Les retardateurs de flamme bromés, qui se retrouvent dans de nombreux objets du quotidien pour ralentir la propagation des flammes en cas de feu, pourraient entraîner un développement précoce des glandes mammaires associé à un risque plus élevé de cancer du sein.

Une partie des retardateurs de flamme bromés, que l’on retrouve dans les meubles, les appareils électroniques et les articles de cuisine, sont considérés comme des perturbateurs endocriniens, soit des molécules interférant avec les hormones. « Ces objets libèrent dans l’air des molécules qui sont par la suite inhalées par l’humain », indique Isabelle Plante, codirectrice du Centre intersectoriel d’analyse des perturbateurs endocriniens et spécialiste de la toxicologie environnementale.

L’équipe de la professeure Plante de l’Institut national de la recherche scientifique dans la revue Toxicological Sciences a démontré que l’exposition à ces produits chimiques induisait un développement précoce de la glande mammaire, ce qui est un facteur de risque du cancer de sein plus tard dans la vie.

Période cruciale

Afin d’obtenir ces résultats, l’équipe de recherche a exposé des rates avant l’accouplement, pendant la gestation et durant l’allaitement aux molécules de retardateurs de flamme bromés dans leur nourriture, afin de reproduire l’effet de son inhalation chez l’humain. Les biologistes ont noté un développement précoce des glandes mammaires chez les rates prépubères, souligne Mme Plante.

Bien que le développement des glandes mammaires se produise de manière minimale jusqu’à la puberté, les glandes immatures contiennent des récepteurs hormonaux fonctionnels, ce qui les rend particulièrement vulnérables aux effets des perturbateurs endocriniens, comme les retardateurs de flamme bromés.

Chez l’humain, les fœtus, les jeunes enfants, les femmes enceintes et les femmes qui allaitent semblent particulièrement touchés par ces perturbateurs endocriniens, puisque ce sont des périodes cruciales pour le développement des glandes mammaires.

Nouvelle législation

Des législations en matière d’utilisation de retardateurs de flamme bromés ont été adoptées en Amérique du Nord et en Europe vers la fin des années 2000 ; ils ne sont donc plus ajoutés dans les nouveaux objets du quotidien. Malgré cette nouvelle loi, ces molécules sont toujours présentes en grande quantité dans l’environnement.

Mme Plante indique que des études ont démontré que ces molécules se dégradaient très lentement. « Les divans que vous avez achetés il y a 20 ans libèrent encore des retardateurs de flamme bromés », illustre-t-elle. Ces particules sont également relâchées dans les sites d’enfouissement, car énormément d’objets contenant ces produits chimiques s’y retrouvent.

Bien que ces retardateurs de flamme bromés aient désormais été remplacés par d’autres molécules, la spécialiste appelle à la prudence. « Il faut être conscient que ces nouvelles molécules pourraient également présenter des risques. Beaucoup de choses sont mises sur le marché, et il n’y a pas énormément de tests qui ont été faits. » Elle indique que ce sont souvent les chercheurs qui découvrent, des années plus tard, qu’un produit est toxique. « C’est un problème », affirme Mme Plante.