Il danse encore, il fait de nouvelles simagrées... et il est encore le plus fort. Usain Bolt leur a tous fait la barbe. Au jeune Blake d'abord, meilleur que lui cette année. Et à l'Américain Gatlin, meilleur temps en demi-finale deux heures plus tôt.

En prime: il récrit son record olympique, deuxième temps de l'histoire: 9,63.

Il est arrivé devant les journalistes en rigolant avec Yohan Blake, il a cabotiné un peu, tapé sur le micro. Jusqu'à ce qu'il entre dans le vif du sujet. Cette victoire-là est encore plus grande, parce qu'il s'agissait de reconquérir un titre en péril.

«Il y avait beaucoup de doutes autour de moi.» Hein? Des gens ont dit qu'il se ferait battre par Blake? Qui ça? Ah oui, moi. Mes excuses.

Mais d'après ce que j'ai entendu hier, Bolt lui-même s'est mis à douter. Disqualifié aux Championnats du monde l'an dernier pour un faux départ, il n'a pas connu une saison 2012 très glorieuse. Il a été battu par son compatriote Blake au 100 m et, pire encore, au 200, et a bien évité de le croiser sur une piste deuis.

«Quand on est au sommet, on perd parfois de vue ce qui nous a amené là. Tout le monde vous dit que vous êtes bon. C'est ce qui m'est arrivé. Yohan a travaillé plus fort que moi. Il a gagné [aux qualifications jamaïcaines]. C'est comme s'il était venu cogner à ma porte: hé, réveille-toi mon vieux!»

Il est venu à Londres pour devenir «une légende», il dit ça sans rire cette fois. «C'est le pied dans la porte de la légende. Il me reste le 200 m. Michael Phelps est devenu une légende, il a mis la table pour rendre les Jeux olympiques encore plus excitants.»

Et pourquoi pas Rio 2016, puisqu'il n'aura que 30 ans? «Yohan aura 26, ce sera intéressant...»

Les deux compagnons d'entraînement éclatent de rire.

Une course parfaite? «Je voudrais dire oui, mais le coach va dire non.»

On a voulu lui faire raconter sa course en détail, mais il est revenu à ce que son entraîneur lui a dit: sais-tu, laisse donc faire ton départ, ta force c'est la deuxième moitié de la course. Arrête de t'énerver avec la technique de départ. Cours!

«J'ai juste couru, finalement.»

C'est donc ça, son secret: seulement courir.

On était rendu à son menu de petit-déjeuner d'hier quand on a annoncé la fin de la conférence de presse (bananes plantain, galettes de patates, fruits, wrap au poulet et jus de pomme, puisque vous voulez le savoir).

Justin Gatlin, en bronze avec un record personnel de 9,79, l'a jouée modeste: content d'être inclus dans un «événement historique», content qu'on lui pose deux questions...

Il était bien seul à côté des deux cabotins, qui expliquaient en riant leurs Jeux avant et après les courses. Ils riaient sans arrêt.

«Tout ça, c'est pour relaxer avant la course, c'est Usain qui a apporté ça et c'est très bien», a dit Blake, qui a égalé sa marque personnelle de 9,75, à côté de son mentor et rival.

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Nous étions quelques centaines de journalistes bien serrés à attendre dans le corridor de sortie du stade qu'on appelle la zone mixte. Bolt, bien sûr.

Tiens, quelqu'un pleure. Fort. On se retourne, on cherche... Arrive Tyson Gay. Il a fini quatrième. Il est inconsolable.

«J'ai tellement essayé pour ma famille, man, mais j'en ai manqué...» Il hoquète. À part Bolt, il a le meilleur temps historique (9,68). Il a été champion du monde. Mais de médaille olympique... il n'en a pas. Grosse opération à la hanche l'an dernier. Revenu assez fort pour les sélections... Meilleur temps de la saison hier (9,80) ... Mais pas de médaille. Et à 29 ans, c'était sans doute la dernière chance de l'Américain.

Des fois, juste courir ne suffit pas.



Photo: Bernard Brault, La Presse

Usain Bolt a effectué sa célèbre pose après sa victoire, au grand plaisir des 80 000 spectateurs.

