Dix ans après son lancement, YouTube est devenu un acteur incontournable du partage de vidéos en ligne mais sa rentabilité pose toujours question et il doit faire face à une concurrence de plus en plus acérée.

La toute première vidéo a été téléchargée sur le site américain le 23 avril 2005: il s'agissait d'une séquence de 18 secondes du cofondateur du site Jawed Karim, qui visitait le zoo de San Diego. Peu auraient alors parié que YouTube deviendrait le leader de la vidéo sur internet et une branche clé de l'empire Google.

Dix ans plus tard, YouTube a plus d'un milliard d'utilisateurs et des services délocalisés dans 75 pays, en 61 langues.

Environ 300 heures de vidéo sont téléchargées sur le site chaque minute et «chaque jour les gens regardent des centaines de millions d'heures de vidéos sur YouTube, et génèrent des milliards de vues», selon la page de statistiques du site.

La maison-mère Google prévoit de célébrer l'anniversaire du site de partage de vidéos le 10 mai, à la date exacte où il est devenu public, a précisé un porte-parole à l'AFP. Mais de nombreux analystes et d'inconditionnels célébraient la décennie d'existence de YouTube dès jeudi.

«Tout le monde sur la planète connaît YouTube, même ma mère», plaisantait ainsi Dan Rayburn, analyste chez Frost and Sullivan, qui tient un blogue sur les médias en streaming.

Depuis son lancement, YouTube a entre autres joué un rôle clé lors du Printemps arabe et d'autres bouleversements politiques. Le site a été interdit dans certains pays, notamment en raison d'un film sur Mahomet qui avait blessé de nombreux musulmans, et il a fait l'objet de nombreuses critiques relatives à la violation de droits d'auteur.

Peut faire mieux

Son modèle financier pose également question.

Google a racheté YouTube en 2006 pour 1,6 milliard de dollars en actions, ce qui était alors le plus gros achat d'une entreprise travaillant dans le domaine d'internet. Le site génère d'énormes revenus, mais son coût de fonctionnement est très élevé.

«Même aujourd'hui, Google ne veut pas dire si YouTube réalise des profits», souligne M. Rayburn. «Et 90% des analystes pensent que le site perd toujours de l'argent».

M. Rayburn note que YouTube a popularisé l'idée du partage de vidéos, mais celles-ci sont principalement générées par les utilisateurs et ne créent pas de revenus.

«Les gens qui veulent regarder des vidéos plus haut de gamme, comme des films ou des émissions de télévision, vont sur Netflix, Hulu ou iTunes. YouTube peine à trouver son modèle de croissance financière. La plupart des contenus ne peuvent pas être monétisés», ajoute Dan Rayburn.

Cela n'empêche pas certains analystes, comme Benjamin Swinburne, chez Morgan Stanley, de considérer YouTube comme un «actif précieux, à forte potentialité de croissance» pour Google.

Dans son rapport pour l'année 2014, l'analyste note que YouTube a généré 4,7 milliards de dollars de revenus sur l'année et il peut faire mieux en investissant dans des contenus premium, haut de gamme.

«Étant donné les ressources énormes de Google, nous avons été surpris qu'il n'ait pas voulu investir davantage dans des contenus premium», ajoute le rapport.

Une autre société spécialisée, Trefis, estime que YouTube représente environ 3% de la valeur de Google, mais que sa part est en augmentation.

Le pionnier du partage de vidéos doit en tout cas faire face à une concurrence de plus en plus dense: Amazon, Hulu, Netflix ou HBO sont sur le créneau des contenus payants haut de gamme, et Facebook s'est lancé dans le téléchargement gratuit de vidéos.

«YouTube doit décider ce qu'il veut devenir», reprend M. Rayburn. «Veulent-ils rester une plate-forme où tout le monde peut télécharger des contenus ?»

Selon lui Google semble vouloir laisser YouTube comme il est, en accord avec la philosophie du site lors de son lancement: «Je ne pense pas que Google veut monétiser tout cela. La volonté première de Google est d'aider le monde et de permettre à n'importe qui de télécharger ce qu'il veut. Google veut garder YouTube ouvert et gratuit», estime-t-il.

Les vidéos les plus populaires sur YouTube

- Gangnam Style: le clip du chanteur sud-coréen Psy, dont les pas de danse sur un cheval imaginaire sont devenus un phénomène mondial, a été vu plus de 2,3 milliards de fois.

- Baby: la vidéo du jeune chanteur canadien Justin Bieber avec le rapper Ludacris a été visionnée 1,15 milliard de fois.

- Dark Horse: le clip de Katy Perry et Juicy J a été vu 917 millions de fois.

- Roar: clip de la même Katy Perry a généré 889 millions de clics.

- Party Rock Anthem: la vidéo du groupe de musique électronique LMFAO a été vue 856 millions de fois.