À la fin de la saison dernière, Max Pacioretty, à qui on demandait s'il aimerait devenir le prochain capitaine, avait répondu qu'il en avait amplement de son rôle de marqueur sans avoir à se soucier de ce genre de responsabilité.

Mais à mesure que l'été avançait, il se montrait de plus en plus réceptif.

«Ce n'est pas que j'aie changé d'idée, c'est juste qu'il fallait être respectueux à l'endroit des joueurs qui étaient dans le vestiaire, a expliqué en entrevue avec La Presse l'un des quatre assistants-capitaines pour 2014-2015. On ne savait pas à ce moment-là quels changements allaient survenir. Brian Gionta était notre capitaine et Josh Gorges semblait prêt à lui succéder. Je ne voulais pas marcher sur les pieds de quiconque. Ce n'était ni le moment ni l'heure de dire que je me sentais prêt à devenir capitaine.

«Mais visiblement, l'organisation voulait prendre une nouvelle direction. On a de nouveaux visages et je sens que le temps est venu pour moi d'être un leader au sein du groupe.»

L'ailier de 25 ans se montre très exigeant envers lui-même. Et le leadership qu'il pourra apporter réside précisément dans cette rigueur qu'il exigera des autres autant que de lui-même.

«Je veux avoir du succès sur le plan individuel et je me mets beaucoup de pression pour y arriver, confie Pacioretty. Mais maintenant que je suis un leader, je dois exiger de l'équipe les mêmes standards que ceux que je m'impose.

«Je suis curieux de savoir où cela va nous mener.»

Marc Bergevin lui a présenté la chose, au début du camp d'entraînement, en lui disant qu'après s'être tournés vers d'autres vétérans au cours des années précédentes, c'était maintenant vers lui que les jeunes allaient se tourner.

«Je dois en tenir compte et aborder les choses en conséquence, constate Pacioretty. Je ne suis pas un vieux vétéran, mais je peux quand même offrir un coup de main aux plus jeunes.»

Ignorer les ouï-dire

Mais ce que Pacioretty a réalisé en parallèle, c'est que les plus jeunes pouvaient eux aussi lui en apprendre.

«Ce que j'ai compris depuis que je suis à Montréal, c'est qu'on n'est jamais aussi bon qu'on le croit et qu'on n'est jamais aussi mauvais que les autres le disent. Ce que j'entends par là, c'est que si on laisse les ouï-dire jouer sur nos émotions, on ne trouvera jamais d'équilibre et de constance dans notre jeu.

«C'est Brendan Gallagher qui m'a aidé à m'en rendre compte. Il n'a que 22 ans, mais il ne se laisse pas influencer par ce genre de choses. Il est le meilleur que j'aie vu à ce chapitre.»

Pacioretty reconnaît avoir eu du mal à composer avec le bruit ambiant à ses deux premières saisons dans la LNH. Il y parvient beaucoup mieux aujourd'hui, même si, parfois, les critiques non fondées le font encore bondir.

«La différence, c'est que moi, je ne cache pas mes émotions, dit-il. C'est sûrement une chose sur laquelle je devrais travailler, mais je ne suis pas du genre à faire de faux sourires!»

Pacioretty constate que l'écart entre les perceptions extérieures et ce qui se dit dans les meetings entre joueurs et entraîneurs crée des distorsions et que cela peut mener à des questions qui l'irritent.

«On sait comment chacun de nous joue. On a des rencontres avec les entraîneurs là-dessus. Je sais quand je joue bien et quand je suis plus mou et que je n'amène pas la rondelle au filet. Mais quand quelqu'un m'arrive avec des déclarations qui sont très loin de la vérité - ce qui se produit constamment -, à mon sujet ou même d'un autre joueur, c'est là que ça dérange.»

Entre intensité et colère

Durant l'été, Pacioretty s'entraîne au Connecticut avec Martin St-Louis et quelques autres joueurs de la LNH. L'attaquant québécois, considéré comme le «mâle alpha» dans le gymnase de Ben Prentiss, puise son succès dans une quête perpétuelle de se prouver. Comme s'il y avait une forme de colère dans son jeu.

Pacioretty est-il fait de la même fibre?

«Martin est dans une catégorie à part, répond-il, mais c'est vrai que je joue mon meilleur hockey quand je suis intense, quand je réplique verbalement à l'adversaire et que je m'implique physiquement. Je pense que la plupart des joueurs sont ainsi.

«Mais on en revient à la question de la constance. Il faut trouver la motivation, la colère et l'énergie pendant 82 matchs, et c'est ce qui est le plus difficile. Quand on est sur la plage en Floride et qu'on affronte les Panthers le lendemain devant des gradins à moitié vides, c'est plus difficile de jouer en ayant quelque chose à prouver.

«Mais les meilleurs joueurs, eux, y arrivent.»

«Je suis sous-payé»

Pacioretty a marqué 39 buts la saison dernière. Il a terminé ex aequo au troisième rang de la LNH pour le nombre de buts par match. Son contrat de 4,5 millions par saison est une véritable aubaine pour le Canadien.

Mais le principal intéressé ne s'en formalise pas.

«Je sais que je suis sous-payé, mais je ne suis pas du genre à prendre des risques. Je ne prends pas de risque dans mon jeu. Et si je gagne 200 $ au casino, je m'en vais.

«Je me suis cassé le cou et j'ai eu une commotion cérébrale terrible. La saison suivante, j'ai eu une très bonne saison et je me suis dit qu'il était temps que je m'établisse. J'aurais pu aller chercher davantage, mais pourquoi? Je suis bien payé pour faire ce que je fais et ce n'est pas certain que j'aurais pu élever mon jeu là où il est aujourd'hui si des questions de contrat avaient toujours plané au-dessus de ma tête...

«J'ai encore cinq ans à écouler à un contrat qui m'apporte beaucoup de sécurité. D'autres contrats suivront, mais je ne cherche pas à faire sauter la banque. Ma famille et moi sommes plus qu'à l'aise et je peux me concentrer sur mon jeu.»