Les vins du domaine Bernard Baudry, dans la Loire, ont un goût unique pour Marc Gravel et ses deux amis. Les trois Québécois ont acheté un hectare de vignes à la famille de vignerons, et leurs raisins se retrouvent dans leurs vins. Un investissement qui leur rapporte des bouteilles et, surtout, beaucoup de plaisir.

Dans son bureau de Québec, Marc Gravel a une vue époustouflante sur le fleuve et les ponts qui l'enjambent. Ce n'est pourtant pas le panorama qui fait rêver l'avocat. Il admire plutôt les photos de ses vignes accrochées aux murs et le caillou ramassé à Chinon qui trône sur son bureau.

« On s'est acheté du plaisir », dit-il sans détour.

Marc Gravel rêvait depuis longtemps de posséder ses propres vignes. Lors d'un voyage dans la Loire en 2004, il en a parlé à un vigneron dont il appréciait le travail. Deux ans plus tard, le téléphone a sonné. Une parcelle de vignes de la famille Baudry était à vendre à Chinon.

« J'ai dit oui sans même voir la parcelle et sans même savoir le prix », raconte M. Gravel.

L'avocat s'est associé à deux amis pour financer le projet.

INVESTISSEMENT OU PASSION ?

En compagnie de son partenaire d'affaires et ami François Giroux, Marc Gravel verse fièrement le vin rouge à base de cabernet franc issu de ses vignes.

PHOTO KARYNE DUPLESSIS PICHÉ, COLLABORATION SPÉCIALE

Le vigneron Matthieu Baudry faisant au printemps la tournée de ses parcelles de vignes dans la Loire. « Ça, c'est la vigne des Québécois ! », dit-il en s'arrêtant devant l'hectare de Marc Gravel et de ses associés.

PHOTO KARYNE DUPLESSIS PICHÉ, COLLABORATION SPÉCIALE

Le chinon et le cahors produits avec les vignes des Québécois. Ces vins exclusifs ont leur propre étiquette.

Ce privilège a un prix. Un hectare de vignes à Chinon coûtait près de 60 000 $ il y a 10 ans, précise François Giroux. La somme comprend le sol, les ceps, les piquets et les fils métalliques qui relient les plantes. L'homme d'affaires estime que l'investissement s'est apprécié de 3,5 à 5 %, sans tenir compte du taux de change. 

Marc Gravel et ses amis ne récoltent pas les raisins. Ils ne font pas de vin non plus. La famille Baudry s'en occupe. Les Québécois paient pour l'entretien de base, comme le remplacement des ceps malades ou des piquets, et les taxes foncières, bien entendu.

« Les vignes font partie intégrante de leur exploitation et ils nous paient un loyer comme s'ils louaient un appartement, explique M. Gravel. Sauf que notre bail est signé pour neuf ans. »

Un chèque, c'est bien, mais le trio voulait aussi goûter le fruit de son placement. Pour ce faire, une cuvée spéciale est produite avec une partie de leurs raisins. Le reste des fruits est inclus dans les cuvées du domaine. Les Québécois reçoivent l'équivalent de 300 bouteilles par année. Ils doivent payer les frais de transport, les frais de douane et les taxes à la Société des alcools du Québec (SAQ) pour les importer ici.

BIEN CHOISIR SON VIGNOBLE

La famille Baudry n'était pas le seul domaine que Marc Gravel avait contacté. Il avait aussi tenté de convaincre Catherine Maisonneuve et Mathieu Cosse à Cahors, dont les vins cultivés selon les règles de l'agriculture biologique et la biodynamie sont réputés.

« Il faut faire ses devoirs et bien choisir le vigneron avec qui on s'associe, ajoute M. Gravel. Je le fais d'abord par plaisir, mais il reste que c'est un investissement. »

En 2010, le téléphone a de nouveau sonné. Et l'avocat s'est porté acquéreur d'un hectare à Cahors, mais cette fois-ci avec son fils et M. Giroux. Une partie de leurs fruits se retrouvent dans les vins du domaine Cosse-Maisonneuve offerts à la SAQ : les cuvées La Fage et Les Laquets.

En terminant son verre de rouge, Marc Gravel confie qu'il rêve d'ajouter une production de vin blanc à son investissement. Il convoite un nouvel hectare de vignes quelque part dans le sud-ouest de la France.

DEUX VINS À DÉGUSTER

Chinon

Deux vins du domaine Bernard Baudry sont vendus au Québec, mais ils ne sont pas élaborés avec les fruits de la parcelle des Québécois. L'hectare de vignes de M. Gravel et de ses amis a récemment été replanté, car plusieurs vignes étaient malades. Leurs raisins se retrouvent dans un vin vendu seulement en France, appelé Les Granges.

Pour avoir un aperçu du travail des Baudry, on débouche une bouteille de leur chinon. Beaucoup plus dense et corsé que certains rouges de la Loire, il mérite un petit tour en carafe afin de mettre en valeur le côté fruité du cabernet franc. Il dévoile alors des notes d'épices et de fruits noirs ainsi que des arômes terreux typiques du cépage.

Bernard Baudry Chinon 2014, 24,40 $ (code SAQ : 10257571)

Cahors

Les vins de Cosse-Maisonneuve ont un immense succès. Si bien que les deux vins produits avec les vignes des Québécois se vendent rapidement. On peut cependant goûter à une autre cuvée du domaine, Le Combal. On comprend rapidement pourquoi M. Gravel a voulu investir avec ces vignerons tant la qualité est au rendez-vous. Ce malbec possède une bonne structure, mais aussi beaucoup d'épices, de la réglisse, des parfums de violette et du fruit. Fantastique pour le prix.

Le Combal 2014, 19,65 $ (code SAQ :10675001)