Les policiers sont paralysés par la crainte de commettre une erreur et travaillent «sur le break à bras», déplore l'ancien chef de police, Jacques Duchesneau, qui vole du même coup à la défense des deux policiers qui ont tiré, le 9 août, sur le jeune Fredy Villanueva.

«Quand Basil Parasiris a tiré sur un policier lors d'une perquisition, ce que j'ai entendu dans les médias c'est: attendons que l'enquête soit finie. Présomption d'innocence. Ça, il faut que ça aille des deux bords. Dans le cas de Montréal-Nord, on a crucifié des policiers sans même savoir ce qui s'est passé. Je ne voudrais pas être l'enquêteur de la Sûreté du Québec qui fait l'enquête», lance-t-il.

 

«Les policiers ne méritent pas ça. Et je ne les connais pas. Je parle du principe. Pourquoi seraient-ils déjà coupables aux yeux de la population? J'ai entendu des commentaires comme quoi cet incident, c'était une vendetta des policiers. C'est pas comme ça que ça marche dans le vrai monde», souligne Jacques Duchesneau.

«Sauteriez-vous sur un policier qui vous intercepte, vous? Non? Moi non plus. Le policier doit se sentir très mal aujourd'hui parce que je suis sûr qu'il n'a pas voulu le tuer.» Rappelons que le jeune Villanueva se serait, semble-t-il, rué sur l'un des deux policiers impliqués. Les deux agents s'apprêtaient à appréhender son frère Dany. Les deux jeunes se trouvaient dans un parc.

Un syndrome de peur

Le fait que le policier n'ait eu qu'un an d'expérience n'a rien à voir dans cette histoire, estime l'ancien chef de police. «Il y a un policier de deux mois d'ancienneté qui a stoppé la fusillade à Dawson. Là, il est bon. Mais un an et demi d'expérience à Montréal-Nord, là, il n'est pas bon? Moi, je ne comprends pas.»

Cette condamnation sans appel des médias et de la population, lorsque survient un incident tragique, crée un climat malsain pour le travail policier, estime M. Duchesneau. «Les policiers marchent sur le break à bras. Ils vont faire bien attention, lance-t-il. Il y a un syndrome de peur qui s'est installé chez nos policiers: ils ont peur de tout. Peur d'utiliser leur arme. Peur de voir leur photo en première page. Peur d'aller témoigner à la cour.»

Un exemple? Jacques Duchesneau cite celui des poursuites policières, qui ont causé bien des remous ces dernières années. «Les jeunes qui volent des voitures, aujourd'hui, ils savent que si la police te fait signe de te coller, arrête pas, passe sur le premier feu rouge et ils vont abandonner tout de suite. Ça, c'est néfaste pour tout le monde.»