Un organisme californien a lancé, dans une dizaine de villes américaines, ainsi qu'à Toronto et Ottawa, un système internet permettant à une personne atteinte d'une maladie transmise sexuellement d'avertir ses partenaires sexuels de manière anonyme.

Depuis son lancement en 2005, Inspot a servi à prévenir 80 000 personnes qu'elles avaient eu des rapports sexuels avec une personne atteinte de MTS. C'est une goutte d'eau sur les 20 millions de nouveaux diagnostics de MTS au Canada et aux États-Unis. Mais dans les villes où Inspot (Système d'avertissement internet pour partenaires et aventures) est bien établi, le nombre de signalements pour certaines MTS a doublé.

Craintes

«Le signalement des MTS aux partenaires sexuels est une priorité des autorités de santé publique depuis les années 1930, explique Jeff Klausner, professeur de santé publique à l'Université de Californie à San Francisco, qui cosigne une étude sur Inspot dans le dernier numéro de la revue Public Library of Science Medicine. Mais l'opprobre qui entoure ces maladies pose problème. Les gens qui en ont craignent de le révéler à leurs partenaires, particulièrement si la relation est terminée ou s'il s'agit d'une aventure d'un soir.»

En 2004, le département de santé publique de San Francisco, où travaille aussi le Dr Klausner, a étudié les raisons pour lesquelles les homosexuels ne contactent pas à leurs partenaires passés quand ils apprennent qu'ils sont atteints d'une MTS. Le désir d'anonymat est clairement apparu.

«Nous avons aussi remarqué que les homosexuels changeant fréquemment de partenaires les rencontraient souvent par l'entremise de l'internet. Nous avons alors pensé nous en servir.»

Pour éviter toute inquiétude relative à la confidentialité, la Ville de San Francisco a délégué à une ONG, ISIS (Services internet d'information sur la sexualité), la gestion du projet. Les projets pilotes ont eu lieu en 2005, et Inspot s'est répandu à une dizaine de villes des quatre coins du pays, ainsi qu'à Toronto et Ottawa au Canada, et en Roumanie. «Nous voulons couvrir le territoire américain au complet, et idéalement le Canada aussi, d'ici la fin de 2009», explique Deb Levine, d'ISIS, l'auteure principale de l'étude de PLOS Medicine.

Difficile au Québec

Quelque 30 000 participants ont envoyé 50 000 cartes à une moyenne de 1,6 partenaire depuis les débuts d'Inspot. La moyenne actuelle est de 750 cartes par jour. Le sida fait l'objet de 9% des signalements, le chlamydia de 12%, la gonorrhée de 15% et la syphilis de 15%.

À l'Université McGill, le Dr Mark Wainberg, spécialiste du sida, estime que le programme Inspot est «très intéressant et innovateur». «Mais je doute que ce soit possible au Québec, à cause des lois très strictes sur la confidentialité, indique le Dr Wainberg. Il faudrait probablement avoir l'autorisation préalable des destinataires des avertissements par courriel.»

Deb Levine, d'ISIS, pense que l'absence de toute intervention gouvernementale règle la plupart des problèmes juridiques. «Nous sommes une ONG et tout se fait sur le mode égal à égal (peer to peer). C'est comme un site d'échange de fichiers.»