Le compte Twitter en anglais des islamistes shebab somaliens a été suspendu, quelques jours après que les rebelles y ont publié la photo d'un soldat français tué dans une opération de commandos pour libérer un otage, puis menacé d'exécuter des Kényans.

Le compte en question, «HSMpress», n'était plus accessible vendredi. Un message indiquait simplement à la place: «Désolé, le profil que vous essayez de consulter a été suspendu».

Les shebab ont confirmé et dénoncé cette suspension, en ironisant sur «une nouvelle preuve de la liberté d'expression en Occident», sur leur compte en arabe, qui était, lui, toujours opérationnel, tout comme celui en somali.

Twitter n'avait, vendredi en milieu d'après-midi, toujours pas commenté cette suspension. Mais la société californienne prévoit qu'un compte puisse être interrompu si elle estime que ses règles ont été violées.

Parmi ces règles figure le fait de publier des menaces directes et spécifiques de violences. Twitter interdit également d'utiliser un compte «à des fins illicites ou pour la poursuite d'activités illégales».

Les shebab, affiliés à la nébuleuse Al-Qaïda, sont considérés comme une organisation terroriste par le Département d'État américain depuis 2008.

Ils utilisaient régulièrement leur compte en anglais, créé en décembre 2011 et qui comptait plus de 20 000 abonnés, pour diffuser des communiqués de presse, mais parfois aussi des photos et vidéos.

La diffusion, mi-janvier, des photos du soldat français décédé avait été dénoncée par les autorités françaises. Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault y avait vu une «mise en scène particulièrement odieuse».

Les shebab avaient aussi posté des messages annonçant l'exécution de l'otage Denis Allex, un agent des services français du renseignement extérieur, que les commandos français avaient en vain tenté de libérer dans la nuit du 11 au 12 janvier.

Ce mercredi encore, les islamistes somaliens avaient utilisé leur compte pour diffuser une vidéo dans laquelle ils menaçaient d'exécuter d'autres otages, kényans cette fois, si Nairobi ne libérait pas des prisonniers musulmans détenus pour «terrorisme».

Bataille de tweets

Les shebab, implantés dans le centre et le Sud somaliens, combattent les fragiles autorités de Mogadiscio, soutenues par une force de l'Union africaine (UA) et un contingent de soldats éthiopiens. Ces derniers mois, ils ont perdu un à un leurs bastions, mais contrôlent encore des poches de territoire.

Leur compte Twitter avait été créé dans la foulée de l'arrivée, en octobre 2011, de soldats kényans dans le Sud somalien. Ces soldats, lancés à la poursuite des islamistes, ont depuis été intégrés à la force de l'UA en Somalie, l'Amisom.

Les shebab s'étaient alors parfois livrés à des joutes de tweets -- aux accents parfois quelque peu surréalistes -- avec un porte-parole de l'armée kényane, Emmanuel Chirchir.

Les insurgés avaient notamment utilisé le réseau social pour qualifier les soldats kényans de «garçons inexpérimentés».

Peu après, Emmanuel Chirchir avait, dans une série de micro-messages, averti les populations que l'armée kényane n'excluait pas de prendre pour cible les troupeaux d'ânes que, selon lui, les shebab utilisaient comme moyen de transport.

Ce à quoi les islamistes avaient à leur tour répondu que «la stratégie de combat excentrique (du Kenya) inquiétait les défenseurs des droits des animaux».