Les villages du Québec se vouent à tous les saints. Mais pas seulement. De Cap-Seize à Quaqtaq, la carte du Québec porte des noms parfois fort originaux et porteurs d'histoires. Voici celles de quelques villages, à la suggestion des lecteurs de La Presse.

Bécancour, Centre-du-Québec

L'origine du nom Bécancour a un côté givré et un côté nature. Le côté givré: une anecdote raconte qu'un couple amérindien descendait la rivière qui se jette à la hauteur de la ville d'aujourd'hui lorsque l'homme, sans crier gare, a embrassé sa partenaire. Enchantée, elle se serait exclamée: «Bec encore!» Le côté nature: Pierre Robineau de Bécancour, grand voyer de la Nouvelle-France de 1689 à 1729, a donné son surnom paternel à une seigneurie qu'il a acquise dans la région.

Cap-Seize, Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine

Le nom de la localité Cap-Seize résulte de la francisation du verbe anglais capsize, qui signifie «chavirer». Pour la petite histoire, le géologue William Logan, dans les années 1840, remontait en canot la rivière Sainte-Anne avec des guides francophones. En chavirant dans les rapides, il s'est écrié: «We capsized!» Les guides ne comprennent pas l'anglais, mais retiennent la prononciation qui finit par coller à un tributaire de la rivière, puis au village érigé vers 1940.

Gaspé, Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine

Une hypothèse s'est imposée pour expliquer le toponyme Gaspé et, par extension, celui de la Gaspésie. Selon celle-ci, les Premières Nations ont baptisé l'endroit gespeg qui, en micmac, signifie «bout, fin, extrémité des terres». Le territoire de Gaspé couvre aujourd'hui 1440 km2 et longe 130 km de littoral. Avec ses falaises qui plongent dans la mer, infinie, on veut bien croire que c'est le bout du monde! Gaspé porte aussi le titre de berceau du Canada: l'explorateur Jacques Cartier a débarqué ici en 1534 et y a planté une croix pour la France.

La Tuque, Mauricie

La Tuque, en Mauricie, a partiellement perdu... sa tuque! Le toponyme original était inspiré d'un énorme rocher, d'abord décrit comme une montagne haute, qui trônait près de la rivière Saint-Maurice. Le rocher, qui servait de repère, rappelait le fameux bonnet de laine québécois. Il a toutefois été dynamité en partie lors de la construction d'une centrale hydroélectrique en 1940. La ville, surnommée Reine de la Haute-Mauricie pour la beauté sauvage de son territoire, n'est pas en reste pour autant!

Macamic, Abitibi-Témiscamingue

Macamic, municipalité forestière et agricole de quelque 2700 résidants, doit son nom au lac près duquel elle se situe. Makamik, en algonquin, se traduit par «castor boiteux» et, en cri, par «lac des merveilles». Il paraît que la forme du lac de 45 km2 rappelle un castor boiteux. À défaut d'y reconnaître ce mammifère rongeur - boiteux ou non -, les amateurs d'activités nautiques apprécient les merveilles du lac.

Quaqtaq, Nord-du-Québec

Le village inuit de Quaqtaq compte 315 habitants. Il est situé sur une péninsule à l'extrémité nord-ouest de la baie d'Ungava. Jusque dans les années 30, on connaissait l'endroit par l'appellation Nuvukutaaq, qui signifie «la longue pointe». Mais, raconte une histoire, un homme venu chasser dans la région aurait trouvé des parasites vivants dans les selles d'un béluga. Résultat? On surnomme l'endroit Quaqtaq, qui signifie... ver intestinal!

Saint-André-du-Lac-Saint-Jean, Saguenay-Lac-Saint-Jean

Ce nom sobre ne passe pas inaperçu si on sait qu'il était jadis Saint-André-de-l'Épouvante. Si la première partie du toponyme rappelle l'un des colons, André Néron, plusieurs théories expliquent la deuxième. À la découverte de l'endroit, à la fin de 1800, les pionniers auraient répandu à l'épouvante le fait que les terres y étaient magnifiques. D'autres auraient répliqué qu'on leur avait causé une épouvante tellement c'était exagéré! Encore, des habitants y auraient eu la réputation de faire galoper leurs chevaux à l'épouvante ou de descendre avec ceux-ci une côte abrupte, calèche à tombeau ouvert. Assez pour affubler les citoyens du surnom... d'épouvantés.

Trois-Rivières, Mauricie

Imposture. Voilà ce qu'a dû penser un ingénieur français lorsqu'il a consigné, dans un manuscrit en 1752, qu'il n'y avait qu'une seule rivière à Trois-Rivières! En fait, la rivière Saint-Maurice a déjà été dénommée «rivière des Trois Rivières», car elle se déverse par trois embouchures dans le fleuve Saint-Laurent. Ce sont des îles qui la divisent ainsi.

Sources: Commission de toponymie du Québec; Association touristique du Nunavik; Ville de Macamic; Municipalité de Saint-André; Une histoire d'appartenance - La Gaspésie, de Jean-Marie Fallu