Peut-on justifier la loi du Nouveau-Brunswick qui interdit l'importation «de plus de 12 pintes de bière» dans cette province en plaidant qu'un article de la Constitution qui garantit le «libre-échange interprovincial» n'a pratiquement jamais été invoqué, parce qu'il tombe sous le sens?

Gérard Comeau, de Tracadie, au Nouveau-Brunswick, est accusé d'avoir «importé» 14 caisses de bière et trois bouteilles de spiritueux achetées à Pointe-à-la-Croix, au Québec, en octobre 2012. M. Comeau et 16 autres personnes ont été accusés à la suite de cette opération policière inhabituelle.

Dans le cadre du procès de M. Comeau, son avocat conteste la constitutionnalité de certaines dispositions de la Loi sur la réglementation des alcools au Nouveau-Brunswick. La défense plaide qu'une disposition de cette loi provinciale viole l'article 121 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui garantit le commerce interprovincial sans barrières.

Appelé jeudi à la barre, Tom Bateman, un professeur de sciences politiques de l'Université Saint-Thomas, a cependant soutenu que cet article 121 de la Constitution est tombé en désuétude puisqu'aucune province ne songerait à imposer des «tarifs douaniers» à ses voisines.

À l'extérieur du tribunal, Karen Selick, de la Fondation canadienne pour la Constitution, a rétorqué que c'est plutôt l'article 134 de la loi provinciale qui est tombé en désuétude. Elle a soutenu que cet article n'avait été invoqué qu'une fois, pendant deux jours, lors de l'opération de la Gendarmerie royale du Canada en octobre 2012.

La Fondation canadienne pour la Constitution apporte son soutien juridique à M. Comeau, et elle a organisé une campagne de financement participatif pour l'aider à assurer sa défense.

Mercredi, Andrew Smith, un historien politique de l'Université de Liverpool, avait soutenu au procès que dans les années 1860, les «Pères de la Confédération» n'avaient certainement pas envisagé de barrières commerciales entre les différentes régions du Canada naissant.

Plus tôt cette semaine, un dirigeant de la Société des alcools du Nouveau-Brunswick avait plaidé que les bénéfices de la société d'État - 165 millions de dollars par année - seraient réduits si la loi était modifiée pour permettre la possession de bière qui n'a pas été achetée dans un magasin de la province.