Une première médaille d'or pour les États-Unis

Le Canadien Justyn Warner a terminé cinquième au sein de sa vague en demi-finale en 10,09. Ce ne fut pas suffisant pour se qualifier pour la grande finale et il a conclu l'épreuve au 13e rang.

Les États-Unis ont remporté une première médaille d'or en athlétisme quand Sanya Richards-Ross a résisté aux assauts de la championne en titre Christine Ohuruogo lors de la finale au 400 m féminin. DeeDee Trotter a terminé troisième pour ainsi compléter le doublé américain.

Un jour après avoir fait ses débuts aux Olympiques, Oscar Pistorius, amputé des jambes, n'a pas été en mesure de se qualifier pour la finale au 400 mètres. Il a terminé dernier de sa vague.

Lalonde Gordon, de Trinité et Tobago, a été le plus rapide lors des qualifications avec un chrono de 44,58 secondes. Les jumeaux belges Jonathan et Kevin Borlee se sont qualifiés pour la finale.

Plus tôt dimanche, l'Éthiopienne Tiki Gelana a établi un record olympique avec un temps de 2:23,07 au marathon féminin.

Gelana, qui est âgée de 24 ans, s'est éloignée d'un peloton de marathoniennes dans l'ultime kilomètre de cette épreuve qui en comptait 42,195. L'Éthiopienne est la nièce de Gezahegne Abera, le champion olympique du marathon de Sydney en 2000.

La forte pluie, qui s'est abattue sur la première portion de l'épreuve, a repris tandis que Gelana croisait le fil d'arrivée.

Le record précédent était de 2:23,14 et avait été réalisé par la Japonaise Naoko Takahashi lors des Jeux de Sydney en 2000. Gelana n'a toutefois pas battu le record mondial de 2:15,25 réussi par la Britannique Paula Radcliffe à Londres, en 2003.

La Kényane Priscah Jeptoo a pris le deuxième rang en vertu d'un chrono de 2:23,12, suivie de la Russe Tatyana Petrova Arkhipova (2:23,29). Cette dernière est une ancienne spécialiste du 3000 m steeple qui a terminé quatrième aux JO de Pékin et qui fut vice-championne du monde en 2007 sur la distance.

La compatriote de Jeptoo, Mary Keitany, a terminé au pied du podium en 2:23,56. Elle était la favorite à l'aube de la compétition féminine.

De son côté, Nate Brannen, de Cambridge, en Ontario, a chuté en demi-finale au 1500 m. Alors qu'il tentait un dépassement, un autre coureur l'a accroché par derrière. Brannen est tombé et a été coupé à cinq endroits à un mollet.

Brannen s'est relevé et a quand même rallié l'arrivée. Il a cependant été incapable de se faufiler en finale.

L'entraîneur Wynn Gmitroski a indiqué qu'Athlétisme Canada allait déposer un protêt.

Pour sa part, Sarah-Lynn Wells, de Toronto, s'est qualifiée pour les demi-finales au 400 m haies. Elle a terminé quatrième au sein de sa vague avec un chrono de 56,47.

Au saut en hauteur, Derek Drouin, de Corunna, en Ontario, a réussi un saut de 2,29 mètres pour ainsi terminer au sixième rang des qualifications. Il participera donc à la finale de mardi, tout comme son compatriote Michael Mason, de Nanoose Bay, en Colombie-Britannique. Ce dernier a réussi un saut de 2,26 mètres, bon pour une égalité au 12e échelon.

Au triple saut chez les dames, Olga Rypakova, du Kazakhstan, a gagné l'or. Elle a franchi 14,98 mètres lors de son troisième de six essais. Elle a ainsi devancé la Colombienne Caterine Ibarguen (14,80) et l'Ukrainienne Olha Saladuha (14,79).

Le Hongrois Krisztian Pars s'est couvert d'or au lancer du marteau, grâce à un lancer de 80,59 mètres. Il a ainsi devancé le Slovène Primoz Kozmus (79,36) et le Japonais Koji Murofushi (78,71).

Finalement, le Kényan Ezekiel Kemboi a triomphé au 3000 m steeple. Il a devancé au fil d'arrivée le Français Mahiedine Mekhissi-Benabbad et son compatiote kényan Abel Kiprop Mutai.

- Avec Agence France-Presse et Associated Press