Un regroupement citoyen fustige l’Association des plaisanciers du port de plaisance de Lachine (APPPL) pour sa « mauvaise foi » dans le dossier de la marina, que la Ville de Montréal veut transformer en un nouveau parc sur le lac Saint-Louis pour rendre les berges plus accessibles.

« Nous aussi, on veut danser le tango avec eux, sauf que leurs actions judiciaires démontrent qu’ils sont de mauvaise foi. Ils veulent le statu quo et souhaitent nous empêcher d’avancer collectivement », affirme la co-porte-parole du collectif Réclame ta rive, Vicki Grondin.

Elle fait référence à l’injonction qu’a déposée le mois dernier l’Association des plaisanciers contre la Ville en Cour supérieure. Les propriétaires de bateaux plaident que l’annonce de Montréal est intervenue « au mépris des relations contractuelles existantes », ce qui constitue un « abus de droit vu son délai déraisonnable ». Selon nos informations, un jugement doit être rendu en janvier dans ce dossier.

Pour Mme Grondin, cette attitude est contre-productive. « Ce qu’il faudrait, c’est commencer dès cet hiver à avoir des activités sur le site pour le dynamiser. Mais l’injonction nous bloque », soupire-t-elle. Son organisme croit que le débat doit être recentré sur l’environnement. « S’il faut investir des millions, faisons-le dans un projet qui sera résilient, qui inclura tous les citoyens et non juste 450 plaisanciers dont moins de 50 % sont montréalais, dont le loisir pollue », dit la co-porte-parole.

Tout est à refaire dans cette marina depuis les crues de 2017 et de 2019. On a besoin d’un projet inclusif, il faut permettre une économie nouvelle, en amenant plus de gens de l’extérieur au bord de l’eau.

Vicki Grondin, du collectif Réclame ta rive

Mésentente sur les retombées

Dans un rapport déposé devant la Commission sur les finances et l’administration de la Ville de Montréal, la semaine dernière, l’APPPL a chiffré à 10 millions les retombées annuelles du port de plaisance pour le Québec, dont 5,3 millions pour Montréal et 3,1 millions pour l’arrondissement de Lachine. Chaque bateau rapporterait ainsi 22 500 $ en retombées locales.

Selon Réclame ta rive, ces chiffres sont surévalués. Le collectif cite une étude du consortium Ouranos qui, en 2016, avait plutôt estimé à environ 16 000 $ les retombées locales par bateau. « On nous parle de retombées de 10 millions, moi je vois surtout que l’économie de Lachine stagne depuis 50 ans. Permettez-moi de douter que la marina fait vivre nos commerçants », lâche Vicki Grondin, qui est née à Lachine.

Le cabinet de la mairesse de Lachine, Maja Vodanovic, abonde dans le même sens. « Les chiffres utilisés par [les plaisanciers] n’incluent pas les investissements requis pour le maintien et la mise aux normes des actifs, ni le temps et le salaire des employés de l’arrondissement et de la Ville qui sont affectés au port », a soutenu plus tôt son attaché de presse, Matthieu Lampron.

Vers une consultation publique

Porte-parole des plaisanciers, Josée Côté n’est pas de cet avis. « La contribution économique du port dépasse celle des 452 propriétaires pour inclure les dépenses des 10 000 visiteurs et 1500 familles de touristes en transit », rétorque-t-elle, en ajoutant que l’étude d’Ouranos présente une méthode d’échantillonnage « peu détaillée ». « Nos données et nos estimations sont plus complètes. Nous avons utilisé des données objectives lorsque c’était possible, dont les litres d’essence vendus et le nombre de nuitées des visiteurs », ajoute Mme Côté.

Une marina inclusive et écologique est possible. On souhaite en faire un lieu certifié et intégrer la vision environnementale de la Ville.

Josée Côté, porte-parole de l’Association des plaisanciers du port de plaisance de Lachine

Mme Côté assure que son groupe ne « demande pas de privilège subventionné ». « On propose d’ouvrir le site à tous les citoyens, en maintenant les quais sur l’eau : une solution gagnante pour tous. Nous avons déjà proposé un projet de marina-parc inclusif intégrant la vision environnementale, mais ce projet n’a reçu aucune attention », dit-elle.

La Ville prévoit investir 25 millions pour transformer le port de plaisance. Les travaux s’étaleraient jusqu’en 2025. Montréal chiffre à 16,5 millions la somme qui serait requise pour rénover la marina. Les plaisanciers, eux, arrivent à 5,3 millions. Des consultations publiques doivent avoir lieu le printemps prochain.