Le fait que deux travailleuses de la santé aient contracté le virus Ebola au Texas, dans un hôpital réputé pour la qualité de ses soins, laisse songeur: si la contagion est possible dans ces conditions, qu'en est-il du voyageur moyen, qui risque de côtoyer, dans l'avion ou à l'aéroport, des sujets atteints?

En effet, à leur retour au Canada, les personnes qui ont séjourné dans les zones à risque passeront nécessairement par des aéroports très fréquentés comme Casablanca (avec Royal Air Maroc), Bruxelles et Munich (Lufthansa), Paris (Air France) ou Amsterdam (KLM, Delta Airlines) puisqu'il n'y a aucun vol direct vers Montréal en provenance des pays d'Afrique subsaharienne.

Le gouvernement du Canada déconseille bien sûr tout voyage non essentiel au Liberia, en Sierra Leone et Guinée-Conakry, tout comme les cliniques spécialisées dans les services aux voyageurs. Mais il y a des cas où le voyage est essentiel ou jugé tel: travailleurs humanitaires - dont on a plus besoin que jamais - ou ressortissants de ces pays qui se rendent dans leur famille éprouvée par le deuil, par exemple.

Les cliniques conseillent à ces personnes la plus grande prudence, évidemment: se laver les mains fréquemment, ne pas consommer de viande de brousse ni manipuler d'animaux morts ou vivants.

Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le virus Ebola se transmet par contact étroit ou direct (lésions ou muqueuses) avec du sang, des sécrétions, des organes ou des liquides biologiques d'animaux ou de personnes infectés ou avec des surfaces et des matériaux qui ont été contaminés.

« La contamination se fait surtout lors de l'administration de soins ou durant la toilette mortuaire d'une personne atteinte, ou encore en manipulant de la viande, explique la Dre Dominique Tessier, directrice médicale du Groupe Santé Voyage. Or, la très grande majorité des voyageurs n'ont pas ces comportements à risque. Ce que nous disons à nos clients qui se rendent là-bas, c'est que si les gens autour d'eux ne sont pas malades, ils n'ont pas à craindre les gestes du quotidien, comme serrer la main ou accepter une assiette. »

La Clinique Santé-Voyage de Montréal donne sensiblement les mêmes conseils à ses clients, selon Linda Forest, directrice des soins infirmiers: « Ne pas consommer n'importe quoi, par exemple du singe; ne pas toucher à un mort ni à des animaux, morts ou vivants; ne pas se faire raser chez le barbier ni recourir aux services d'une manucure. »

C'est donc dire que, en principe, les voyageurs qui observent ces conseils de base risquent peu de contracter le virus et de le répandre dans l'avion ou ailleurs.

Si toutefois un passager a des raisons de croire que son voisin est malade, la Dre Tessier a une solution toute simple: « Il faut en aviser l'agent de bord. Cette personne est formée pour vérifier les symptômes et, le cas échéant, pour prendre les mesures nécessaires afin de protéger les passagers. »

Dans tous les cas, souligne la Dre Tessier, il importe surtout de bien surveiller ses propres symptômes lorsqu'on rentre de voyage et de toujours signaler au personnel médical que l'on a visité une zone à risque.

Un risque calculé

Sarah Crowe, porte-parole de l'UNICEF à New York, est rentrée il y a quelques jours de Monrovia, épicentre de la crise, où elle a passé cinq semaines. Un risque calculé, selon elle: « Là-bas, je me lavais les mains 50 fois par jour. Nous portons des manches longues et des bottes, nous gardons nos distances. Il y a des seaux d'eau chlorée partout, à l'entrée des restaurants et des magasins, dans la rue, pour se laver les mains. Je prenais ma température deux fois par jour - ce que je continue à faire même maintenant. Notre message, c'est qu'on peut travailler sur le terrain si on prend des précautions. Nous avons besoin de gens! Déjà, plusieurs ONG sont parties, et les enfants ne reçoivent plus leur vaccin contre la rougeole... »

L'idée de fermer les frontières du Liberia, de la Sierra Leone et de la Guinée, de plus en plus souvent évoquée dans la communauté internationale, la fait frémir: « Il faut garder les frontières ouvertes, on ne peut pas opérer si tout le monde part... »

Quoi qu'il en soit, la Dre Tessier suggère aux personnes qui doivent partir de s'inscrire aux services consulaires du Canada afin de recevoir des mises à jour par texto sur l'état de la situation.

voyage.gc.ca/voyager/inscription

Les recommandations du gouvernement du Canada

« La capacité du gouvernement du Canada à fournir des services consulaires est extrêmement limitée au Liberia*. Si vous décidez de rester au Liberia ou de vous y rendre malgré cet avertissement, vérifiez votre couverture auprès de votre fournisseur d'assurance-santé. L'accès aux services de soins de santé peut être limité. L'évacuation médicale, si celle-ci devient nécessaire, est difficile à obtenir et peut atteindre les centaines de milliers de dollars, et vous assumerez la responsabilité exclusive de ces frais. Le gouvernement du Canada ne peut pas garantir l'accès aux services d'évacuation médicale. »

*NDLR: Ces recommandations s'appliquent également à la Guinée.

Recommandations pour la Sierra Leone

« L'Agence de la santé publique du Canada recommande que les Canadiens évitent tout voyage non essentiel en Sierra Leone à cause de l'éclosion continue du virus Ebola. Cette recommandation est conçue afin de protéger les voyageurs canadiens et permettre aux intervenants de ces pays d'orienter leurs ressources pour contrôler l'éclosion. Le risque d'infection est faible pour la plupart des voyageurs, mais il peut augmenter pour ceux qui travaillent dans un établissement de santé ou pour les voyageurs qui ont besoin de soins de santé dans une région actuellement affectée, puisque la plupart des infections humaines résultent d'un contact avec les liquides organiques des patients infectés. Les voyageurs peuvent aussi éprouver des difficultés à recevoir des soins d'un système de santé de plus en plus surchargé. »

Les symptômes

> Maux de gorge;

> Fièvre; 

> Frissons;

> Céphalées;

> Douleur et faiblesse musculaire;

> Éruptions cutanées, taches rouges sur la peau (pétéchies);

> Nausées, vomissements et diarrhée; 

> Saignements internes (sang dans les selles) ou externes (gencives, oreilles, nez).

Les symptômes peuvent commencer à se manifester de 2 à 21 jours après l'exposition. La personne atteinte n'est pas contagieuse tant qu'elle n'a pas de symptômes.

Sources: Agence de la santé publique du Canada, Organisation mondiale de la santé