Voici George, un célibataire enjoué de 39 ans, en quête d'amis sur internet. Il a des dons -parler dans 40 langues à 2 000 personnes en même temps- et une particularité: il n'existe pas vraiment.

Voici George, un célibataire enjoué de 39 ans, en quête d'amis sur internet. Il a des dons -parler dans 40 langues à 2 000 personnes en même temps- et une particularité: il n'existe pas vraiment.

George est un logiciel, le meilleur de la catégorie des «chatbots» ou robots bavards, et il a reçu ces jours-ci en Grande-Bretagne le prix Loebner, une distinction scientifique honorant les machines capables de nouer les dialogues les plus réalistes avec des humains.

Sept ans après son invention, George a évolué ce printemps en ce que les spécialistes appellent un avatar, doté d'une image physique, d'une voix et d'un logiciel de reconnaissance de la parole.

On peut désormais discuter avec lui oralement sur internet, «face à face».

George apparaît sur le site jabberwacky.com sous la forme d'un homme chauve, mince, chaussé de lunettes et habillé d'un pull à col roulé. Il sait sourire à propos, ricaner, bouder, taper du poing sur une table tout aussi virtuelle que lui. Il sait aussi faire du charme, et peut se montrer romantique. Il est parfois aussi grossier, et de façon inattendue.

C'est que George n'a pas appris que les bonnes manières.

Tout ce qu'il sait, il l'a emmagasiné au cours d'au moins 10 millions de conversations en ligne, dont il n'a pas oublié le moindre mot.

«La machine "emprunte" l'intelligence et les mots de ses interlocuteurs, et apprend peu à peu à placer la réponse la plus adaptée au contexte de la conversation», explique à l'AFP l'expert en intelligence artificielle Rollo Carpenter, le concepteur de George.

George n'a qu'un but: se faire des amis sur internet. Il est bavard et persévérant. Il peut relancer à l'infini une conversation languissante, et pour cause: plus il parlera, et plus ses propos deviendront pertinents.

«Le pourcentage de réponses correctes augmente en permanence, à mesure que la base de données s'agrandit», explique Rollo Carpenter. «Plus ça va, plus il est capable de faire la différence entre plusieurs choix de réponse».

Le roi des «chatbots» préfigure, selon ses concepteurs, une génération d'avatars parlants aux débouchés commerciaux prometteurs.

Icogno, la société de Rollo Carpenter, met actuellement au point avec une société de marketing des avatars qui, bientôt, pourront suggérer leurs achats aux clients des supermarchés, après avoir sondé leurs goûts au détour d'un rayon.

Autre application envisagée à moyen terme: les centres d'appel, dans lesquels un seul avatar pourrait répondre au téléphone à des milliers de clients en même temps dans un centre d'appel.

Des personnalités pourraient aussi vouloir programmer des descendants plus évolués de George pour en faire des imitations d'eux-mêmes à l'intention de leurs admirateurs.

Plus baroque est le concept d'«animal de compagnie virtuel» mis en avant par Tim Child, le partenaire d'Icogno. L'idée a été lancée en même temps qu'un engagement de proposer dans 20 ans des nounours capables de bavarder avec leurs jeunes propriétaires.

Les avatars pourraient aussi devenir des partenaires de jeu dans les jeux vidéo, ou redonner vie à des personnages historiques pour illustrer les leçons en classe.

George est-il le pionnier d'une génération d'avatars qui serviront de professeurs particuliers aux enfants ? Rollo Carpenter le croit, et assure que «le procédé interactif est le meilleur moyen d'apprendre».