Un BlackBerry adapté pour les aveugles. Un système de codes-barres qui relègue le billet d'avion aux oubliettes. Une version réinventée du jeu Tetris, qui fait fureur partout dans le monde. Autant d'applications conçues ici, au Québec, dans une industrie appelée à connaître une croissance accélérée avec la multiplication des sans-fil «intelligents». Portrait de quatre entreprises qui se démarquent.

HumanWare

Le BlackBerry pour les aveuglesPrenez votre BlackBerry en main, fermez les yeux et essayez de l'utiliser. Impossible? Plus pour longtemps. HumanWare, une PME de Longueuil, a été mandatée par RIM le fabricant des populaires BlackBerry pour développer un logiciel qui permettra aux aveugles d'utiliser l'appareil comme s'ils voyaient... ou presque. Grâce à ce nouveau produit, les déficients visuels entendront une voix qui «lira» les différents icônes sur l'écran de leur appareil, au fur et à mesure qu'ils glissent le curseur. Le logiciel déclamera aussi les courriels reçus dans la messagerie mobile, tout comme l'identité des appelants.

«Il y a des réglementations au Canada et aux États-Unis qui font que les agences gouvernementales doivent rendre les appareils accessibles à tous leurs employés, explique Yvon Lagacé, vice-président au marketing chez HumanWare. Il y avait un besoin évident.» Le logiciel est toujours en développement et devrait être lancé au premier trimestre de l'an prochain, souligne M. Lagacé.

HumanWare commercialise déjà plusieurs produits pour les déficients visuels. Le BrailleNote GPS, par exemple, est un système de navigation par satellite compact qui permet aux aveugles de trouver leur chemin plus facilement.

EA Mobile

S'adapter avant tout

André Lauzon ouvre les tiroirs à la chaîne pendant notre visite dans la «voûte», une petite salle qui aurait de quoi rendre fou n'importe quel technophobe. On retrouve ici plus de 2500 téléphones portables différents, pratiquement tous les modèles aujourd'hui en circulation sur la planète!

La conception de jeux vidéo pour sans-fil requiert une bonne dose d'adaptation, avec les écrans, claviers et mémoires vives qui varient d'un appareil à l'autre, explique le producteur exécutif du studio montréalais d'EA Mobile. «Quand tu crées un jeu pour la Wii (de Nintendo), tu le crées sur cette plateforme et ça s'arrête là, dit M. Lauzon.

Mais quand on fait un jeu comme Sim City, il faut être capable de le décliner sur 450 téléphones différents! Avec Tetris Pop, c'est jusqu'à 600 téléphones différents!» La conception de jeux mobiles est complexe, mais aussi très payante. EA Mobile division du géant californien Electronic Arts a enregistré des revenus de 44 millions de dollars américains pendant le premier trimestre de l'année financière 2009. Un bond de 33% en un an. Le studio montréalais d'EA Mobile est le plus gros de l'entreprise dans le monde. Il compte 374 employés, nettement plus que les 250 qui y travaillaient l'an dernier. C'est de là que proviennent les jeux mobiles les plus populaires du groupe, dont Tetris Pop (une version dynamisée de ce classique), Scrabble et Bejeweled.

Lipso

Une PME en plein envol

Sophie Hennion avait tellement confiance dans les chances de succès de Lipso qu'elle a quitté son poste chez Aéroports de Montréal, il y a un an, pour devenir chef de la direction de la PME montréalaise. Il faut dire que le produit-vedette de la petite firme techno, un logiciel qui rend obsolète le billet d'avion traditionnel, a créé tout un buzz à son lancement la fin 2007.

Grâce à cette nouveauté, les passagers d'Air Canada peuvent maintenant franchir toutes les étapes de l'embarquement en présentant l'écran de leur sans-fil, où apparaît un code-barres. Une façon de faire qui fait gagner du temps aux voyageurs et économiser de l'argent au transporteur. «En signant avec Air Canada, ça a fait passer Lipso de très petite entreprise à petite entreprise» explique Vivianne Gravel, présidente et copropriétaire de la firme avec Mme Hennion.

Les effectifs de Lipso ont grimpé de 16 à 25 employés depuis l'an dernier, et ils devraient atteindre 50 d'ici un an. Les revenus devraient quant eux doubler l'an prochain, pour atteindre 6 millions de dollars, anticipe la présidente. L'industrie des applications sans fil est remplie de promesses dans tous les secteurs d'activités, croit Mme Gravel. Surtout avec la multiplication des appareils intelligents comme le iPhone.

«C'est sûr que le marché est en émergence: en 2000, ça n'existait pas le SMS! Nous, on a vu naître le SMS: le premier vote dans Star Académie, c'était nous, avec notre technologie.»

Gameloft

Le loft du jeu vidéo

L'édifice où loge Gameloft a l'air parfaitement anonyme, sorte de gros cube enclavé entre un viaduc, un chemin de fer et un hangar d'autobus. C'est pourtant de là que proviennent certains des jeux sans fil les plus éclatés du groupe français. Shrek 3, Bubble Bash et Midnight Pool, pour ne nommer que ceux-là, ont tous été conçus ici, à Montréal, dans le vaste studio québécois de Gameloft. L'entreprise connaît du succès et embauche à pleines portes par les temps qui courent.

«On est en pleine croissance: fin mars, on avait 230 employés, et maintenant, on en a plus de 300», explique Vincent Boiteau, responsable de production. Gameloft peine à recruter au Québec, si bien qu'elle a dû aller chercher une dizaine de travailleurs à l'étranger depuis le début de l'année. Les différentes sociétés techno de la province incluant les concepteurs de jeux «traditionnels» comme Ubisoft jouent du coude pour recruter les trop rares diplômés.

«Le marché est très bon, en pleine émergence ici à Montréal», indique Mario Poulin, directeur général du studio. Et qui sont ces millions de joueurs, scotchés à leur téléphone portable, qui achètent les produits de Gameloft ? Tous des ados mâles et désoeuvrés? Loin de là, dit M. Poulin. «C'est vraiment tout public, dont 50% de femmes.»