On ne voit pas cela souvent. Une équipe sur le point d'entreprendre le plus long voyage de sa saison, à l'autre bout du continent, et qui est soumise à un entraînement punitif le matin du départ.

C'est pas mal ce qui s'est passé avec le Canadien, hier, avant qu'il ne prenne l'avion pour Calgary.

«Ça nous envoie le message qu'on ne travaille pas assez fort pour mériter un congé», a mentionné Tom Kostopoulos.

En temps normal, les joueurs du Tricolore auraient profité de quelques heures de plus avec leur famille avant d'aller disputer leurs six prochains matchs sur la route.

Mais voilà: l'équipe n'est pas en temps normal. «Mon premier réflexe aurait été de les faire patiner sans rondelle pendant une heure» , a indiqué Carbo, échaudé par les deux plus récentes contre-performances de son club.

«Mais je me suis assis avec Bob Gainey et le groupe d'entraîneurs et on a regardé ce qu'on devait faire pour aider l'équipe. J'ai un peu adouci ma position.»

L'entraînement a débuté avec une demi-heure de retard et d'entrée de jeu, chronomètre en main, Carbo a fait suer ses hommes avec près de 15 minutes de patin. Après est venu le travail technique, axé sur les sorties de zone et l'échec avant. «En jouant trop souvent du hockey de rattrapage, a expliqué Carbonneau, on a tendance à forcer les choses au lieu de laisser le jeu se développer. Par exemple, on se retrouve à faire de l'échec avant trop rapidement, avec un deuxième attaquant qui n'est pas bien positionné.»

Le souvenir de l'an passé

Inutile de dire que la série de six matchs à l'étranger, qui débute ce soir, pourrait être un tournant dans la saison.

L'équipe a quitté Montréal en étant toujours à la recherche de l'ingrédient miracle. Il y a ces sept défaites en neuf matchs, mais aussi le fait qu'elle ne peut bâtir sur rien qui ne soit frais en mémoire.

Car si le CH a eu quelques passages à vide cette saison, il n'a jamais vraiment aligné les victoires convaincantes. «Peu importe ce qu'on essaie en ce moment, ça ne fonctionne pas, a déploré Alex Kovalev.

«L'année dernière, on dictait le jeu en contrôlant la rondelle la majorité du temps et en utilisant notre vitesse.

«Ces temps-ci, on gaspille trop de temps à courir après la rondelle.»

Kovalev croit que les problèmes du Tricolore résident dans un étrange mélange de confiance et d'ardeur au travail.

«Ce qu'il y a de plus frustrant, c'est qu'on sait à quel point on peut être bons, soutient l'Artiste. Mais on a de la difficulté à répéter.

«D'une certaine manière, c'est un peu normal parce que nous ne sommes pas des robots. Mais l'effort devrait toujours être là. »

Christopher Higgins a résumé le sentiment général avec un cliché pourtant criant de vérité. «On a besoin de jouer avec un plus grand sens de l'urgence», a-t-il dit.

C'est précisément ce qui a fait le succès du Tricolore l'an dernier, ajoute Carbo. «Puisque tout le monde nous voyait hors des séries, on a joué avec urgence dès le premier match, a rappelé le coach.

«La même chose se produit cette année avec les Bruins, que personne ne voyait là. Ils ont développé de bonne heure un sentiment d'urgence.»

Le voyage dans l'Ouest ne représente-t-il pas une occasion, justement, d'instaurer cette urgence? De dire aux joueurs que ça passe ou ça casse lors des deux prochaines semaines?

Carbo préfère résister à cette tentation. «On sait que ça va être un voyage difficile, mais ce sont toutes des équipes qu'on peut battre, affirme-t-il.

«Même si on a perdu nos cinq derniers matchs à l'étranger, le fait d'être loin de la pression et de Montréal ne peut être qu'une bonne chose.»

L'urgence est cependant devenue mathématique. Le Canadien s'accroche désespérément au quatrième rang de l'Association de l'Est. Et ça se bouscule tellement, juste en-dessous, que l'équipe pourrait être en position de rater les séries si elle revenait de voyage avec la bite sous le bras.

«Il n'y a aucune raison pour qu'on se sente complaisants par rapport à notre position, a reconnu Chris Higgins.

«Six points nous séparent du neuvième rang dans l'Est. Aussi bien nous habituer parce que de la façon dont les points sont distribués, ça va toujours être aussi serré.»

Si la traversée est périlleuse, il y a quand même plusieurs équipes dans le même bateau, a cependant noté Carbo.

«Notre quatrième position est menacée, mais à ce compte-là, il y a plusieurs équipes derrière qui sont aussi en position vulnérable.»