Dans un an jour pour jour, jeudi, les yeux du monde seront tournés vers Vancouver, qui accueillera les Jeux olympiques d'hiver. Une belle carte de visite qui vient toutefois avec de grands défis. Notre envoyé spécial, Simon Drouin, est allé constater sur le terrain l'état d'avancement des travaux. demain: 10 athlètes québécois à surveiller

Nous sommes face à la Art Gallery de Vancouver, au coeur de la ville. Trois touristes mexicains dans la vingtaine se font photographier devant l'horloge officielle du compte à rebours préolympique. Le cadran indique 452 jours, 21 heures, 50 minutes et des poussières. Rapide calcul mental: ça ne concorde pas. Nous sommes en décembre, et la cérémonie d'ouverture des prochains Jeux d'hiver se déroulera le 12 février 2010.

 

Ça s'explique. Ce n'est pas le compte à rebours des Jeux olympiques, mais celui des paralympiques, qui commenceront un mois plus tard. Sur l'autre face de l'horloge, le cadran associé aux Jeux olympiques est... éteint. Panne d'électricité ou acte de sabotage de protestataires? Simple problème électronique, répond, un rien contrit, un porte-parole du Comité d'organisation des Jeux de Vancouver (COVAN).

À presque un an jour pour jour de la cérémonie d'ouverture, les Jeux olympiques ne soulèvent pas encore les passions à Vancouver. On s'intéresse davantage aux déboires des Canucks. Ou aux contingences, comme le plan de transport des Jeux (bien reçu) et le financement du futur Village des athlètes (moins bien reçu).

Pour sentir la frénésie olympique, il faut se rendre dans la banlieue d'East Vancouver, où sont situés les bureaux du COVAN. Dans deux édifices où il faut montrer patte blanche, plus de 1200 employés s'activent. Les locaux sont à aire ouverte et un esprit de collégialité y règne.

John Furlong, grand patron du COVAN, nous reçoit dans son bureau entre deux rendez-vous. L'Irlandais d'origine, participant au processus depuis le tout début, reconnaît que la tâche est monumentale. «Ce n'est pas facile pour les gens, souligne Furlong. Si vous demandiez à toutes les personnes ici, elles vous répondraient qu'il s'agit du plus grand défi qu'elles aient eu à relever. Mais ce qui tient l'équipe ensemble, c'est que si vous preniez chacune d'entre elles dans un coin et que vous lui demandiez son rôle ici, elle vous répondrait: Moi? J'organise les Jeux olympiques.»

Lors de mes deux visites ici, un représentant du COVAN me suivra littéralement à la trace. Chaque interview, même la plus banale, sera soigneusement enregistrée. L'équipe de communication est aguerrie. Pas question que le moindre début de controverse ne vienne entacher la réputation bien lisse de l'organisation. Pas un fil ne dépasse, pas un poil ne retrousse.

En ce sens, le couac de l'horloge olympique, réglé depuis, est plutôt inusité. Dans l'histoire olympique hivernale récente, aucun comité d'organisation ne peut en effet se vanter d'un tel niveau de préparation. Sur le plan des installations sportives, les Jeux olympiques pourraient pratiquement se tenir dès aujourd'hui.

À la montagne, la spectaculaire piste de bobsleigh, luge et skeleton, nichée dans la crique Fitzsimmons, entre les montagnes Whistler et Blackbomb, a été complétée en décembre 2006. Une Coupe du monde de ski alpin a été organisée avec succès l'hiver dernier dans le secteur Creekside, où ont été défrichées les premières pistes de la célèbre station au début des années 60. À cette époque, les fondateurs, des hommes d'affaires de Vancouver, rêvaient déjà de Jeux olympiques.

Le majestueux centre nordique, niché dans un coin perdu de la Callahan Valley, à une quinzaine de kilomètres de Whistler, est déjà ouvert aux fondeurs amateurs. Dans un an, ils céderont la place aux athlètes olympiques de biathlon, de ski de fond, de saut à ski et de combiné nordique. Pour la première fois de l'histoire olympique, les épreuves de ces quatre disciplines nordiques se tiendront au même endroit, où trois stades temporaires de 12 000 places chacun seront aménagés.

En ville, plusieurs infrastructures existaient déjà lorsque le Comité international olympique a octroyé les Jeux à Vancouver, en juillet 2003. Le stade couvert BC Place présentera les cérémonies d'ouverture, de clôture et de remise des médailles. L'aréna GM Place - rebaptisé pour l'occasion «Place Hockey du Canada» pour une histoire de commandites - sera le théâtre principal du très attendu tournoi de hockey. Le Pacific Coliseum, ancien domicile des Canucks, a été retapé pour accueillir le patinage de vitesse courte piste et le patinage artistique.

Situé à quelques centaines de mètres d'une piste d'atterrissage de l'aéroport international de Vancouver, en bordure du fleuve Fraser, l'Anneau olympique de Richmond risque de voler la vedette durant les Jeux.

L'édifice a été inauguré officiellement le 12 décembre, mais l'équipe canadienne de patinage de vitesse y avait déjà tenu un camp en septembre. Bijou architectural à saveur environnementale, la charpente du toit ondulé a été fabriquée à partir de bois endommagé par une infestation d'insectes dans les forêts de pin de la Colombie-Britannique. À l'oeil nu, on peut d'ailleurs distinguer les petits trous faits par les bestioles. De l'extérieur, ça ressemble presque à une ruche.

Les immenses baies vitrées de l'anneau offrent une vue imprenable sur les montagnes de la chaîne côtière. On y distingue presque les pistes de la station Cypress, où s'illustreront planchistes et skieurs acrobatiques. En descendant du télésiège, ceux-ci pourront admirer la ville et l'océan Pacifique. Véritable décor carte postale que les caméras du monde entier vont adorer... à condition que l'insistant brouillard ne vienne pas tout gâcher.