Lorsqu'elle se présentera sur le tremplin de 3 mètres du Centre aquatique panaméricain dimanche, Jennifer Abel n'aura qu'un seul objectif: décrocher la médaille d'or. Ce résultat lui permettrait d'envoyer un message clair aux Chinoises à un an des Jeux olympiques de Rio de Janeiro.

La Lavalloise, âgée de 23 ans, a passé le plus clair de son temps cette saison à tenter de combler l'écart qui la sépare des Chinoises Tingmao Shi, Zi He et Han Wang.

Les Chinoises ont signé des doublés à chacune des six étapes des Séries mondiales de plongeon en 2015, sauf à Kazan, en Russie, où Abel s'est faufilée entre Shi et Wang.

«Je suis vraiment très près des Chinoises, mais tout est une question de confiance, de la façon dont j'aborde chaque compétition», explique Abel, inscrite au tremplin de 3 mètres individuel ainsi qu'au 3 mètres synchro à Toronto en compagnie de la Montréalaise Pamela Ware.

«Je me suis souvent approchée à quelques points d'elles, mais je sais que ce ne sera pas facile, a-t-elle ajouté. Il faut le prouver, sur une base régulière, et je suis certaine que je vais y parvenir avant les JO de Rio.»

Son entraîneur, Arturo Miranda, estime que sa protégée a tous les outils nécessaires pour vaincre les Chinoises, mais elle devra d'abord et avant tout bâtir sa confiance lors des Jeux panaméricains cet été.

«Honnêtement, (Jennifer) pourrait affronter des hommes si elle le souhaitait, a-t-il dit. Parfois, je suis très dur avec elle parce que je veux qu'elle devienne plus solide mentalement. Il faut qu'elle parvienne à oublier les distractions, afin de se concentrer uniquement sur les compétitions et ses objectifs. Elle doit se servir davantage de sa tête, et moins de ses émotions.»

Abel est la première à le reconnaître, sa confiance est fragile. Mais le style de Miranda, un ex-plongeur olympique qui a traversé des épreuves semblables au cours de sa carrière, lui convient parfaitement.

«Arturo croit beaucoup plus dans mon talent que moi-même, admet-elle à propos de son entraîneur depuis 2012. Donc ça m'aide beaucoup parce que je lui fais confiance afin de travailler sur de nouvelles techniques qui me permettront d'être médaillée aux Jeux panaméricains et aux JO.»

Parmi celles-ci se trouve le double saut périlleux et demi avant avec deux vrilles - «un plongeon d'hommes», selon Miranda. Abel est présentement la seule plongeuse au monde à l'effectuer systématiquement au cours de sa routine, un avantage considérable, à condition de le réussir.

C'est que la vrille supplémentaire fait passer le coefficient de difficulté de 3,0 à 3,4. Ce chiffre sert de multiplicateur aux notes des juges. Lorsqu'elle est bien réussie, la manoeuvre devient donc très payante.

La médaillée de bronze au tremplin de 3 m synchro aux JO de Londres en 2012 l'a notamment réussie, en compétition, devant les siens en avril dernier à la Coupe Canada à Gatineau. La suite de sa performance a toutefois été gâchée par une gaffe lors du cinquième et dernier plongeon de sa routine individuelle. Une performance qui résume bien sa saison jusqu'ici.

Les rôles inversés

Abel entamera les Jeux panaméricains, dont le coup d'envoi sera donné vendredi à Toronto, dans un rôle bien différent de celui qu'elle joue depuis le début de la saison. Cette compétition regroupe en effet seulement les athlètes des pays des Amériques - les Chinoises Shi, He et Wang seront absentes.

Ainsi, après avoir été la négligée pendant une bonne partie de l'année, Abel doit être considérée comme l'une des favorites pour l'emporter. Ce n'est cependant pas l'avis de la principale intéressée.

«Ça dépend comment on voit ça. Si les gens s'attendent à ce que je sois "la Chinoise de l'Amérique", disons, je sais que je vais me tirer dans le pied», a imagé la double olympienne.

«Elle n'est pas la favorite, a renchéri Miranda. Elle est certes l'une des meilleures, mais elle devra se méfier des Américaines et des Mexicaines. Si elle fait ce qu'elle a à faire, alors elle sortira grande gagnante. Mais aucune compétition n'est gagnée d'avance, même en l'absence des Chinoises.»