Lorsque Ratib Samur, un guérisseur, a ouvert sa clinique à Gaza, personne n'a cru qu'il pourrait soigner et soulager ses patients avec des piqûres d'abeilles, mais ce traitement fait désormais fureur dans un territoire isolé, en manque de médicaments.

«Le venin d'abeille est vraiment efficace. Je ne ressens plus cette douleur qui m'empêchait de dormir», s'exclame Mohammed al-Dayya, 25 ans, qui souffre de paralysie musculaire.

M. Dayya avait l'habitude d'aller se faire soigner en Égypte. «Ce traitement a stabilisé mon état. Il n'empirera pas avant que je puisse voyager», se console-t-il, lors d'une séance dans la clinique de Ratib Samur, où il se rend une fois par semaine.

«Je ne peux pas l'aider à remarcher. Mon traitement se contente surtout de soulager la douleur et d'empêcher une dégradation de son état», explique le guérisseur, âgé de 53 ans, qui a une formation d'ingénieur agronome en Égypte.

L'ouverture de sa clinique, en 2003, a été accueillie avec scepticisme. Pourtant, «elle a été mieux acceptée lorsque j'ai obtenu de bons résultats et les patients ont même augmenté depuis le début du siège israélien», souligne M. Samur.

Il est très difficile pour les Gazaouis de sortir du territoire, soumis à un strict blocus de la part d'Israël et de l'Égypte depuis que le mouvement islamiste Hamas a pris le pouvoir à Gaza, en juin 2007.

L'État hébreu autorise la sortie des cas médicaux urgents, mais il n'accorde qu'un nombre limité de permis pour les traitements à l'étranger.

Dans ces conditions, des centaines de personnes se tournent vers la clinique de Ratib Samur, d'autant que les tarifs sont abordables. Il n'en coûte que 1,60 euro pour une série de trois injections de venin.

Ismail Matar, 23 ans, a subi un violent traumatisme psychologique pendant la dernière guerre à Gaza, l'hiver dernier, lorsque l'un de ses amis a été tué devant lui lors d'un raid aérien israélien.

«J'étais en état de choc. Je n'étais pas assez fort pour bouger mes jambes, je voyais difficilement et aucun médicament ne parvenait à m'aider. Mais à présent, après sept mois de traitement aux piqûres d'abeilles, je vais bien mieux», se réjouit-il.

Le principal composant du venin d'abeille est la mellitine, un agent anti-inflammatoire et anticoagulant. L'apithérapie --les soins par les abeilles, une pratique très ancienne--, est utilisée un peu partout dans le monde pour traiter la sclérose en plaque et l'arthrite, mais il y a peu de preuve quant à son efficacité réelle.

«Ce traitement est un complément médical», précise Ratib Samur, qui refuse de s'occuper des cardiaques, des diabétiques ou des cancéreux. «Je ne pose pas de diagnostic de la maladie, je m'appuie entièrement sur l'opinion du médecin», dit-il, en allant de patient en patient avec sa petite boîte remplie d'abeilles.

Nivine Ajour, un mère de six enfants âgée de 32 ans, ne jure que par les mouches à miel. «Je souffre d'arthrite depuis cinq ans. Je ne pouvais plus monter les escalier, mais après cinq mois de traitement, je les monte six fois par jour», témoigne-t-elle.

Dans un coin de la clinique, Mohammed Baroud, un petit garçon sourd de 10 ans, brave la douleur de la piqûre. «Je suis habitué, je n'ai pas peur», assure-t-il. Il dit que son ouïe s'améliore de semaine en semaine et qu'il n'aura bientôt plus besoin d'appareil auditif pour entendre.