D'ici 10 à 15 ans, il pourrait être possible de déceler de manière précoce les troubles du déficit de l'attention et d'hyperactivité chez les enfants simplement au fil des visites annuelles chez le médecin de famille. Des chercheurs américains travaillent à une courbe de croissance de régions précises du cerveau qui pourrait, comme celles du poids et de la taille, sonner l'alarme avant que ne surviennent des problèmes à l'école.

«Notre but est de mettre au point une courbe de croissance du cerveau qui pourrait être établie par le médecin de famille avec un appareil d'électro-encéphalogramme portatif et peu coûteux», expliquent en entrevue téléphonique Daniel Kessler et Chandra Sripada, respectivement spécialiste en neuro-imagerie et psychiatre à l'Université du Michigan, auteurs principaux d'une étude sur le sujet publiée au printemps dans la revue JAMA Psychiatry

«Nous venons de faire la preuve qu'en laboratoire, avec des appareils sophistiqués, nous pouvons détecter 80 % des cas de TDAH à l'aide de la neuro-imagerie, poursuivent-ils. Il faudra maintenant voir comment on peut transcrire ces résultats sur d'autres appareils.»

Les chercheurs du Michigan ont scruté les cerveaux de 520 jeunes de 8 à 22 ans, dont 4,8 % souffraient de trouble du déficit de l'attention avec hyperactivité (TDAH), une proportion inférieure à la moyenne de la population.

«Nous travaillons depuis six ans sur ce projet et il faudra évidemment que d'autres études confirment nos résultats. Nous allons aussi nous pencher sur d'autres troubles neurologiques», explique le Dr Chandra Sripada.

Y aura-t-il de faux positifs ou de faux négatifs? «Le but n'est pas de prédire le TDAH seulement avec une courbe de croissance neurologique, dit le Dr Sripada. C'est seulement un outil supplémentaire pour appuyer le jugement clinique du médecin, comme l'indice de masse corporelle.»

«Au moins une décennie»

Quand pourra-t-on voir des applications cliniques en cabinet? «Je suis optimiste et je pense qu'il faudra au moins une décennie avant qu'un produit utile soit commercialisé, dit le Dr Sripada. Les pessimistes vous diront que ça prendra beaucoup plus de temps ou que ce sera impossible.»

M. Kessler note qu'il a déjà eu des discussions sur la réglementation de tels appareils avec des entreprises et d'autres chercheurs. «C'est un signe que la science sur le sujet est prometteuse. La FDA [l'instance américaine chargée d'approuver les traitements] a déjà approuvé un test d'électroencéphalogramme pour le TDAH, le système Neba, qui utilise le rapport entre les ondes thêta et bêta du cerveau, mais, crois-je comprendre, son rôle dans l'établissement du diagnostic par un clinicien est marginal.» Neba a été approuvé en 2013 par la FDA et est disponible au Canada.

Les données de l'étude permettent-elles d'établir des courbes de croissance différentes pour les filles et les garçons, comme celles de l'indice de masse corporelle? «Non, mais il est plausible que des études subséquentes montreront des différences suffisantes», dit le Dr Sripada.

Les secrets du TDAH adulte

Seul un cas sur quatre de TDAH à l'âge adulte découle d'un diagnostic à l'enfance ou la préadolescence, selon une nouvelle étude britannique. Plus de 2000 enfants nés au milieu des années 90 ont été suivis pendant 20 ans, avec des tests poussés à quatre reprises entre les âges de 5 à 12 ans et un test à 18 ans. Quelque 12 % des enfants ont reçu un diagnostic de TDAH ; celui-ci a disparu à l'âge adulte dans 78 % des cas. Mais on a diagnostiqué à l'âge de 18 ans un TDAH chez 8 % des sujets, alors qu'ils n'en avaient jamais reçu auparavant. Le TDAH à l'âge adulte était dans tous les cas associé à trois fois plus de problèmes à l'école ou au travail, cinq fois plus d'anxiété, deux fois plus de problèmes de comportement et trois fois plus de dépendance à la marijuana.