(Ottawa) Le premier ministre Justin Trudeau appelle l’Église catholique à assumer la responsabilité de son rôle dans le système des pensionnats autochtones du Canada.

M. Trudeau dit qu’en tant que catholique, il est profondément déçu par la position que l’Église a prise maintenant et au cours des dernières années.

Il note qu’il a personnellement demandé au pape en 2017 d’envisager de présenter des excuses pour le rôle de l’institution qui a géré les pensionnats pour enfants autochtones parrainés par le gouvernement fédéral ; des pensionnats qui ont existé pendant plus de 120 ans.

La Première Nation Tk’emlups te Secwepemc a annoncé la semaine dernière qu’un radar à pénétration de sol avait localisé ce que l’on croit être les sépultures anonymes de 215 enfants sur le terrain d’un ancien pensionnat, à Kamloops, en Colombie-Britannique.

La nouvelle a suscité l’indignation et le chagrin à l’échelle nationale, et a conduit à des appels croissants pour que le gouvernement fédéral facilite les enquêtes sur d’autres emplacements potentiels de sépultures semblables.

Vendredi, M. Trudeau a choisi de braquer l’éclairage sur l’Église catholique.

« Je demande qu’en plus de la pression que le gouvernement va continuer à mettre sur l’Église et toutes les institutions (pour qu’elles reconnaissent) leur rôle, je demande aux catholiques à travers le pays de parler à leurs prêtres, de parler à leurs évêques, de passer le message qu’il est temps que l’Église catholique reconnaisse sa responsabilité, sa part de culpabilité, et surtout qu’elle soit là pour qu’on connaisse la vérité et qu’on permette l’étape de guérison, qui sera essentielle », a réclamé le premier ministre Trudeau au cours d’une conférence de presse à Ottawa, vendredi après-midi.

À une journaliste qui lui faisait remarquer que les Premières Nations demandent depuis des années les documents qui faciliteraient les recherches de sépultures et qui sont en possession des institutions religieuses, M. Trudeau a répondu que oui, son gouvernement pourrait forcer la main à l’Église et obtenir ces documents. Mais…

« Avant que nous commencions à parler de traîner l’Église catholique devant les tribunaux, j’ai espoir que les leaders religieux comprendront qu’ils doivent participer à ceci et non pas s’en cacher », a dit M. Trudeau.

« Au cœur de la foi est l’idée de demander pardon », a-t-il tenu à rappeler.

La Conférence des évêques catholiques du Canada a annoncé en 2018 que le pape ne pouvait pas s’excuser personnellement pour les pensionnats, même s’il n’a pas hésité à reconnaître les injustices auxquelles sont confrontés les peuples autochtones du monde entier.

Et puis le premier ministre Trudeau assure que son appel aux catholiques n’est pas une manière de se défiler au moment où les communautés autochtones reprochent à son gouvernement le peu d’actions concrètes dans ce dossier.

« Ce n’est pas une question de dire “ah non, moi je n’ai rien à faire, c’est l’Église qui doit le faire”. Ce n’est pas du tout ce que j’ai dit », s’est défendu M. Trudeau.

« Nous avons tous du travail à faire et on en a fait en tant que gouvernement », a-t-il insisté, estimant qu’il avait entrepris de répondre à 80 % des appels à l’action réclamés il y a six ans par la Commission de vérité et réconciliation.

Réaction du NPD

Au Nouveau parti démocratique (NPD), la sortie du premier ministre Trudeau contre l’Église catholique a fait sursauter.

« C’est misérable. Les libéraux ne savent plus à quel saint se vouer », s’est moqué le député Alexandre Boulerice dans une déclaration envoyée par courriel.

« Oui, l’Église doit s’excuser, mais ici, les libéraux font tout pour dévier les projecteurs de leur gestion pitoyable de la réconciliation avec les peuples autochtones. […] Ils se traînent les pieds dans ce dossier depuis six ans ; c’est du cynisme à l’état pur », a dénoncé M. Boulerice.