer leurs déchets dans l’endroit auparavant prévu à cet effet dans le garage intérieur : ils doivent aller les déposer eux-mêmes dans la rue.

« Il y a des gens âgés, malades, qui ne sont pas en forme, et c’est difficile pour eux de faire ça, dit M. Grenier. Aussi, pour accéder à nos casiers, il faut demander la clé au nouveau concierge, mais quand il n’est pas là, on ne peut pas y aller. »

Malade, il dit craindre de finir « à la rue » s’il doit quitter son logement.

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J’ai un budget de 1200 $ par mois et mon loyer me coûte presque 800 $ par mois. Avec le reste, je dois payer l’Hydro, le téléphone, je dois manger… Faites le calcul, ça ne fait pas beaucoup. Les autres loyers que je vois sur l’internet commencent à 1000 $ par mois.

Roger Grenier, résidant de l’immeuble

Alejandra Zaga Mendez invite le TAL à défendre les droits des locataires du 1005, rue Rielle.

« Ce n’est pas à nos locataires de se justifier, c’est au propriétaire qu’incombe le fardeau de justifier ces pratiques », dit-elle.

« Les propriétaires ne se cachent pas »

Lyndsay O’Donnell, intervenante sociale et organisatrice communautaire au Comité d’action des citoyens de Verdun (CACV), a noté que le problème des « rénovictions » était répandu dans l’arrondissement.

« Le 1005, rue Rielle est l’exemple parfait d’une éviction de masse qui perdure à cause de l’inaccessibilité du TAL. Le propriétaire a fait la même chose en 2018 sur la même rue et il n’y a pas eu beaucoup d’intervention. Les propriétaires ne se cachent même pas pour le faire, l’immeuble est déjà à vendre ! Il faut être solidaires avec les gens qui font les frais de cette situation. »

La Presse a tenté de joindre Randall Ettinger, mais n’avait pas reçu de réponse au moment de publier.

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    C’est le nombre de cas de reprise de logements à Montréal en 2020, alors qu’il y en avait eu 1040 en 2021 et 663 en 2020.
    source : Tribunal administratif du logement