D'autres auraient pleuré de tristesse. Certaines auraient maudit le destin, blâmé l'arbitre, parlé d'échec. Mais après une deuxième expérience olympique crève-coeur, Martine Dugrenier est restée digne dans la défaite, hier à Londres.

Triste, elle l'était pourtant. La Montréalaise est encore une fois passée à un cheveu d'un podium olympique. Sa défaite en deux manches contre la Mongole Battsetseg Soronzonbold l'a privée d'une médaille de bronze. Elle a terminé 5e de la catégorie des 63 kg. Comme à Pékin.

Droite comme un piquet, la voix nouée par l'émotion, mais la tête haute, l'athlète de 33 ans a fait le bilan de sa carrière olympique sous les néons du Centre ExCel. «Il va me manquer une médaille, peut-être, a admis Dugrenier du bout des lèvres. Mais j'ai quand même remporté trois championnats du monde durant toutes ces années. On ne peut pas oublier ça.»

Ses Jeux à Londres se résument à deux défaites et une victoire. Sa journée a commencé contre la lutteuse la plus crainte de sa catégorie. La Japonaise Kaori Icho est sept fois championne du monde et médaillée d'or olympique en 2004 et en 2008. Icho n'a pas perdu en 150 combats. C'est elle qui avait vaincu Dugrenier à Pékin en demi-finale.

La Japonaise l'a emporté sans surprise, avant de gagner l'or olympique pour la troisième fois de suite plus tard en journée. Puis Dugrenier a rebondi en remportant son premier combat de repêchage, contre la Suédoise Henna Johansson. Mais il y a eu la Mongole... Cette défaite l'a éliminée de la course aux médailles.

«Je donne le mérite aux deux lutteuses qui m'ont battue aujourd'hui. Elles ont fait un travail incroyable», a dit Dugrenier, qui avait du mal à expliquer comment ses succès aux championnats du monde ne se sont jamais reproduits sur la scène olympique.

«C'est un concours de circonstances. C'était possible pour moi de gagner une médaille, que ce soit en argent, en bronze, peut-être même en or. Je n'ai pas été capable de le faire. Mais je ne pense pas qu'on puisse juger une expérience seulement sur la médaille au bout.»

Vers une carrière d'entraîneuse

Ce qu'elle retient de ses deux participations aux Jeux olympiques? «Au bout du compte, je pense qu'on ne peut pas avoir tout ce qu'on veut dans la vie. J'ai travaillé fort et j'ai appris des leçons. Et je pense que cette leçon-là va me servir plus tard.»

Martine Dugrenier se dit «fière de ce long voyage de quatre ans» afin de se qualifier pour les Jeux. Mais il est temps pour elle de tourner la page. Si on la voit à Rio, ce sera en tant qu'entraîneuse. Elle enseigne déjà l'éducation physique au collégial, tout en terminant une maîtrise à l'Université de Montréal.

Les athlètes ne se rendent pas aux Jeux olympiques pour apprendre à perdre. Martine Dugrenier non plus. «La douleur va toujours rester là», dit-elle. Mais la lutteuse n'est pas du genre à se plaindre et à s'apitoyer sur son sort. «Il faut que les jeunes apprennent qu'on perd, qu'on gagne, et que ça ne s'arrête pas là.»

Huynh sur le podium malgré les blessures

À deux mois des Jeux, la lutteuse Carol Huynh s'est fait toute une frousse. Un faux mouvement à l'entraînement lui a causé une entorse à un genou. Son ligament latéral interne atteint, on lui a interdit de lutter jusqu'aux Jeux.

La médaillée d'or à Pékin,  dans la catégorie des 48 kg, était blessée. Plusieurs remettaient en question ses chances de médaille. Mais l'Albertaine de 31 ans n'avait pas dit son dernier mot. À la surprise de plusieurs, Huynh a remporté hier la 14e médaille olympique du Canada. Elle n'est pas d'or comme en 2008, mais de bronze, et a été gagnée sur les tapis du Centre ExCel.

«C'est fantastique. J'aurais préféré l'or, mais je vais prendre le bronze. Je suis tellement heureuse d'être ici, a lâché la lutteuse après avoir reçu sa deuxième médaille olympique. Ç'a été une longue journée!»

L'athlète d'origine sino-vietnamienne a commencé sa journée en force en remportant ses deux premiers combats de manière convaincante. Dans la foule, une trentaine de parents et d'amis l'encourageaient. Sur leur t-shirt, en grosses lettres, «Go Carol!»

«Mes frères et soeurs étaient là. C'est incroyable. Je les cherchais dans la foule durant les matchs, a-t-elle raconté. Toute ma famille était là. Ç'a fait du bien de les voir m'appuyer.»

Mais contrairement à la journée parfaite qu'elle avait connue à Pékin, Huynh a perdu un combat, hier. La Japonaise Hitomi Obara a remporté les deux manches de la demi-finale.

Dans le match pour la médaille de bronze, contre la Sénégalaise Isabelle Sambou, la Canadienne a eu besoin d'un peu de chance. Les deux manches se sont terminées sur une marque vierge. Dans les deux cas, en bris, le tirage a donné l'avantage à Huynh: mise en position d'attaque comme le veut le règlement, elle a réussi à renverser la Sénégalaise.

«Ç'a été un match serré. Je ne souhaitais pas finir mes Jeux comme ça. Je voulais le faire avec plus de panache et la bousculer, mais ce n'est pas arrivé, a expliqué l'athlète de Calgary. Je me suis sentie chanceuse d'avoir les deux bris. Je suis tellement heureuse de gagner une autre médaille pour le Canada.»

Carol Huynh ne sait pas ce qui l'attend. Elle se verrait bien devenir entraîneuse, mais n'exclut pas de continuer la lutte. «Tant que je vais aimer la compétition, je vais continuer. J'aimerais encore une fois me tenir sur la plus haute marche du podium, dit-elle. Les émotions il y a quatre ans, c'était incroyable.»

PHOTO TORU HANAI, REUTERS

La Canadienne Carol Huynh a battu la Sénégalaise Isabelle Sambou pour remporter la médaille de bronze chez les 48 kg.