Les aliments venus de la forêt boréale gagnent en popularité dans les restaurants et même les épiceries. Au point où nombre de curieux veulent en savoir davantage sur ces produits que l'on peut cueillir un peu partout. L'entreprise Gourmet sauvage connaît un vif succès avec ses journées d'exploration près du mont Tremblant. Nous avons assisté à l'une d'entre elles.

Apprivoiser les végétaux sauvagesOn ne l'aime pas beaucoup, même pas du tout, cette mauvaise herbe qui envahit nos potagers et qui pousse l'effronterie jusqu'à se pavaner dans les craques du trottoir.

Vous dites qu'on peut se venger en la mettant dans son assiette?

Vraiment?

Voir les plantes d'une autre manière, les reconnaître puis les connaître, c'est cela qu'on apprivoise en participant à un atelier chez Gourmet sauvage, à Saint-Faustin-Lac-Carré. Cette entreprise, fondée il y a 24 ans par Gérald Le Gal, fait de la cueillette et de la transformation de végétaux sauvages. Ce projet, complètement fou et voué à l'échec dès le départ, admet lui-même M. Le Gal en rigolant, a le vent dans les voiles. Et il vente fort. Par ici, les coeurs de quenouille, les boutons de marguerite, les gousses d'asclépiade, la monarde fistuleuse, le mélilot, l'ail penché et tutti quanti...

«Aujourd'hui, tout le monde en veut, du boréal», constate M. Le Gal.

Endroit magnifique

M. Le Gal, qui était enseignant en géographie et histoire, a toujours aimé le bois. Au fil des années, il a occupé d'autres emplois, notamment chez les autochtones et outre-mer, toujours avec l'idée de se consacrer à sa passion: la nature et les végétaux. Il a monté son entreprise petit à petit. Il a cuisiné dans une cuisine empruntée, puis dans la sienne, ainsi que dans une cabane à sucre, hors saison. Depuis quatre ans, l'entreprise est établie dans une ancienne pisciculture gouvernementale qu'elle loue, à Saint-Faustin-Lac-Carré.

Avec ses 200 acres dans le Parc écotouristique de la MRC des Laurentides, son ruisseau, son étang, ses bâtiments de pierres et ses vieux bassins toujours en place, le lieu est bucolique à souhait. Et les terres en friche, elles, offrent un bel éventail d'espèces. «On a recensé une soixantaine de plantes comestibles sur le site, et on en a introduit 70 autres», précise avec enthousiasme Ariane Paré-Le Gal, qui prend tranquillement les rênes de l'entreprise fondée par son père.

«Il a tellement développé une expertise hyper pointue, c'est une bibliothèque vivante. Je voulais reprendre le flambeau, car s'il quitte, tout ça serait un peu perdu», signale la jeune femme.

Apprendre

Tout cela pour dire que, en marge de leur entreprise qui fabrique et vend des produits, les Le Gal ont voulu développer un aspect éducatif, afin de faire connaître les végétaux du Québec.

Ils proposent différents ateliers, comme celui auquel nous avons participé en juillet et qui s'appelle «Cueillette et cuisine des plantes sauvages». Cet atelier, qui réunit au plus une quinzaine de personnes, est donné chaque semaine, de la mi-mai à la mi-septembre. Évidemment, le portrait et la leçon évoluent au rythme de la saison.

D'autres ateliers, notamment sur les champignons ou sur l'usage autochtone des plantes, sont aussi offerts. Le succès est tel que tous les ateliers sont malheureusement complets pour cette année. On peut cependant s'inscrire en ligne sur une liste d'attente, pour les ateliers de l'an prochain.

On apprend que l'entreprise prépare également un atelier sur l'entomophagie, soit la consommation d'insectes. On en a déjà l'eau à la bouche...

Près de Tremblant

L'ancienne pisciculture du Parc écotouristique de la MRC des Laurentides est située à une vingtaine de kilomètres au sud de Tremblant et est accessible par la route 117. Le parc de 200 acres est ouvert à tous, et il n'en coûte rien pour s'y promener. On y trouve 4 km de sentiers aménagés. La piste cyclable du P'tit Train du Nord y passe, et on l'a asphaltée cette année.

Déroulement d'une journée natureL'atelier Cueillette et cuisine des plantes sauvages commence à 9 h, par une petite partie théorique dans l'immeuble principal, et se conclut dans un tipi, aux environs de 16 h, par une dégustation de mets préparés avec des plantes sauvages.

Lors de notre passage, c'est Andréa Galarneau, une horticultrice à la passion contagieuse et à la chevelure rouge comme une monarde, qui animait la journée. Elle nous a fait découvrir les trésors qui se cachent dans les sous-bois, les champs et les terres en friche.

On a appris toutes sortes de choses, comme le fait que les papillons monarques dépendent de l'asclépiade pour vivre. En s'en nourrissant, les chenilles avalent un liquide qui tiendra à distance les oiseaux, une fois qu'elles seront devenues papillons. Cette plante est aussi comestible, mais il faut prendre des précautions car le liquide peut s'avérer toxique.

L'asclépiade ne faisait pas partie de notre menu ce jour-là. Nous nous sommes plutôt régalés de soupe à l'oseille, de patates pilées à la monarde, d'omelette à l'ortie et ail penché et de salade d'orpin, pétales de fleurs et petits fruits.

PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE