C'est une vérité de La Palice: Alex Galchenyuk sera le point de mire du camp d'entraînement de six jours qui s'ouvrira en fin de semaine à Brossard.

Si le jeune prodige se montre compétitif devant des joueurs de la LNH, la pression populaire sera forte pour que le DG Marc Bergevin l'invite à entreprendre la saison à Montréal. À tout le moins pour les cinq matchs auxquels il aura droit - c'était neuf dans la convention collective précédente - avant que le Tricolore ne doive décider s'il le garde ou s'il le renvoie au Sting de Sarnia.

Si l'on se fie aux années passées, un jeune joueur gagne habituellement la faveur du public montréalais en symbolisant le sang neuf tant attendu. Mais le passé démontre aussi que l'état-major est en mesure de résister à l'enthousiasme des amateurs et de certains médias, comme on l'a vu l'an dernier avec Brendan Gallagher.

Guillaume Latendresse sait très bien ce qui attend Galchenyuk au cours des prochains jours. Ses performances au camp d'entraînement du Tricolore de 2005, lorsqu'il n'avait que 18 ans, avaient créé la frénésie au Centre Bell.

«J'étais sur un nuage et j'avançais avec, se souvient l'attaquant des Sénateurs d'Ottawa. Je n'avais aucune idée de ce qui se passait. Je terminais l'entraînement, je rencontrais les médias et je disais tout ce que je pensais sans mettre de filtre. Parfois ça me mettait dans le pétrin, parfois non.

«À ce niveau-là, je n'ai pas changé. Je n'ai jamais appris la cassette.»

Les équipes doivent déterminer si le jeune de 18 ans peut apporter une contribution significative à l'équipe, suffisante en tout cas pour qu'il se forme plus qu'il ne le ferait dans le junior.

Mais pour le joueur, l'expérience personnelle peut être étourdissante. Selon Latendresse, la Ligue nationale rend les jeunes matures plus vite que bien du monde.

«À 18 ou 19 ans, on est placé devant des situations que des gens ne vivront jamais de leur vie, dit-il. Du jour au lendemain, j'étais passé d'un jeune qui mangeait dans un resto de Drummondville à un gars qui ne pouvait plus sortir de chez lui.

«Je me sentais comme un lofteur!»

Les émotions de la veille

Au-delà des «Gui! Gui! Gui!» de l'époque, l'ailier de 25 ans estime que ça n'a pas été une mauvaise chose de retourner dans la LHJMQ à 18 ans. L'année suivante, par contre, il savait qu'il serait mieux servi s'il apprenait son métier à Montréal, même dans un rôle réduit, plutôt que de jouer une saison au-dessus de ses affaires dans le junior.

Somme toute, Latendresse est heureux du cheminement qu'il a vécu à Montréal. Mais il met Galchenyuk en garde. Si ce dernier devait rester un tant soit peu dans l'entourage de l'équipe, il devrait se protéger des excès émotifs de son entourage.

«À Montréal, une défaite, c'est la fin du monde, dit Latendresse. C'est comme si, après une défaite, on n'a pas le droit de dormir ou d'aller prendre une bière. Il faudrait renter chez nous et pleurer.

«J'ai appris avec le Wild du Minnesota qu'une fois le match terminé, il n'y a rien qu'on puisse faire pour en changer le résultat. Si on n'est pas content d'hier, il faut en donner le lendemain, et c'est tout. Mais rester sur la performance de la veille n'apporte rien, ça nous entraîne dans un cercle vicieux. C'est un peu ce qui arrive à Montréal.

«Il y a un juste milieu à trouver, ce qu'un jeune de 18 ans ne verra peut-être pas.»

Photo: Bernard Brault, archives La Presse

Les performances de Guillaume Latendresse au camp d'entraînement du Canadien de 2005, lorsqu'il n'avait que 18 ans, avaient créé la frénésie au Centre Bell.