S'il s'agissait bien de la dernière course individuelle de la brillante carrière de Denny Morrison, le résultat final n'est pas celui qu'il espérait obtenir.

Mais Morrison avait gagné la course dès le moment où il s'est présenté à la ligne de départ mardi soir, et a planté l'extrémité de sa lame de patin dans la luisante surface glacée de l'ovale de Gangneung.

Chemin faisant vers les Jeux de PyeongChang, le Britanno-colombien de 32 ans a frôlé la mort non pas une, mais deux fois, et s'est classé 13e du 1500 m de patinage de vitesse sur longue piste.

«J'ai éventuellement dû accepter d'être alité en deux occasions à l'hôpital. C'est quelque chose qui était arrivé. Et c'est comme la course aujourd'hui [mardi], a déclaré Morrison. Ce n'est pas le résultat que je voulais. Ce n'est pas la position dans laquelle je veux être. Mais je dois accepter que c'est ce qui est arrivé aujourd'hui.»

Le quadruple olympien a franchi la ligne d'arrivée en 1 minute 46,36 secondes.

Les Néerlandais ont occupé les deux premières places du podium, Kjeld Nuis méritant l'or en 1:44,01, devant Patrick Roest (1:44,86). La médaille de bronze est allée au Sud-Coréen Kim Min Seok, en 1:44,93.

L'Ontarien Vincent De Haître a terminé au 21e rang.

Il y a quatre ans à Sotchi, Morrison a mis la main sur des médailles d'argent et de bronze. Les années entre les Jeux tenus en Russie et ceux présentés en Corée du Sud ressemblent à une saison complète de la série américaine Grey's Anatomy. Il a subi une fracture du fémur, une déchirure du ligament croisé antérieur et une multitude de blessures internes à la suite d'un accident de motocyclette en mai 2015.

Il s'est lui-même qualifié de «mec chanceux» d'avoir survécu à cet accident.

Moins d'un an plus tard, il a été victime d'un AVC pendant une randonnée cycliste de 20 jours en Arizona avec son amie de coeur Josie Spence, qu'il a épousée depuis. Josie Morrison, une patineuse de vitesse qui représente également le Canada aux Jeux de PyeongChang, l'a conduit d'urgence à l'hôpital après avoir constaté qu'il affichait un comportement étrange. Il bavait. Il était incapable de rentrer son pied dans sa sandale de plage.

Pour un athlète dont l'identité était étroitement liée à ses déplacements autour d'une ovale de glace, les deux retours ont été extrêmement ardus.

«Lorsque je ne pouvais pas m'entraîner, j'avais l'impression d'avoir perdu ma raison d'être et la routine quotidienne qui me gardait actif, a précisé Morrison.

«Et l'un des aspects les plus difficiles, mentalement, c'était de me voir interdire, plusieurs jours après les deux incidents, de m'entraîner comme je l'avais fait pendant une décennie et demie.»

À cause de la déchirure du ligament croisé antérieur, il a dû faire une croix sur des sports qu'il affectionnait, comme le soccer et le volleyball. En raison de son AVC, il ne pouvait rien faire qui pouvait faire croître sa pression sanguine. Il lui a fallu patienter pendant cinq mois avant de lever des poids et haltères.

«Il s'agissait de renouer avec la vie comme je la connais et de retrouver ma raison d'être qui, pour moi, a toujours été le patinage de vitesse. Ç'a toujours été l'entraînement, de voir jusqu'où je pouvais aller... Alors, oui, ce n'était pas autant pourquoi je continuais que comment je pouvais ne pas continuer?»

Quelques instants après avoir retiré ses patins mardi soir, il a discuté de manière réfléchie avec les journalistes sur sa longue traversée pour retourner aux Jeux olympiques, et comment il avait dû accepter que les choses ne seraient plus jamais les mêmes.

«Pendant le retour après l'accident de motocyclette... je visualisais mes courses de la même façon qu'avant l'accident: je vais faire ceci, et cela, et cela, et boom, je vais obtenir ce résultat. Et ce n'était pas si facile. C'est arrivé tellement souvent que ça n'a pas été facile.

«Et je me suis senti mieux, et mieux et mieux, et j'ai connu une bonne course. Et ensuite, j'ai eu l'AVC. Et j'ai visualisé, et je me suis senti mieux et je pensais que je réaliserais une bonne course, et ça n'a pas été facile.»

Face au Polonais Konrad Niedwiedzki mardi, le premier tour de Morrison a été le plus lent, en grande partie à cause de son genou, toujours instable, qui rend les accélérations difficiles. Il a augmenté la cadence lors des deuxième et troisième tours et a croisé la ligne d'arrivée en cinquième position alors qu'il restait encore dix des meilleurs patineurs au monde à prendre le départ.

«Je me sentais de mieux en mieux au point où maintenant, parce que j'étais aux Jeux olympiques, je pensais que je pourrais y arriver. J'avais cette foi, à nouveau. Et ça n'a pas été si facile n'est-ce pas? Ce n'est pas un sport facile. Ç'a été difficile aujourd'hui. Et c'est quelque chose que je dois accepter.»

Morrison doit également participer à l'épreuve par équipe à Pyeongchang. Il n'est pas vraiment sûr de ce qui l'attend sur le plan compétitif, par la suite.

«Qui sait? Peut-être que je participerai à une autre course», a-t-il lancé, avec le plus rapide des clins d'oeil.