Un ingrédient toxique présent dans un traitement à base d'herbes très populaire est en cause dans plus de la moitié des cas de cancer du système urinaire à Taïwan, où la médecine traditionnelle est très répandue, révèle une étude américaine publiée lundi.

L'acide aristolochique, présent naturellement dans les plantes de la famille des aristoloches, un ingrédient classique dans les remèdes à base d'herbes en Asie destinés à permettre de perdre du poids, de soigner les douleurs articulaires ou les maux d'estomac, est potentiellement cancérigène pour l'homme.

Les vertus de ces plantes ont été louées partout dans le monde depuis des millénaires pour de nombreux traitements, mais les scientifiques savent désormais qu'elles peuvent être responsables de troubles rénaux ou de cancers du système urinaire.

À Taïwan, où de récentes études ont montré qu'environ un tiers de la population a ingéré de l'acide aristolochique au cours des dernières années, la prévalence des cancers du système urinaire ou des reins est quatre fois plus élevée que dans les pays occidentaux où l'utilisation de ces plantes est moins fréquente, revèle ces recherches publiées dans les Actes de l'Académie des sciences américaine.

L'étude a porté sur 151 patients taïwanais atteints de cancer du système urinaire, dont 60% montraient des mutations dans leur ADN spécifiquement liées à l'ingestion d'acide aristolochique.

Cette plante «a été utilisée dans toutes les cultures du monde» depuis très longtemps, pointe Arthur Grollman.

Dans les années 1950, l'acide qu'elle contient a été identifié comme la cause d'une maladie rénale baptisée néphrite endémique des Balkans, qui touchait des villageois en Bosnie-Herzégovine, en Bulgarie, en Croatie, en Roumanie et en Serbie. Ces villageois cuisinaient des graines issues d'une plante de la famille des aristoloches.

Dans les années 1990, un traitement pour perdre du poids contenant de l'acide aristolochique a également été mis en cause en Belgique, après des cas d'insuffisance rénale détectés chez des femmes.

Et malgré l'interdiction frappant l'utilisation de cet acide dans de nombreux pays, sa diffusion se poursuit, notamment dans des produits vendus sur internet, relève Arthur Grollman. «De nombreux pays l'ont interdit, mais il est toujours disponible sur internet. Et en réalité, il n'est même pas interdit aux États-Unis, seule son importation l'est», conclut-il.