Bravant le froid, le vent et une averse qui s'intensifiait en début d'après-midi, des centaines de partisans ont assisté aux funérailles par le truchement des écrans géants installés à l'extérieur de la cathédrale Marie-Reine-du-Monde. Pour pouvoir entrer à l'intérieur de l'enceinte, il fallait arriver, au minimum, une heure avant le début de la cérémonie.

Avec un chandail numéro 4 autographié, Alain était l'un des tout premiers dans la file. Pour rien au monde il n'aurait manqué l'adieu à son idole. «C'était important de venir pour lui rendre hommage. Je suis chanceux, car je l'ai rencontré en 2009, au Salon du livre, lors du centenaire du Canadien. J'ai réussi à lui parler brièvement et il m'avait impressionné autant par sa simplicité que par son humanité. C'est le plus grand du Canadien et je devais lui dire salut.»

Sur le trottoir du boulevard René-Lévesque, où quelques drapeaux du Canadien et du Québec battaient au vent, les admirateurs étaient loin de composer un bloc monolithique. Les moins de trente ans, qui ont appris les exploits du «Grand Jean» via une transmission générationnelle, des livres ou des extraits vidéo, côtoyaient ceux qui étaient aux premières loges dans le défunt Forum.

Droit comme un chêne malgré ses 82 ans, Pierre est l'exemple du partisan qui a suivi la carrière de Béliveau de A à Z. Il se rappelle le chemin parcouru: l'offre d'une équipe de baseball de l'Alabama dans les années 40, les promesses découlant d'une belle parenthèse junior et évidemment, ses premiers coups de patin avec le Canadien. «Je l'ai vu jouer avec Maurice Richard, (Bernard) Geoffrion et tous les meilleurs. On aurait dit qu'il flottait sur la glace avec ses grandes enjambées. C'était une merveille comme Richard, tranche l'octogénaire d'origine ukrainienne. Je l'ai toujours aimé, on aurait dit qu'il n'avait pas d'orgueil.»

Jean-Claude s'immisce alors dans la conversation, qui s'était aventurée sur l'évolution du hockey depuis les années 50. Le Longueuillois a connu le célèbre numéro 4 sur un plan un peu plus personnel. «C'était mon voisin. Il était toujours gentil, j'allais passer la souffleuse chez eux, indique-t-il. Ça me prenait cinq minutes, mais il disait: "Tu viendras souper avec nous autres dans la soirée."»

La majorité des partisans rencontrés hier vivaient à Montréal ou avaient effectué le court déplacement depuis la banlieue. Mattia, quant à lui, a assisté à la cérémonie quelques heures après son arrivée de Suisse. «Disons que c'est une triste coïncidence que je sois ici, mais je trouve que c'est correct de venir lui rendre hommage. En Suisse, il n'est pas vraiment connu, mais moi, je suis un partisan du Canadien. J'ai toujours aimé sa façon de faire et c'est un personnage qui mérite le respect de tout le monde.»